Préfères-tu mourir écrasé par une voiture...ou étouffé dans ton vomi ? [pv Mordred]

En périphérie, il était facile de se cacher. Des dizaines d'immeubles non habités se juxtaposaient les uns par rapport aux autres, la saleté s'accumulait. L'aéroport était relativement à côté de l'endroit où il se trouvait, le bruit devenait presque insupportable à ses oreilles. Hadès avait entendu dire qu'il s'agissait de l'endroit où on avait retrouvé Beyond Birthday, le criminel en train de faire une énième diffusion de crimes en direct à la télévision. Ce dernier hackait il ne sait trop comment les fils du système pour transmettre ses images immondes au monde tout entier.

Respiration.

Il n'avait pas de chance, s'il croisait un flic ici. A priori, cet endroit était un no man's land moins bien surveillé que les bas-fonds qui, eux, devenaient craignos pour un ancien prisonnier. Il y avait la résidence secondaire de Will, bien sûr, mais Hadès était un de ces hommes qui ne pouvaient pas ne pas bouger. Il avait besoin de mouvement, de marcher, voire de rencontrer des gens pour faire enfler son réseau de résistant. Il n'était pas forcément facile de se dire que ce type banal, là, devant vous, était un chef de la résistance et seul quelqu'un l'ayant déjà vu et ayant un fort sens de la physionomie pourrait s'y risquer.

Cet homme aux cheveux bruns se promenait donc dans les bas-fonds. Il ne paraissait pas particulièrement jeune, ni vieux, d'ailleurs. De petites rides se lisaient sur les côtés de ses yeux lorsqu'il souriait, lui donnant plutôt l'air agréable. Il avait l'air d'être un homme à femmes, un homme qui avait fait carrière dans on ne savait trop quel milieu et qui se baladait, relativement calmement. Vêtu d'un costume, il avançait prudemment, guettant le moindre uniforme et la moindre sirène de police. Hadès, ou plutôt Akira Darkwood savait que s'il était repris, c'était la mort. La mort, mais la torture d'abord, le fait que son frère jumeau soit un ministre connu ne changerait rien, Harlaown serait bien trop heureuse de se venger.

Ici.

Hadès n'était pas ici pour rien, il avait un but précis : jadis se trouvait à cet endroit-là, dans ces immeubles, un ancien quartier général. S'il avait été abandonné il y avait des années pour cause de bâtiments insalubres – oui, même les résistants sont des gens civilisés – le disque dur de l'ordinateur était resté en place pendant des années et personnes – quels imbéciles – n'avait songé à venir le copier, puis lui foutre un coup de sabre. Et cela tombait bien, dans cet étui, là, sur son dos, il avait un sabre. Oh, pas le sien, celui qu'il chérissait tant parce que celui-ci était entre les mains des pro-Kiras, mais un sabre de rechange, pas aussi joli mais bien efficace pour le moment.

Il poussa deux ou trois poubelles dans lesquelles s'accumulaient d'innombrables déchets en tous genres. Une trappe se trouvait là, au milieu, sous la poussière et un vieux tapis. Discret. Si tous leurs quartiers généraux étaient aussi discrets, certains ne se feraient pas canarder aussi rapidement...mais si la rumeur à propos du nombre du taupes dans leurs rangs était vraie, les pro-Kiras s'arrangeraient aussi pour les massacrer tranquillement en huis-clos.

Hadès alluma une lampe torche et s'enfonça dans la « cave » après avoir refermé la trappe...Mit un mouchoir devant son nez, car l'odeur était forte. Depuis quand cet endroit n'avait été aéré ? Lorsque Zen lui en avait parlé, il en avait déduit que cela devait être une des précédentes caches de l'Ordre, le groupe secret de Machiavel. Et c'était pour cela qu'il était là : pour savoir s'il n'y avait pas moyen de récupérer des informations sur leur nombre, leurs identités. Le filet de lumière passa tour à tour sur divers trucs informes. Enfin, il repéra les ordinateurs, vers lesquels il se précipita. Appuya sur le bouton de marche...

...Et les écrans s'allumèrent rapidement. Lueur rouge. Tête de mort. Grand rire enregistré par le précédent possesseur de la base, des petites étincelles vinrent caractériser la mort du serveur et tout redevint noir.

Évidemment, des résistants n'auraient pas pu laisser des informations comme ça, il était con, et en plus, il ne savait même pas s'il y avait un générateur de secours.

« Et merde... »

Je suis dans ce bâtiment abandonné parce que c'est plus peinard que les roulottes du cirque, niveau intimité. J'veux dire, pour les filles, tout ça. Enfin y en a qu'une mais j'aime bien mettre un pluriel pour faire genre. Puis si ça se trouve, j'ai peut être été autre chose que le plan cul de la dompteuse de tigres du cirque avant, mais je m'en souviens pas. Qui sait ? En tout cas, je peux le mettre, mon putain de pluriel.
Mon lit est minuscule, alors qu'ici c'est plein de sol où on peut se rouler, avec même des morceaux de plâtre et un pigeon crevé dans un coin pour épicer le truc. Enfin j'ai été galant quand même, j'ai poussé la carcasse du pied en arrivant. Et c'est vraiment peinard, c'est le premier étage d'un vieil immeuble tout pourri, difficile d'accès vu que les escaliers sont en ruine. Enfin je croyais.

Y a du bruit. Je fais signe à la nana de rester allongée, je me rhabille vite fait et je vais voir à la fenêtre en silence. Je me dis qu'un gars qui vient farfouiller par là, c'est forcément pour un truc bizarre auquel j'ai pas envie d'être mêlé. Faut mieux tenir ça à l'oeil, voir si il fait signe de monter. Pas du tout : il pousse des poubelles. A ce moment là je me dis que c'est sans doute une boîte à lettre, un endroit pour planquer de la drogue quoi, mais non. Y a une trappe bien cachée en dessous, et de la lumière qui sort de la cave. Et là je tique sur le nom du gars. D'habitude je fais pas trop gaffe à ce qui est écrit sur mon champ de vision, l'expérience m'a appris qu'il fallait mieux pas en tenir compte. Ça peut faire flipper les gens qu'on connaisse leurs noms sans qu'ils se soient présentés. Mais là c'est le nom d'un ministre, celui de la justice je crois. Et j'ai déjà vu sa gueule en photo, vu qu'ils foutent ces gens là partout. Et y a un autre truc qui me fait tiquer mais j'arrive pas à m'en souvenir parce que je suis crevé. Et en plus, il ressemble trop à un gigolo là. Pourquoi ?

Je chuchote à ma collègue que je vais suivre le gars et qu'elle peut rentrer. Elle me répond que je suis qu'un con. Je hausse des épaules, parce qu'il y a pas grand chose à répondre à ça. Du coup elle part en faisant la gueule, et je me casse pour suivre le ministre sans me retourner, pour faire style je m'en fous. Je saute par la fenêtre et me réceptionne souplement. C'est pas hyper haut. 'fin moi j'suis équipé d'ADN en rab' évidemment. Que l'autre connasse aille se démerder toute seule avec ses quarante six chromosomes à la con. J'attends quelques secondes et je me faufile dans l'escalier qui descend. Y a pas grand chose à en dire, c'est aussi abandonné que le reste, sauf qu'il y a encore du mobilier et des ampoules qui marche, comme si tout le monde s'était barré d'un coup et qu'on avait complètement oublié cet endroit. J'veux dire, personne a rien fauché. Mais sinon à force d'être dans le renfermé y a des trucs qui ont tourné bizarre et ça sent fort le moisi. Peut être même que quelque chose est mort là dedans, vu l'odeur. Et y a des couleurs intéressantes sur certains papiers peint, genre blanc qui tire sur le verdâtre. Je vais me faufiler dans un coin où le gars n'est pas.

Le ministre a l'air très occupé sur un ordinateur. Je m'y connais pas là dedans, vu que je vis dans une caravane. Ça ralentie un peu le progrès de la science chez moi. Ça lui met même une balle entre les deux yeux. En tout cas, pas m'y connaître m'empêche pas de comprendre qu'il fait de la merde. Y a des bruits chelou qui sortent de l'ordi, et les lumières sautent. On se retrouve dans le noir. Je ne vois plus le nom et les dates du gars. Je vois que dalle en fait. Merde. Je m'accroupis, et je cherche la sortie à tâtons, parce que j'ai fermé la porte derrière moi comme un abruti. C'est pas très digne comme méthode, mais faut surtout pas que je fasse de bruit et que je tombe dessus. Je veux pas me faire choper par un ministre dans une cave bizarre.

Il était dans le noir et, sur le coup, il faillit lâcher la lampe torche ; Hadès poussa un grognement, haïssant mentalement Machiavel qui lui causait bien des ennuis – si toutefois il s'agissait de Machiavel. Il commençait ensuite à inspecter les différents coins du bâtiment, n'entendant pas spécialement d'autres personnes entrer dans cette cachette – après tout, pour lui, cet endroit était tellement bien caché qu'il paraissait improbable que quelqu'un d'autre que lui y pénètre.

L'homme poussa un soupir de soulagement : le faisceau avait heurté une masse sombre qui sembla être le générateur de secours. Hadès commença alors à faire quelques pas en avant, foutant sa lampe en direction du sol, histoire de ne pas se prendre les pieds dans des seringues, des flingues, des trucs moisis, il ne savait pas trop quoi. Il devait sûrement y avoir un ou deux rats morts dans le coin pour que ça pue à ce point. Il enjamba un truc sombre non identifié et finit par arriver jusqu'à ce qui devait être le générateur de secours. Là, il tendit la main un peu au hasard, éclairant l'objet. Le métal avait une drôle de texture, qui devait être sèche mais qui, sous ses doigts, était quelque peu poisseuse. Il enclencha le générateur de secours en relançant le courant et la lumière se fit.

La lumière se fit et Hadès fixa le compteur couleur gris, parsemé de tâches rouges croûte. Craignant ce qu'il allait voir, il se retourna doucement, et ses doutes devinrent réalité : à première vue, il vit environ cinq cadavres, là, affalés près du mur, en ligne droite. Il ne s'en rapprocha pas tout de suite, mais savait que cela signifiait une exécution de la part des autorités. Que ce n'était pas vraiment étonnant qu'ils n'aient plus entendu parler de ces gars-là, puisqu'ils étaient tous morts. Trop choqué pour bouger, Hadès ne vit pas tout de suite Mordred. Il se demandait depuis combien de temps ces gars-là étaient mort, parce que vu l'odeur et l'état de conservation, ça n'avait pas l'air d'être la veille. Il pensait que c'était au moins depuis un mois ou deux...trois, peut-être.

L'odeur lui donnait envie de dégueuler.

Hadès changea son regard de direction et vit cet homme, debout près de la porte. Se demanda s'il n'avait pas une hallucination. Qui était ce type ? Que foutait-il là ? Un homme du gouvernement qui le recherchait, peut-être ? Non, eux, ils seraient sans doute incapable de le reconnaître sous ce maquillage...il était plus ou moins tranquille tant qu'il ne voyait pas Fate ou l'une de ces créatures étranges qui étaient sous leurs ordres.

« Qui êtes-vous ? Répondez ! Je suis armé, je vous déconseille de sortir ! »

Il se rapprocha de Mordred, préférant s'éloigner des cadavres qui le répugnaient.

« Vous savez ce qui est arrivé à ces gars-là ? Je me présente : Hibiki Yamamoto. Je suis un explorateur, je fais une thèse sur ces immeubles de périphérie et sur les conditions de vie des gens... »

Lorsqu'il rencontrait un étranger, Akira préférait lui donner un faux nom, ce qui était totalement normal. Il était fortement probable qu'il tue ce type dans la minute qui allait suivre, soit parce qu'il allait se montrer hostile à son égard, soit parce qu'en fait, c'était lui, le meurtrier.

Là il s'est passé plein de trucs. D'une part, la lumière s'est remise en marche, ce à quoi je ne m'attendais pas du tout, d'autre part il y a cinq guss morts avec nous.
Ah.
J'ai essayé de hurler et de serrer les dents en même temps. Ça a pas donné grand chose. C'est comme si ce que je voyais me brûlait la tête. J'ai pas vraiment l'habitude de fréquenter des cadavres tout moisi. J'arrêtais pas de relever des détails à la con, comme le fait que le ventre de l'un se gondole à cause des asticots en train de s'agiter là dedans où que l'autre a la mâchoire qui a coulé sur sa poitrine. J'arrive pas à en détourner les yeux et pendant quelques secondes je suis sidéré d'horreur. Puis mes jambes prennent des initiatives et je fuis vers l'autre bout de la pièce à reculons, pour m'éloigner de ces merdes le plus vite possible. J'avais jamais vu de... gens dans cet été avant. Y a pas grand chose qui prépare au spectacle de cinq cadavres tout moisi dans un coin au moment où tu t'y attends pas.

Je suis dans l'angle le plus sombre de la pièce, les dents serrés et les yeux écarquillés, et la réalité est en train de me rattraper. Quelque chose s'agite dans mon ventre et je me mets à vomir. Ça se met à sentir fort l'alcool fermenté dans la bile. Je me force à redresser la tête et à serrer les dents pour gérer les emmerdes en train de me tomber dessus, mais j'ai de nouveau quelques haut-le-cœur en voyant les morts. Putain c'est vraiment le truc le plus dégueulasse que j'ai vu de ma vie. Putain. Je crache péniblement quelques filets de bave, vu que je vomis l'estomac vide. Même respirer profondément pour se calmer ça sauve pas parce qu'il y a l'odeur aussi... mais j'ai encore un ministre bien vivant à gérer, et il faut pas que je me mette à faire des... trucs bizarres. Tu sais. Bref, faut que je calcule ce qui se passe.
J'essuie ma bouche sur la manche de mon sweat trop grand. Je me redresse. Le gars m'a sorti un bobard sur ce qu'il est en train de foutre ici, je m'en fous. J'essaye de pas regarder les carcasses de gens. Je respire trop vite. Le ministre de la justice, putain. Je suis dans une cave pleine de morts avec le putain de ministre de la justice. Je vais mourir.

- Je traînais dans le coin et je vous ai suivi parce que j'pensais que ça serait intéressant là dedans, j'ai rien à voir ! Je suis personne !

Ma voix est trop aigue, je parle trop vite. Et je sens que mes mains sont en train de changer. Oh bordel. Je tire nerveusement sur mes manches avec ce que j'espère être mes doigts pour cacher tout ça. Ce sweat est trop grand pour moi, je peux aisément cacher mes mains dans les manches. Je veux pas savoir à quoi elles ressemblent, j'ai pas osé regarder. Ça serait sans doute horrible, et j'ai déjà assez à gérer comme ça. Enfin à gérer... je peux rien faire du tout là. J'en ai trop vu. Je suis dans une cave avec le ministre de la justice et cinq cadavres en train de pourrir, mes mains ont doublé de volume et ressemblent à va savoir quoi, je peux pas m'en sortir vivant. Je recule nerveusement de quelques pas, jusqu'à sentir le mur dans mon dos. J'arrive plus à penser.

Les cadavres...les asticots sortaient des cerveaux, les traces de sang sur les murs, prouvant qu'ils étaient debout lorsqu'on les a tués, qu'on les a assassinés. L'être qu'il avait trouvé vomit, l'odeur le prit encore plus aux tripes, il...tentait de se concentrer, ne pas regarder la bile par terre, détourner le regard des cadavres...ne pas non plus fixer trop longtemps la lumière. Écoutait vaguement les paroles de l'étranger qui avait l'air bien trop effrayé pour être suspect. La frayeur suait de ses paroles, si bien que Akira hochait la tête avait de se baisser à son tour, par mimétisme, et vomir ce qu'il avait dans son estomac.

Soit la moitié d'une tablette Wonka, un cornet de frites, des bouts de hamburger mélangés à du coca. Ne vomissez jamais du coca, c'est sans doute la chose la plus ignoble à vomir, avec le Manzana.

Il se sentit tout de suite mieux après qu'il n'eut plus rien dans l'estomac. Bien sûr, il y avait toujours les cadavres, la pièce complètement crade et cet individu, mais ça faisait un truc en moins. Akira attrapa Mordred par la manche pour le remonter à la surface. Il courut presque, ou fit de grandes foulées en marchant, tenant toujours cette manche qu'il trouvait décidément épaisse pour quelqu'un de cette envergure...tant pis, là, il l'entraîna à sa suite et le fit remonter à la surface.

Le jour les accueillit et Hadès cligna plusieurs fois les yeux, un peu impressionnée par l'éclatante lumière du soleil, forte par rapport à la lampe grésillante de la cave...La cave...rien que de penser aux cadavres qui s'y étaient accumulés, il en avait la nausée. Pour un peu, il aurait envoyé un autre SMS d'insultes à Fate, mais il n'avait pas le bon portable pour le faire...ce soir, il le ferait : peut-être aurait-il quelques indices sur ce lieu...ou pas. Sa main serrait toujours la main de Mordred, et il se rendit vraiment compte de la grosseur hors du commun de ce bras. Se permit de remonter la manche et...hallucina.

« Oh bordel...c'est pas vrai... »

Ce n'était pas un humain, car les humains n'ont pas des bras...humanoïdes...bizarres...il n'aurait su trouver de mot pour qualifier ce qu'il voyait actuellement. La dernière fois qu'il avait vu un truc comme cela, c'était...au quartier général, c'était ça. Si cet homme était un des leurs, de ces créatures bizarres qui pouvaient remuer leur ombre et le fouetter avec, il...était dans la merde. Lâchant la main, Hadès esquissa deux pas en arrière, se mettant en posture de combat.

« Je ne pensais pas que vous me retrouviez aussi tôt...Malheureusement, je ne suis pas prêt à rejoindre les geôles du Quartier Général de Kira. Je pensais qu'au moins, mon frère viendrait en personne, mais il n'envoie que...vous...vous avez quelle capacité, vous ? Vous vous transformez, c'est ça ? »

Il n'avait pas encore sorti le sabre de son fourreau mais n'était pas loin de le faire. Après tout, Mordred, lui, n'avait commis aucune erreur. Il n'avait pas dit qu'il l'attaquait, il n'avait pas l'air d'être mêlé à ces crimes et vu son ton, tout à l'heure, il le croyait. Pourtant, dans cette affaire, il y avait quelque chose qui lui échappait. Pourquoi... ? Pourquoi trouvait-il quelqu'un qui se trouvait être un semi-shinigami, du moins le supposait-il, pile sur les lieux d'un crime, quelques semaines après qu'il se soit évadé. La réponse la plus probable était qu'on avait envoyé cet homme le filer, et qu'il l'avait reconnu en voyant son nom sur sa tête : après tout, la fille-chose qu'il avait vu au QG pouvait elle-aussi faire cela !

« C'est Arashi Darkwood qui vous envoie. Ou bien ce cher Iwa. Je préfère encore me faire seppukû plutôt que rejoindre les laboratoires. »

Le ministre m'attrapa le bras pour sortir, je l'ai laissé faire. Je n'aurais jamais réussi tout seul à passer devant les cadavres pour sortir. C'est une fois à l'air libre que les problèmes ont commencé. Ces gars étaient morts, ils pouvaient pas faire grand chose mis à part me foutre la gerbe, mais un ministre vivant c'est autre chose. Et il m'avait attrapé par le bras. Une fois dehors il s'empresse de remonter la manche de mon sweat pour voir ce qu'il y a en dessous. J'ai pas envie moi. Ça sera sans doute monstrueux. Mais je laisse faire. J'ai pas de main pour l'en empêcher.
Je peux pas m'empêcher de baisser le regard en même temps que Darkwood, pour voir ce qu'il y a à voir. Et c'est effectivement monstrueux. Ma euh... patte, a complètement changé de forme. Elle est beaucoup plus longue, plus grosse, et recouverte de plumes noires à l'aspect inquiétant. Les articulations ont pas mal changé de place, ce qui est très perturbant. A la place des doigts il y a de très longues griffes, noires et luisantes aussi. Et j'ai plus de pouce. J'ai un ergot. En me concentrant dessus je le fais légèrement bouger, et c'est une sensation très flippante. Celui qui me tient la patte a l'air terrifié aussi, il la lâche précipitamment. Il recule en posture de combat. Oh merde. Je me sens... partir. Trop de panique d'un coup, je suis fatigué là. Il s'est passé trop de chose. J'ai l'impression de pas être vraiment présent, de regarder un film, celui où je meurs. Puis le gars parle.
Hé mais... c'est pas le ministre !
Ça me fait raccrocher les wagons. Je réfléchis très vite : la situation n'est pas si pourrie que ça. Enfin... le gars est quand même le frère du ministre, mais visiblement il veut pas avoir commerce avec lui. Moi non plus. Ni avec personne du gouvernement. Ça nous fait un point commun, il doit y avoir moyen de s'en sortir avec tous ses organes vitaux intacts. Je mets maladroitement mes pattes dans mon dos, histoire qu'elles se fassent oublier un peu. Puis moi aussi elles me font flipper.

- J'ai rien à voir avec le gouvernement ! Et je veux pas retourner aux laboratoires non plus ! J'ai rien à voir avec rien, je suis personne, voilà. Et je dirais rien sur les cadavres et tout parce que j'ai pas envie qu'on me pose de question non plus. J'aurais pas dû vous suivre, voilà, mais laissez moi partir je baverai que dalle.

Je préfère pas trop en dire sur moi, sur les shinigamis, sur le labo de Kira et toute cette merde. Je veux pas l'énerver. Mais je sais même pas ce qu'il veut ce gars. Sûrement juste me tuer, mais pourtant je suis pas encore mort. Je dois pas avoir l'air très agressif avec les mains dans le dos, du plâtre dans les cheveux, l'air malade et les vêtements sales, remarque.

- J'veux vraiment pas que des gadjots du gouvernement s'intéressent à moi. Ça fait des années que j'me suis barré du labo, les mains c'est arrivé juste à cause des macchabées. J'm'y attendais pas. Ça vaut pas le coup de me tuer, franchement !

Si c'est le frère du putain de ministre de la justice, et qu'il est poursuivit par tout le monde et tout comme il semble le croire, il en a sans doute rien à foutre de tuer quelqu'un. Moi ça m'est jamais arrivé, j'espère continuer comme ça longtemps. Et je sais pas me battre. Si il a un flingue ou quoi il va m'exploser. Quand je me suis enfuie des labo j'avais une grosse plaie au ventre, mais je me souviens pas d'où elle vient. Il me manque des gros bouts des événements. Il y a juste le moment où les gardes me rattrapaient, mon réveil sous une bretelle d'autoroute... et entre les deux, rien. J'espère que je vais pas refaire de ces périodes d'amnésie. Genre surtout pas maintenant.

Hadès se calme, rapidement. Rien à voir avec le gouvernement ? Mais alors, il peut être tranquille, d'assurer que tout va bien aller et qu'il ne reverra plus les geôles du sous-sol du QG. Il soupire et a envie de le croire, sur le coup. Il ne veut pas ne pas le croire, car ce serait s'abandonner à la possibilité qu'il va bientôt mourir, ou du moins devenir un semi-shinigami, comme cet être. Hadès avait tout d'un coup décidé qu'il allait se comporter normalement envers ce type. Comme s'il était un allié...bon, il ne fallait pas trop pousser, déjà qu'il devait connaître son nom, il n'allait pas non plus lui dire exactement son rôle dans tout ce bordel là, ni le mener directement à son quartier général. Hadès était peut-être utopiste et avait besoin d'espérer, mais pas à ce point.

Ceci dit, maintenant qu'il y réfléchissait, cette personne venait de lui expliquer qu'il s'était évadé des laboratoires depuis un bail, et qu'il n'avait pas l'air de vouloir y retourner...logique, plutôt logique. Il aurait été étonné du contraire, même. Il n'était pas rare de voir des personnes qui allaient entrer dans ces endroits bizarres – lui-même avait essayé de sauver la vie d'un jeune garçon qui devait y subir un lavage de cerveau – un peu plus rare, voire carrément inédit de rencontrer un de leurs ressortissants, surtout que celui-ci ne paraissait pas franchement vouloir y retourner. Hadès, en signe de paix, se détendit, enleva sa main de la poignée de son sabre, montrant qu'il ne lui voulait rien de mal.

« Je ne vous tuerais pas. Je ne suis pas aussi violent que mon frère, et puis je ne fais que me défendre. »

Pour encore plus montrer qu'il n'avait aucune intention belliqueuse, il se posa par terre, s'asseyant. Les mains de Mordred lui faisaient toujours peur, et il se demandait si, sous l'effet de la terreur ou il ne savait quoi, le reste de son corps pouvait lui-aussi se transformer...à quel point ? Il avait entendu une rumeur à propos d'une créature qui se baladait dans les rues de Tokyô, mais il pensait que c'était plus une légende urbaine qu'autre chose. Peu importait : il savait que cet être, humain ou non, était plus fort que lui. La logique lui indiquait de se montrer calme, de ne pas l'affoler.

« Akira Darkwood, en vrai. Vous pouvez partir quand vous voudrez, mais sachez que je ne vous veux pas de mal. Je voulais récupérer les données d'un des serveurs, en bas, lorsque ce virus s'est déclenché. Je ne sais pas qui dirigeait cet endroit, mais il a eu une bonne idée, en bousillant les donnés... »

Akira Darkwood savait que ce n'était nécessairement les unités du Ministère de la justice qui avait commis ces meurtres, même si son cerveau le lui criait. Certains mouvements de la rébellion ne se gênaient pas pour commettre des meurtres immondes. Il soupçonnait particulièrement la mafia, ou même l'Ordre, qui avait des idées pas très propres, de s'être débarrassés de certains ressortissants qui ne leur plaisaient pas trop...le fait qu'il y ait exactement cinq personnes sur le sol venait corroborer cette thèse : cinq, cela paraissait peu, par rapport à un quelconque groupe de la résistance active.

« Posez-vous, soyez zen...je ne vais pas vous faire de mal. Je ne veux même pas vous poser de questions sur les laboratoires, si vous ne voulez pas. Quel est votre nom ? »

Il lui adressa un sourire, lui tendant la main pour la serrer. Comment avait-il survécu ? Il avait un métier ? Son nom ? Hadès était curieux, encore plus curieux de savoir s'il ne pouvait pas lui tirer des informations, le ramener dans son camp : c'était qu'un semi-shinigami, c'était une précieuse arme de guerre.

J'ai l'air d'avoir convaincu le gars, une fois assuré de ma non collaboration avec le gouvernement il me dit qu'il ne veut pas me tuer. C'est un très bon engagement, surtout qu'en tout il me l'assure trois fois. Après autant de panique, avoir l'assurance que je ne vais pas connaître un sort horrible dans la prochaine demi-heure est un grand soulagement. Je me sens beaucoup mieux. Il m'explique qu'il était venu récupérer des morceaux d'ordinateur mais que le mec qui vivait là a tout détruit, j'ai pas très bien compris. Du coup, si c'est le frère du ministre, il fait quoi dans la vie en fait ? Ça a forcément un rapport avec le ministre, vu qu'il y a des morts et tout. C'est forcément une affaire grave en rapport avec le gouvernement, la coïncidence est trop belle. Sinon ça fait trop de bordel pour une même fratrie.
Je dois toujours avoir l'air un peu inquiet, parce qu'Akira m'assure une nouvelle fois que je peux me détendre, qu'il ne va pas me tuer maintenant qu'il sait que je lui veux rien. J'imagine même pas qu'il puisse me percevoir comme une menace, en fait. J'ai jamais utilisé mon ADN bizarre pour me battre, me voir me transformer me fait plus peur qu'autre chose. Je pourrais agiter mes mains devant moi au hasard, au pire, les griffes ont l'air bien coupantes, avec de la chance j'amocherai quelque chose. Je pourrais me balader avec un couteau, mais j'ai jamais appris à m'en servir, et y a rien de plus dangereux dans une baston qu'une arme dont on sait pas se servir. J'ai jamais eu vraiment de problème depuis que je suis au cirque de toute façon, mis à part une fois avec un tigre.
Le frère du ministre me tend la main. Pour serrer la mienne sans doute. C'est embêtant, j'en ai plus. Je montre la manche de mon pull gonflé par la difformité au bout de mon bras droit et hausse les épaules en signe d'excuse.

- Je vais avoir du mal à m'en servir dans cet état là. Ça partira tout seul au bout d'un moment. C'était qui les mecs morts ? C'est quoi le rapport avec le ministre alors ?

Il m'a dit que j'étais pas obligé de baver à propos du laboratoire, mais pas que je pouvais pas poser de question. J'ai rien dans l'absolu contre le fait de parler de mes expériences personnelles... mais il a l'air déjà pas mal informé sur le sujet. Il a as hurlé de terreur pendant dix minutes en me demandant des trucs sur mes mains, si c'est du maquillage ou quoi, il a pas eu l'air surpris par mon explication bredouillante.

- Vous savez des trucs sur les labo ?

Parce que l'occasion s'était jamais présenté jusque là, mais j'ai rien contre en savoir plus sur le truc qui a changé toute ma vie. Finalement on m'en a pas dit beaucoup quand j'étais là dedans. Je crois qu'il y avait d'autres cobayes humains, ou qu'ils prévoyaient en avoir, mais j'étais tellement défoncé... tout m'apparaît si flou maintenant, peut être que je l'ai imaginé.

Ha. Il connaissait son frère. Rien que le fait de connaître ce détail faisait frissonner Akira Darkwood. Dans ses pensées, Arashi était devenu un vilain croquemitaine, un monstre de foire. Il n'aurait voulu le croiser par hasard pour rien au monde, parce que tout le monde sait que le hasard fait toujours mal les choses. Comment expliquer à cette chose qu'il venait de rencontrer que Arashi était certes son frère, mais qu'il devait être l'être humain qu'il voulait moins croiser actuellement ? Leurs relations étaient très complexes, et la dernière fois, cela s'était conclu avec un coup de pied dans le sternum. Il avait eu du mal à respirer pendant quelques minutes, avait eu vraiment mal pendant des heures mais voilà...dans le charmant petit monde de bisounours d'Arashi, tout était relations de domination. Il avait perdu et avait refusé de coopérer, alors il avait été traîné au Premier ministre. Lequel s'était fait une joie de lui servir un échantillon de sa folie.

Il ne savait pas pourquoi il faisait confiance à cet homme...peut-être qu'il y avait, au fond de lui, le désir de le manipuler, quelque part. Il n'était pourtant pas comme ça, Hadès. C'était quelqu'un d'honnête et droit. Lorsqu'il parlait, c'était son cœur qui parlait, et il aimait exprimer son désir de liberté au travers de mots. Mais voilà...voilà, il avait vu des choses horribles, il avait été torturé, et il avait changé. Akira Darkwood n'était plus le Hadès qu'il était, même s'il se targuait de l'être. Il avait même hésité à changer de camp pour ne plus souffrir, mais s'y était abstenu en voyant que ses ennemis en seraient trop contents. Prouvant une nouvelle fois qu'il n'était pas là pour se battre, il enleva le katana de son étui en tissus, et le posa doucement à deux mètres de lui ; le jour où il retrouverait enfin le sien, il se sentirait en sécurité.

« Mon frère...est quelqu'un de pas très fréquentable. Je ne souhaite pas particulièrement le croiser, pour les mêmes raisons que vous, je pense. Il sait des choses à mon sujet qui ne feraient que m'emmener en laboratoire. Arashi est quelqu'un de très...fidèle à Kira, malheureusement. »

Les cartes étaient posées, cette fois-ci. Il lança un regard droit et honnête à Mordred, lui faisant signe de la tête de s'asseoir, lui-aussi. Pour les hommes, il ne savait pas ce qu'il s'était passé. Il aurait peut-être pu avoir des informations, mais...attendez...il avait son portable, non ? Pourquoi n'appelait-il pas Zen, son bras droit ? Cette dernière avait toujours un ou deux compères fouines qui se baladaient un peu partout, certains connaissaient même ce coin comme leurs poches. Il y avait fort à espérer, non qu'ils sachent qui les avaient tués, mais quelles personnes cette cache abritait. Zen pourrait également faire appel au forum des hackers – son compte à lui avait été supprimé par pure sécurité lorsqu'il avait été capturé par les pro-Kira – et leur demander de faire quelque chose sur ces ordinateurs, une fois qu'il en aurait récupéré la localisation.

« Attendez, je passe un coup de fil à une amie. Elle a pas mal de contacts, elle pourrait nous aider... »

Sur ce, il sortit son téléphone portable et passa un coup de fil. Il eut directement Zen, entama avec elle une discussion, mi-dragueur, mi-courtois. Finalement, il en sortit qu'elle contacterait ses informateurs pour avoir un peu plus de détails sur cette affaire. Il était rare, en effet, qu'on trouve des cadavres accumulés comme ça dans une telle zone, et lorsque les pro-Kiras allaient faire une rafle, malheureusement, ça avait tendance à être plus désordonné et il y avait souvent plus de victimes. Elle lui demanda s'il était possible d'y retourner, pour voir s'ils n'avaient pas des papiers sur eux ou quelque chose comme ça et Hadès grimaça. Après cela, il referma le coup de téléphone, s'adressant de nouveau à Mordred.

« C'est bon, mon associée va demander à des amis à elle qui étaient ces gens. Mais elle dit que nous devrions retourner en bas pour voir s'ils n'avaient pas des...papiers avec eux...vous êtes d'accord ? »

Il souffla, se rappelant que bon gré, mal gré, il allait devoir y retourner. Un bon mouchoir serait nécessaire, éviter de respirer aussi, éventuellement...

« Ha, pour les laboratoires...ben...j'ai rencontré une de ces créatures, un jour, lors d'une attaque. Elle défendait le premier ministre, et elle, elle manipulait les ombres. C'est tout ce que je sais, et puis elle pouvait lire mon nom sans problème, mais je ne suis pas arrivé à trouver quelque chose à ce sujet, c'est classé secret défense, au gouvernement... »

J'écoute Darkwood avec grande attention. Il a posé un sabre à coté de lui, son arme je suppose. Apparemment, le ministre de la justice veut se débarrasser de son frère en l'envoyant dans un des laboratoires. Pour ce que je sais des hommes politiques, ça me semble cohérent. Et c'est la première fois qu'on me parle de ces sujets là depuis que je me suis enfui, la curiosité me brûle la tête. Mon passé, les demi-shinigamis, le gouvernement... La contrepartie de m'éloigner de tout ça, c'est que je ne puisse jamais me venger ni connaître mon vrai nom. J'aimerais bien le savoir. J'essaye parfois de me souvenir de ce qu'il y avait avant, mais ça me donne juste mal à la tête. Je me rappelle vraiment de rien.
Le frère du ministre passe un coup de fil à je sais pas qui, une femme en tout cas – le ton y perd parfois niveau professionnalisme. J'écoute pas trop, ça m'intéresse beaucoup moins que ce qu'il explique ensuite. Il me parle d'une autre comme moi. Ça m'inquiète un peu, il dit qu'elle manipulait les ombres pour protéger le premier ministre. J'ai rien envie de faire de ce genre, mais j'ai peur de situations où on ne me demanderait pas mon avis. Enfin si on avait pu me rattraper, ça aurait été fait depuis longtemps. Peut être qu'ils croient que je suis mort.

- Je peux voir les noms mais manipuler les ombres... je crois pas pouvoir faire ça. J'espère. J'aime pas quand ces trucs là arrivent. Mon regard part un instant dans le vague pendant que je me remémore quelques épisodes désagréables de ma biographie personnelle, en commençant par la fois où mes mains se sont transformées toutes seules. Je savais pas qu'il y avait eu d'autres cobayes, enfin j'en étais pas sûr. C'était prévisible d'un autre coté. Mais les toubibs m'expliquaient pas grand chose. Ils m'ont dit que j'étais le premier à avoir ça, et ils avaient pas trop l'air de savoir ce que ça faisait non plus. Ils mesuraient tout le temps des choses, avec plein de machines. Des radios, des IRM, des trucs comme ça. Mais je sais pas comment je me suis retrouvé là dedans, je me souviens de rien avant ça. Rien du tout, même pas mon nom. Je sais pas ce qui s'est passé.

Le fait d'en apprendre d'avantage me rend étrangement bavard, toute prudence oubliée. Je suis pas loin de lui avouer que je sais pas spécialement me battre, et que, au fait, si je disparais personne n'aura les moyens de me retrouver vu que j'ai aucune espèce d'existence légale. Enfin j'aurais peut être fait plus attention si j'avais su que c'était un chef terroriste.

Je le suis en bas sans trop réfléchir. L'enthousiasme du moment, et après autant d'émotions je me sens plus capable de réfléchir et qu'on me dise ce que je dois faire m'arrange un peu. Les cadavres sont toujours là, ils sentent toujours pareils, et ça me fait le même choc au cœur de les voir. Et devoir les fouiller en plus ? Mon estomac se crispe à cette idée. Je regarde en l'air, si jamais une excellente excuse pour m'enfuir apparaissait au plafond. Et là je me rappelle que j'ai pas de mains. J'en pleurerai presque de soulagement.

- Je peux pas vous aider, à cause de ça...

Je lui montre mes manches pleines de monstruosités. Et puis c'est ses macchabées non ?

Finalement, alors même que Hadès ne le lui avait demandé, Mordred avait parlé, lui fournissant de précieux renseignements sur ce qu'il avait vécu, pourquoi il était ici avec ses mains étranges. Le chef de la rébellion l'écouta sans mot dire, immobile. Il aurait bien eu envie de lui poser mille et une questions après qu'il eut fermé sa bouche ; lui demander pourquoi cette transformation en particulier, à quoi ressemblaient les médecins, s'il n'avait pas une étiquette, lors de son évasion mais...il se tut. Mordred disait lui-même qu'il ne savait pas ce qu'il s'était passé, et il était le mieux placé pour savoir que, parfois, au sortir des sous-sols des bâtiments de là-bas, la mémoire ne revient pas en une fois. Il lui manquait certains pans de souvenirs qui, décidément, ne voulaient pas revenir, et il n'en était pas malheureux.

Hochant la tête, il lui fit signe de le suivre de nouveau dans le sous-sol. Cette fois-ci, ça allait sûrement mieux se passer. Ils étaient préparés à ce qu'ils allaient voir : c'est-à-dire des cadavres, dégueulasses, immondes, les vers et tout ce qui en sortait. Si Hadès n'en était pas à son premier mort, il n'avait l'habitude d'en côtoyer d'aussi mal conservé. Patient, l'homme roux rabattit un foulard sur sa bouche et son nez, afin d'en éloigner le plus souvent possible les odeurs relatives à cette décomposition. Ils contournent les poubelles bloquant l'accès et, à nouveau, une par une, ils descendent les marches, Mordred suivant Hadès pendant cette descente aux Enfers. Dieu de la Mort...Ne pouvait-il aussi bien se nommer ?

« Pas grave pour vos mains. C'est mon boulot, je m'en chargerai. Si vous ne vous sentez pas bien, remontez. Je dois prendre aussi des photographies. »

Le moindre mouvement de la bouche faisant bouger son foulard, faisant ainsi rentrer l'odeur immonde près de ces narines. Il s'en trouva déconcentré.

« Parlez...le moins possible. C'est immonde. »

Courageusement, il resserra le bandeau si près de son visage qu'il était tout juste capable de respirer. L'ustensile idéal dont il aurait eu besoin dans cette situation aurait sans doute était un masque, mais il n'en avait pas dans ses affaires. Il s'agenouilla près du premier mort, entreprit de lui faire les poches et trouva un paquet de chewing-gums. Maigre pioche. Le deuxième fut un peu plus concluant, puisqu'il trouva dix Kilars, le troisième avait un badge appartement aux pro-Kiras sans pour autant que son nom soit dit dans sa poche intérieur, le quatrième ne possédait rien, à part une chemise rapiécée, et le cinquième...une lettre d'amour. Il la prit, comme le reste, se disant qu'il la lirait une fois remonté à la surface.

Soufflant comme s'il venait de courir un marathon, il se leva ensuite, sortit son portable et prit une photos des hommes à terre. La luminosité était bonne, son interlocutrice pourrait deviner qu'il se trouvait dans une cave, mais sans doute pas où. Il mitrailla ensuite le corps de chacun des hommes – hommes ? Le quatrième lui semblait être une femme – fouilla encore un peu l'endroit, mais ne trouvant rien, se retourna vers Mordred.

« Deux ou trois indices, je pense, mais ça ne veut rien dire du tout. Remontons à la surface. »

Il s'empressa de remonter les escaliers et, une fois en haut, enleva le foulard avec précipitation.

« Haaa, bon sang !!! ça fait du bien ! Bref ! Une lettre d'amour, un badge appartement à un lieutenant pro-Kira, mais rien qui ne signifie qu'il s'agit de toute une patrouille de ces gens. Cet homme pourrait aussi bien avoir été une taupe, et les pro-Kiras n'ont que peu d'intérêt à abattre leurs semblables ! »

Il trifouilla ensuite son téléphone, envoya un texto à sa blonde préférée enfin de voir si elle n'avait pas un ou deux indice à lui donner, montrant les photos qu'il avait prises à Mordred.

Puisque ce que fait Hadès est dégueulasse, je regarde ailleurs – dommage je ne peux pas faire pareil avec mon nez. Y a pas grand chose à contempler. L'humidité du lieu avait fait pourrir les documents papier depuis un bail, et les ordinateurs n'avait pas l'air trop frais non plus. La peinture blanche a tourné dans des teintes un peu bizarre par endroit, à cause du moisi qui a poussé dessus. Une cafetière dans un coin, à coté d'un lavabo qui ressemble à un apocalypse sanitaire. Sinon cette pièce a l'air très... administrative ? Je ne sais pas, c'est l'effet que ça fait. Il y a l'air de n'avoir aucun objet « personnel ». Personne n'a l'air non plus de vivre là dedans. Et puisque j'ai vraiment que ça à foutre - faut pas que je regarde à gauche, n'y que j'y pense – je me demande ce que c'est cet endroit, en fait. Y a rien qui me permet de le deviner sous mes yeux, alors je me pose une autre question. Pourquoi Hadès fouille ces putain de cadavres ? Comme si c'était normal. Qu'il veuille récupérer des trucs sur un ordinateur dans un bâtiment abandonné, ça je peux concevoir qu'il y ait une bonne raison de le faire. On peut trouver un tas d'explication sur un truc comme ça. Que c'est une entreprise qui a fait faillite, n'importe quoi. Le rapport entre un homme et des cadavres s'établit moins correctement dans la tête. J'veux dire... tu tombes sur des cadavres, comme ça, tu te mets pas à les fouiller. Vu ce que je vois au cirque, j'en conclu que Akira est un genre de gangster. Un gangster bizarre, vu que les ordi l'intéresse. P'tète un hacker de numéro de carte bleu ? J'arrive pas à imaginer, je fréquente pas assez de fouilleurs de cadavre pour ça.
Je sais pas ce qu'il fait et je lui ait raconté ma vie comme un abruti, tout foufou parce qu'il a vu un autre demi-shinigami. Il a dit par trois fois qu'il ne me veut pas de mal, et il avait l'air sincère, pas agressif, mais un mec qui fréquente des cadavres dans son quotidien se doit de savoir bien mentir. Mentir au point de vomir pour simuler le choc de voir des macchabées ? … ouais bon. J'en ai aucune idée en fait, du pourquoi du comment.

On ressort de la cave, à mon grand soulagement. Akira finit de bidouiller son portable, puis m'explique le résultat de ses fouilles. Il parle de pro-Kira, mais ça fait pas tilt dans ma tête. Et il me montre les photos aussi, que je regarde comme un abruti alors que j'ai eu la version HD dix secondes plus tôt.

- Mais... c'était quoi cet endroit en fait ? Et pourquoi ils vous intéresse ces cadavres ?

Je le regarde d'un air un peu méfiant, parce que je doute que la réponse me rassure beaucoup. Quoique dans le fond j'ai rien contre les terroristes, c'est contre les agents du gouvernement que j'en ai, et les cadavres ont un fort pouvoir d'attraction sur ces gens là. C'est pour ça qu'il faut mieux les éviter quand on veut vivre sa vie tranquille. Le problème, c'est que j'ai déjà trop le bras dedans – hin hin – pour espérer une vraie tranquillité. J'veux dire, on peut pas vivre sainement en se transformant à tout bout de champ et en connaissant même pas son prénom.

Hadès était plutôt satisfait, après avoir envoyé le message à Fate. Après tout, il trouvait ses tournures de phrases bien trouvées, lui parlait bien et surtout la respectait. Pas une seule fois, il n'avait été odieux...franchement, Hadès se surpassait.

« Je ne sais pas vraiment, en fait...je ne sais pas, j'attends la réponse, et je ne sais même pas si elle, elle le saura. »

Hadès secouait la tête, la mine pas vraiment sûr qu'ils allaient trouver quelque chose : et pourtant, il espérait, hein ! Il voulait vraiment résoudre ce mystère et permettre à ces morts de reposer en paix. La réponse de Fate, quelques instants plus tard, le conforta dans l'idée que l'homme au badge était bien une taupe et qu'il ne s'agissait pas d'une exécution de masse. Par contre, alors qu'il lisait le mail de sa blonde « bien-aimée » jusqu'à la fin, il crissa des dents, se rendant enfin compte d'un petit quelque chose qui avait son importance...la ligne qu'il avait utilisée pour lui envoyer un texto n'était pas sécurisée. Cela voulait dire qu'elle l'avait probablement déjà repéré et que des voitures devaient être lancée à toute berzingue sur eux. Et lui qui était...certes déguisé, mais en compagnie d'un semi-shinigami évadé.

L'affolement fut la première chose qu'il ressentie. Il faillit lâcher le portable, regardant un peu partout dans la rue où ils étaient, essayant de monter un plan d'urgence dans sa tête. Il pensait à Arashi, à Fate, à tout ce qu'il avait pu lui dire, à tout ce qu'elle lui dirait une fois qu'il serait entre leurs mains. Elle prendrait du plaisir à le torturer, il en était sûr et lui craquerait sûrement, au bout d'un moment, car il se faisait vieux et n'avait plus la résistance de ses jeunes années. L'autre problème, c'était qu'il se trouvait en compagnie de Mordred. Si jamais un pro-Kira venait le choper avec cet être qui avait des mains difformes, il verrait immédiatement qu'il y avait une couille dans le potage et Mordred serait sûrement capturé, emmené de force aux laboratoires...et lui tué pour l'occasion, parce qu'il en avait trop vu.

« Oui...oui, vite...Va falloir aller à la voiture...elle est à deux rues de là, j'envoie un SMS et on trace, OK ? »

Il renvoya rapidement un sms à Fate, court et succinct avant d'ouvrir le portable, prendre la carte SIM et l'écraser avec son pied. Il mit ensuite les morceaux dans différentes poubelles. Les données sur les différents numéros de téléphones des membres de la résistance étaient donc perdues. Il sortit ensuite son sabre de son fourreau et mit un coup dans le téléphone, le fendant en deux. Adressant ensuite un signe à Mordred, il commença à courir, prenant les petites ruelles dans lesquelles il était passé pour venir jusqu'ici. La cache n'avait pas été recouverte, il s'en foutait, au moins, les flics et Harlaown pourraient faire leur boulot...hahaa, quelque part, n'était-il pas une taupe en leur envoyant des messages comme celui-ci ? Hadès n'avait pas de mal à courir. C'était quelqu'un de sportif, d'entraîné. En revanche, il jetait régulièrement des coups d'oeil en arrière pour voir si Mordred le suivait.

La voiture, la voiture ! C'était bon, il la voyait. Hadès l'ouvrit rapidement, se mit dedans et fit signe à Mordred de rentrer. Très bien...une fois que ce fut fait, il se dépêcha de démarrer et regagna l'axe principal, croisant les flics qui roulaient à toute berzingue, les sirènes allumées.

« J'pense pas qu'ils nous poursuivent ! Mon informatrice est très utile...le problème, c'est...que c'est légèrement un capitaine de l'armée...Par contre, maintenant, je sais que ce n'est pas une exécution des pro-Kiras, et que l'un de ces hommes étaient une taupes. »

Il prit un visage un peu brusque, roulant vers la campagne japonaise.

Akira élude mes questions par des « je ne sais pas ». Il sait pas non plus pourquoi il a fouillé les cadavres ? Ça m'étonnerait. Je fronce les sourcils. J'arrive pas à trouver d'hypothèses expliquant tout ce merdier. Mais j'ai pas le temps d'insister, ou même de réfléchir. Le frère du ministre prend un air paniqué, ce qui m'inquiète, puis il me dit qu'il faut foncer à sa voiture. Si j'ai bien appris un truc au cirque, c'est que quand tu fais un truc illégal et que quelqu'un de mieux informé que toi te dit de faire quelque chose, tu le fais sans réfléchir. Je regarde donc Akira détruire méthodiquement son portable et je me mets à courir derrière lui. Malgré mon allure de crève la dalle, j'ai une bonne foulée, mais mes bras génétiquement modifiés me ralentissent un peu et j'ai du mal à rester à sa hauteur. Rapport à la répartition de mon poids qui a brutalement changé et le fait que j'puisse pas bouger les bras comme je veux. Je les ai du coup replié contre ma poitrine, mais ça gêne pour courir. De sorte que quand on arrive à la voiture, je suis complètement essoufflé et j'ai mal au dos. Je bondis malgré tout sur la banquette arrière de la voiture, et je m'y vautre. Elle est propre, elle sent le neuf, ça fait bizarre. Ma caravane, y a rien à faire, j'ai beau ouvrir la porte et les petites fenêtre dès que je peux, ça sent la bouffe restée trop longtemps dehors et le dessous de couille mariné. Et globalement, tout le cirque sent le dromadaire. C'est fout comme ça pue ces bêtes là, suffit que t'en montes un et t'as plus qu'à balancer toute ta sape au feu. Heureusement que le public nous voit de loin, sinon ils partiraient au bout de dix minutes d'odeurs de sueur, de fringues mal lavée – c'est compliqué à nettoyer des costumes de scène, alors on le fait pas trop – et de merde de tigre. Je m'allonge donc sur la banquette pour profiter de cette douce odeur de tissu synthétique neuf.

On croise des keufs, toute sirène dehors, et sous le choc mon cœur fait un manquer. Mais Akira continue de conduire normalement et ne semble pas spécialement remué par ce bruit là. Moi oui, surtout quand il ajoute que son informatrice est une meuf de l'armée. Ceci explique cela – la destruction du portable au sabre par exemple. Je ne me retiens plus :

- QUOI ? Mais c'est...

J'ai pas le temps de finir mes récriminations parce que la voiture tourne brutalement, que je ne m'y attendais pas, que je ne peux pas me tenir avec les bras et que donc je m'écrase là où l'énergie cinétique veut bien m'emporter, c'est à dire la portière opposée. Je me sers accidentellement de ma main pour me rattraper au siège passager avant, par réflexe, et je déchire légèrement le revêtement avec mes griffes.
Je sais que le contexte est idéal pour que je perde connaissance et que je me mette à faire... des trucs bizarres. Et ça me stresse d'autant plus. Et ça me stresse tellement que je mets du temps à m'apercevoir que j'ai plus aucun point de contact physique avec la banquette, ou le sol en général. Aucun.

- Je... ! PUTAIN ! PUTAIIIIIN !

La gravité est devenue complètement optionnelle. Je... flotte dans la voiture. Je finis même collé dos au toit. En désespoir de cause, par pur réflexe, je fais des moulinets avec mes bras pour « nager » vers le sol. Mais ça sert à rien. J'arrive juste à déchirer un peu le tissu du bout des griffes. Je me tortille, mais c'est pas ça qui me donne un poids. J'arrive juste à finir le cul en l'air et à me cogner violemment la tête dans un virage contre un appuie tête. Parce que les virages, eux, me font bouger ! Moi j'arrive absolument pas à contrôler ma trajectoire. Je peux contrôler les bras, les jambes, le reste, pas de problème, mais pour me déplacer dans l'espace j'ai aucune idée de la marche à suivre. Et évidemment, quand Akira freine brutalement pour je ne sais quelle raison, je finis à l'avant – en oubliant pas de me manger le siège passager dans l'épaule gauche, évidemment. J'espère qu'avoir un demi-shinigami sur son levier de vitesse va pas perturber sa conduite.

...Mais il se passait quoi, là ? On était dans Harry Potter, ou quoi ? Genre Hadès, il avait pas pu prendre le Poudlard Express et tout d'un coup, s'était retrouvé dans une voiture volante...volante, comment ça ? Le temps de réaliser en regardant dans le rétroviseur avant que Mordred n'était pas assis tranquillement sur la banquette, non, mais qu'il...qu'il était en lévitation, la voiture commençait déjà à décoller. Il tentait vainement d'appuyer sur la pédale de frein, diminuer leur vitesse, ne pas s'écraser bêtement et alerter les forces de police, mais...merde merde merde ! Ils ne sont plus sur la route, là ! Il voit la terre devant lui, il y a un champ où il ne sait quoi encore. C'est Tokyô, la ville par là, mais comme ils roulaient dans le sens inverse, ils ont suffisamment de chance et sont tombés sur un champ. Coup de pot, ça aurait pu être une usine de déchets chimiques ou un aéroport. Bref. Hadès voit un mur droit devant, pendant que la voiture cavale à toute berzingue et qu'il tente de l'arrêter. Mordred a décidé, en plus, de se foutre pile sur le levier de vitesse, ce qui fait que, lui ayant opté pour changer de vitesse sur la pédale concernée, elle passe soudainement en cinquième, et le mur en face d'eux se rapproche un peu trop rapidement. Cette fois-ci, il opta pour le freinage d'urgence : un grand coup de frein à main et tout ce qui n'était pas attaché par la ceinture se vit partir en avant. La voiture pila d'un coup sec, il se prit Mordred sur l'épaule, content de s'être attaché, cette fois-ci, ou le pare-brise aurait été troué.

« Merdeee ! »

Par réflexe, il ouvrit la portière de son côté, histoire de pouvoir sortir de là. Il fallait dire que si Mordred déclenchait l'airbag par réflexe, tous deux seraient dans une sacré merde, étouffé et pas vraiment en état de s'enfuir. La priorité était de ne pas se faire repéré par les agents de Kira, et pour l'instant, cela paraissait particulièrement mal parti. Les pneus de la voiture avaient sûrement fait des marques sur la route, il avait fracassé une barrière lorsqu'il était entré de force dans ce foutu champ, alors tout était une question de temps, avant que ces têtes d'œufs n'interviennent par ici. L'énigme du meurtre qu'il avait découvert les retiendrait sans doute pas mal de temps là-bas, mais il ne doutait point du fait que les policiers étaient assez intelligents pour partir à sa recherche. Il était un gros poisson.

« Putain, t'envole pas, mec ! »

Mordred flottant toujours dans les airs, malgré le fait que la voiture soit totalement arrêtée. Il réussit tout de même à en descendre, et baisser le siège conducteur pour faire passer Mordred par la sortie, mais le semi-shinigami flottait toujours dans l'air...d'ailleurs, flotter était un mot bien trop gentil, pour l'action qu'il entreprenait. Léviter, voler. Alors qu'il commençait à prendre un peu trop de hauteur, Hadès s'accrocha à son pied, histoire de lui mettre un poids qui le retiendrait au sol, mais déjà, tout leur petit manège avait l'air d'avoir été repéré par une brigade en circulation. Il entendit une, ou deux, ou plusieurs alarmes de police qui allaient dans leur direction, commencèrent à entrer dans le champ et...Panique. Le cœur d'Hadès s'accéléra, demander une information à Fate était vraiment trop dangereux en fait, et ils étaient à deux doigts de se faire avoir comme des bleus.

« PUTAIN ! Envole-toi finalement ! Ils vont nous choper ! Vole, faut se tirer de là ! Vite ! »

Que ses pieds ne touchent plus le sol, que n'importe quoi mais qu'ils s'envolent ! Il se foutait même que les forces armées de Kira le voie en train de léviter, il voulait juste s'enfuir !

La voiture s'arrête brutalement. Je ne suis pas devenu une jolie tâche de gras sur le sol vingt mètres plus loin, j'ai seulement rebondi contre le pare-brise, suffisamment fort pour le fêler dans tous les sens. Tiens le toi pour dit, ici on emmerde les lois de la physique. Bref. Je reste quelques secondes à voir tout flou, avec un drôle de sifflement dans l'oreille, jusqu'à ce que Akira Darkwood me sorte de la voiture en me tirant par le pied. J'ai l'air complètement assommé, à essayer de remettre mon cerveau en phase avec la réalité actuelle. Des gens du gouvernement nous poursuivent, on entend déjà les sirènes, il faut fuir, et ce même si mes pieds ne touchent plus le sol et que du sang est en train de me couler sur le front. Mon compagnon dit qu'il faut que je vole. J'ai aucune idée de comment bouger en trois dimension, je crois pas avoir les organes pour à la base. J'ai tout l'équipement pour marcher sur le sol, mais mon corps persiste à flotter à un mètre cinquante au dessus. Mais j'ai aucun contrôle là dessus.

- Je sais pas comment on fait ! Je dirige que dalle ! JE SAIS PAS !

Mais pourtant, il faut que je trouve parce qu'on entend de plus en plus fort les sirènes des agents de Kira. Si ils ne nous tuent pas, je serais probablement renvoyé dans un labo ou un autre. Je sens déjà le goût des médicaments dans ma bouche, et toutes ces... expériences.... je... c'est de la terreur liquide que je sens couler dans mes veines. Dans ma tête je suis déjà ailleurs, et c'est très désagréable. J'aimerais reprendre ma raison en main, mais je suis en train de péter un câble, en fait. De devenir fou. D'un autre coté, on le serait à moins. Il y a toutes ces choses dans mon corps qui n'en font qu'à leur tête, il y a mes souvenirs flous du labo et de ce qu'on m'y faisait, et les keufs derrière nous qui sont tellement près que je commence à distinguer leurs noms et leurs dates écrits en tout petit – encore trop loin pour que je puisse les lire. Je ferais n'importe quoi pour éviter les douleurs dont j'ai le souvenir, absolument n'importe quoi.
Il y a quelque chose dans mon cerveau qui fait « crac », un barrage qui pète, quelque part, je sais pas ce que c'est.

Je me mets à hurler de douleur parce que mes organes sont en train de se réaménager à toute vitesse. Quelque chose dans mon dos se déploie et cache le soleil. Instinctivement, dans le brouillard, j'attrape Akira avec mes pattes, parce que la dernière chose dont j'ai envie, à cet instant, c'est d'être tout seul. Je le porte dans mes bras sans difficulté alors qu'il est plus lourd que moi, et je bats des ailes. Et on monte. Comme je suis dans un état de panique absolu et que c'est mon premier vol, on dirait de loin que je suis un espèce d'énorme pigeon bourré. Quelque fois on chute de deux mètres pour des raisons qui me sont inconnues – les courants d'air chaud, une baisse de magie, qu'est ce que j'en sais – et à chaque fois j'ai l'impression que mes organes vitaux vont me sortir par la bouche. Je regarde pas en bas, et même si ma trajectoire est à l'avenant, on va très vite et très haut. Je m'éloigne de Tokyo et je file droit vers les montagnes, le plus loin possible de la civilisation. Je vole très longtemps, dans un état second, sans me préoccuper de la destination ou de ma fatigue. Aucun endroit ne sera loin de moi même, ne me rendra humain.

Je finis par me pose/m'écraser dans les arbres. Mais vraiment. Dans les arbres. Des pins. Je suis fatigué, je crois. Je lâche Akira sans même m'en rendre compte, j'en ai plus rien à foutre de rien tellement battre des ailes frénétiquement m'a épuisé. On se rend pas compte, comme ça, mais bats des bras une heure ou deux, tu verras ce que ça fait. Je dégringole dans des branches de sapins, ce qui ralentie ma chute, et je m'écrase dans l'humus accompagné d'aiguilles de pins, voire même d'une branche ou deux. Je suis nu – mes fringues n'ont pas survécu à un bordel corporel pareil – mais la pudeur est préservée parce que j'ai de la fourrure ou des plumes sur presque tout le corps. Je cherche Akira de mes grands yeux jaunes, mais mon regard se pose sur un vieux portique de prière à à peine vingt mètres de l'endroit où je suis vautré. La peinture rouge est écaillée par endroit. Il y a des statuettes de démons aux alentours et des marches derrières, qui conduisent sans doute à un vieux temple. L'endroit a pas l'air très fréquenté, ce qui est pas étonnant vu que c'est au milieu des bois, dans la montagne. Puis c'est un petit portique, les statues ne sont pas spécialement majestueuses, l'endroit n'a qu'un intérêt limité pour les touristes. Pourtant je le trouve très apaisant. C'est peut être la fatigue, mais je me sens complètement mou, d'un coup, vidé de mes émotions.

- Akira ?

Ma voix est bizarre, un peu aiguë, très inhumaine, mais ça n'a rien d'étonnant. Je suis trop fatigué pour m'en affoler, et de toute façon ce n'est pas douloureux. C'est la première fois que je suis conscient en étant autant transformé. Allongé sur le ventre, les membres en désordre, je préfère pas faire l'inventaire de mon apparence physique pour l'instant, mais je crois que j'ai une queue. Derrière. Une belle queue touffue comme celle d'un renard, sauf qu'elle est dans des nuances de gris et de noir. Et j'ai toujours des ailes dans le dos. Et mes bras – qui sont dans mon champ de vision – son entièrement couverts de poils dans les mêmes nuances de couleur avec toujours des griffes au bout. Ça ressemble plus du tout à des mains, plutôt à des grosses pattes de chien particulièrement griffues. Je préfère pas bouger et rester sur le ventre, je sais même pas à quoi ressemble mes jambes. Et j'ai toujours des ailes, que je suis incapable de bouger pour l'instant et qui restent déployées dans mon dos. Je ne lévite plus.

- Akira Darkwood ?

Et puis d'un seul coup, je reprends forme humaine. En quelques secondes c'est fait, et je suis de nouveau un mec à poil grelottant par terre. Mais bizarrement je me sens très calme, même si j'ai froid. On a échappé aux keufs grâce à mon ADN tout bizarre, ça me fait éprouver un curieux sentiment d'apaisement. Ces choses bizarres en moi ne me veulent pas de mal, elles viennent juste de très, très, très loin et intéressent des gens nuisibles, mais en soi ça fait pas mal. Je roule sur le coté et remonte mes genoux contre ma poitrine pour cacher ce qui peut l'être. J'ai froid. D'ici quelques minutes je serais sans doute capable de me lever – je ne suis pas blessé, juste des trucs superficiels et une grande fatigue – mais pour l'instant je guette un signe de mon compagnon d'infortune. J'espère qu'il lui est rien arrivé de grave pendant la traversée.

Il volait, il volait. Le bolide avait eu un peu de mal à démarrer, il pensait que les gens, là-bas, allaient tirer, mais ils paraissaient être trop impressionnés par le semi-shinigami, finalement. De loin, il parvenait à en distinguer certains qui prenaient leur téléphone pour contacter d'autres personnes. Pourvu qu'ils ne rameutent pas d'hélicoptères avant qu'ils se soient barrés ou ils seraient dans la merde. À ce moment précis, Akira Darkwood avait peur. De quoi ? D'être pris, ou plutôt repris. D'avoir à subir des tortures inqualifiables, passer des mois au fond d'un cachot, seul avec lui-même. Il avait failli devenir fou la dernière fois, et sa personnalité s'en voyait radicalement changée. Aussi, Akira ne fut jamais autant soulagé que lorsqu'il vit que Mordred commençait à y arriver. Il leva la tête et ce qu'il vit lui fit manquer un battement de cœur... Il se transformait ? Mais enfin, oui, Hadès, c'était évident. Pourquoi sa transformation ne se limiterait qu'aux mains ?

Toujours est-il qu'il s'empara de lui sans difficulté aucun et s'envola haut dans le ciel, le portant comme s'il était un enfant de huit ans. Voler, ou plutôt être porté par quelqu'un qui volait était une expérience inédite pour le chef de la rébellion pacifique. Il avait déjà fait du parachute, lors de l'attaque du quartier général, mais voler alors que le transport était pas vraiment...contrôlable, jamais fait. Recevoir le vent dans la tronche, les pieds sans rien dessous, juste ces bras de monstres qui le retenaient, c'était assez grisant. Il n'était heureusement pas sujet au vertige, et observait plutôt ce qu'il pouvait y avoir d'eux : Hadès ne voyait pas d'hélicoptères les suivant, et c'était plutôt bon signe. Il ne voulait pas, ne pouvait pas imaginer une fuite dans les montagnes, à dos...à dos ? De pigeon ailé bourré. La façon qu'avait Mordred de voler était bien trop bizarre pour qu'ils tiennent longtemps.

Ils arrivent à un endroit où il y a des pins et Hadès sent que Mordred est fatigué. D'ailleurs, il ne sent plus les serres de la créature serrer sa poitrine...Hein ? Hein ? Il resta deux secondes un peu hébété pour mieux se rendre compte que non, plus rien ne le tenait. Il était...en chute libre en fait...Par chance, l'endroit était fortement boisé, et son poids fut un peu retenu par le pin sur lequel il tomba, lui permettant de ne pas finir comme une pomme écrasée sur le sol. Newton aurait dû tenter de se suicider, il aurait vite compris...Bref, il tombait, relativement de branches en branches, le visage cinglé par les arbres. Il finit par atteindre le sol en relativement bon état, mais ressenti une grosse douleur à l'arrivée, signe que quelque chose...son pied, par exemple, avait particulièrement été mal réceptionné. Comme si cette série de malheurs n'était pas suffisante, la force et la gravité le firent rouler sur lui-même jusqu'à ce que son corps rencontre un autre arbre qui, cette fois-ci, l'arrêta totalement.

Hadès était complètement dans les vapes. Il devait avoir des ecchymoses sur tout le corps, une cheville cassée, sinon foulée et une côte, au moins, démise. Il avait mal, et quelque chose lui disait que ce n'était pas la fin...Il tenta de bouger, mais s'avéra finalement beaucoup trop faible pour esquisser le moindre mouvement. Et Mordred ? Il s'était barré ? Ainsi, il allait rester ici jusqu'à ce que quelqu'un le découvre ? L'endroit semblant relativement désert, c'était bien parti pour durer longtemps...Et puis, soudain, Akira Darkwood entendit un son, un peu d'écho. Il eut la curieuse impression que c'était son nom qui était crié...Mordred ? Des pro-Kiras n'auraient pas crié son nom, ils auraient directement fait une battue.

« Je suis ici ! Je ne peux plus bouger ! »

Sa voix ne portait pas beaucoup, mais il tenta de crier, malgré la douleur fulgurante qu'il ressentit aussitôt après.

« Je suis...euh...sous un sapin ! ...Un pin ! »

Je ne peux pas rester recroquevillé par terre pendant des siècles, la réalité m'appelle. Je m'assoies pour faire un check up de mes blessures. Une plaie à la tête, des écorchures partout, des traces de terre. Rien de grave, je peux marcher. Je lève le nez pour voir si mon futal s'est pas accroché dans une branche pendant que je tombais, je suis presque sûr de l'avoir gardé pendant le vol. Effectivement : il est emmêlé dans une grosse branche dix mètres plus haut. De la petite bière, à escalader. Et j'aimerais vraiment porter un pantalon, en la circonstance. On est poursuivit par la police, j'ai pas en plus besoin de m'enfuir à poil. Je hurle à Akira :

- J'ARRIVE, DEUX SECONDES !

Puis je saute vers mon futal. J'arrive rapidement à la branche concernée et je remets mon pantalon debout sur une branche à dix mètres du sol – je comprends pas pourquoi tout le monde n'arrive pas à faire ça, c'est simple. Mon fut' est lacéré en dessous des genoux, et aussi déchiré au milieu de la cuisse gauche. Il est sale, et y a des poils gris dedans. C'est quand la queue est apparue que j'ai commencé à le perdre, je me souviens. Je me sens beaucoup plus serein maintenant que tout ça est derrière moi, et limite fier, en fait. J'ai volé des kilomètres pour fuir les agents de Kira grâce à une technologie que je ne maîtrise pas. Je me sens fatigué – surtout des muscles du dos – de l'effort physique, mais je me souviens de presque tout ce qui s'est passé. Un progrès indéniable. Je redescends de l'arbre avec un sentiment de satisfaction assez nouveau.

Akira est allongé une cinquantaine de mètres plus loin. Je mets un peu de temps à le trouver, mais la couleur de ses fringues et de ses cheveux se démarquent bien par rapport à l'humus sur le sol. Visiblement, ça ne lui a pas réussi de dégringoler du haut des arbres. Son expression reflète la souffrance qu'il ressent. Et on est au milieu des montagnes, assez haut vu comment j'ai froid. Je m'assoie en tailleur près de Akira.

- Je sais pas où on est, mais j'ai vu les escaliers d'un vieux temple pas loin, avec une grande porte rouge. Peut être qu'il y a un village pas loin. J'ai pas vu depuis le ciel si c'était le cas. Vous pouvez pas du tout marcher ?

Il m'a déjà dit qu'il pouvait pas bouger, mais j'aimerais bien que ce soit pas le cas alors je lui pose la question d'un ton un peu suppliant. Si il peut pas marcher... on est dans la merde. Il me vient pas à l'esprit de l'abandonner là comme ça pour retourner chez moi, c'est un peu trop violent comme supposition. Je suis pas un psychopathe, alors je m'inquiète de la suite des événements. Je peux pas le porter, il est trop lourd, et je doute de pouvoir me retransformer par la force de ma volonté. Peut être qu'il y a dans le vieux temple un petit vieux tout gentil ? Tout gentil, et avec le téléphone ? ... mais pour appeler qui ? On peut pas prévenir les ambulances, c'est trop suspect. Peut être quelqu'un du cirque ? Ouais. Ou alors le petit vieux tout gentil a une voiture. J'y crois pas trop quand même.

- Vous avez pas un autre portable ?

Mordred ne tarda pas à se rendre auprès de lui, et Hadès, mal en point comme tout, tenta de se mettre à peu près assis pour mieux pouvoir lui parler et l'écouter, mais il ne réussit qu'à se faire plus mal. La douleur était présente dans tout son corps et à ce moment précis, il lui aurait certainement fallu un docteur pour le soigner. Il était trop dangereux d'appeler une ambulance, car la police de Kira devait être sur le qui-vive actuellement, alors comment allaient-ils faire ? Comme le disait Mordred, il y avait bien un vieux temple dans le secteur. Akira connaissait approximativement l'endroit, il avait pu se repérer lorsqu'ils étaient dans les airs. Par contre, là, il n'avait qu'un tiers des capacités disponibles de son cerveau.

Écoutant la remarque de Mordred, il se demanda s'il n'avait pas un deuxième portable. Normalement, il se trimbala toujours avec plusieurs portables qui avaient tous des fonctions différentes, mais aujourd'hui, il n'en avait pris qu'un, lui permettant de contacter les gens de son clan. C'était en partie la raison de cette fuite forcée, tout simplement parce que ce portable-là n'était pas protégé par des protocoles rendant intraçable tout texto ou appel.

« Pas de téléphone...je pense...que c'est pas la peine de vous demander si vous en avez un ou pas, hein ? »

Sinon, il ne lui aurait pas posé la question, tout simplement, et puis les vêtements qu'il portait avaient l'air tellement cheap qu'il se demandait où étaient passées la chemise, les chaussettes et tout le reste. Sans doute s'étaient-ils pétés pendant la transformation, après tout, ce ne serait pas vraiment étonnant. Il y avait-il au moins un bâton à côté de lui ? Si c'était le cas, il pourrait au moins espérer s'appuyer dessus, pour...pour marcher, ou il ne savait quoi qui le ferait sûrement encore plus délirer à cause de la douleur.

« Un temple rouge ? Oui, j'ai entendu parler d'un temple shintô, dans le coin. Les moines ne peuvent pas refuser d'accueillir des âmes en peine...je pense que si...si je m'appuie fortement sur vous, et que vous me tirez un peu, ça devrait aller. Parce que là, je ne pense pas me lever tout seul...j'ai même mal quand...irgh...je parle. »

Il tenta de se relever un peu et, avec difficulté, bougea d'un centimètres vers la droite. Grâce à un effort surhumain, il réussit à s'adosser à l'arbre, non à se mettre debout, mais c'était déjà pas mal. Il fut alors pris d'une quinte de toux...du sang ? Sa main en était maculée, maintenant, puisqu'il avait eu le réflexe de la mettre devant sa bouche. Haha...il y avait longtemps qu'il n'avait pas été en si mauvais état. La dernière fois, c'était probablement lorsque Arashi l'avait ramassé dans une rue, en plein couvre-feu : à l'époque, il s'était fait soigner avant qu'ils le rejettent à l'extérieur, il ne savait plus, ses souvenirs étaient bloqués. Là, s'il crachait du sang, c'était qu'il y avait quelque chose qui n'allait pas avec ses côtes. Au pire, elles avaient perforé un poumon et il faudrait avoir un professionnel de la santé le plus vite possible. S'ils réussissaient à rallier le temple, ils pourraient persuader les moines de leur passer le téléphone, et Hadès pourrait filer à Mordred le numéro de contact de confiance dans le domaine de la santé.

Il tendit le bras, lui faisant signe que cette fois-ci, il pouvait essayer de le porter.

« On...on ne doit pas rester...ici...ils vont arriver...ils vont...faire décoller des hélicoptères...j'ai des contacts, il...nous faut un téléphone...emmène-moi au temple ! »

Akira me demande de le porter. Il a pas du tout l'air frais, ses traits sont tirés par la souffrance et son teint est plus pâle que auparavant. Il a dû se casser quelque chose dans l'histoire. Je me sens un peu con, debout devant lui avec juste quelques plaies et ecchymoses. J'ai toujours été comme ça. Jamais malade. Et durant ma fuite du labo, j'ai été blessé, je m'en souviens pas mais j'avais une grosse plaie au ventre après. Elle a guérit tout seule sans qu'un médecin vienne mettre ses gros doigts dedans alors que j'avais juste utilisé du PQ humide pour faire des bandages. Une chute du haut d'un arbre m'a pas posé de problème majeur. Je me sens fatigué, mais d'une bonne fatigue due à un effort physique.

Je m'accroupis près d'Akira pour passer son bras sur mes épaules et le soulever. J'aurais bien proposé d'y aller seul, mais c'est lui qui a des contacts pour nous tirer de là, visiblement. Toute cette histoire reste mystérieuse, mais tout ce que je peux proposer de mieux c'est qu'un gadjo du cirque vienne nous chercher. Et va trouver une explication crédible pour toute cette histoire. Donc, même si ça va le faire crever la mort, je le lève. Évidemment, ça va pas sans douleur pour lui, et je serre les dents en essayant de pas en entendre les manifestations. J'ajuste sa position sur moi pour essayer de soutenir un maximum de son poids, mais j'ai pas la force de le porter totalement. C'est un homme adulte, certes pas sujet à l'embonpoint, mais quand même. Les premiers pas sont enthousiastes, mais maladroit. Et la suite se corse.

C'est pas une surface plane, mais une putain de forêt avec du sol plein de bordel. En côte. Déjà, atteindre le portique de prière rouge, et après, les escaliers... mais on est pas encore là. Notre progression est trop lente pour oser penser à tout ça, c'est décourageant. On en a pas fait la moitié que j'ai les muscles des épaules et des cuisses en feu. J'avais froid, mais l'effort physique me réchauffe comme il faut. Je suis tout le temps obligé de rajuster la position de mon paquet parce qu'il arrête pas de glisser, et la douleur a l'air de parfois trop le préoccuper pour qu'il se soucie de ce genre de détail, tellement qu'à la fin j'ai l'impression de le traîner. A un moment je manque de me casser la gueule sur une bûche, mais dieu merci j'arrive à me rattraper. Je n'aurais pas réussi à relever Akira, et je doute qu'après être tombé sur ses os cassés il tienne à renouveler l'expérience. J'espère surtout qu'il va pas s'évanouir, si il lâche le peu de tension qu'il arrive à maintenir j'arriverais jamais à l'empêcher de tomber.

On sort enfin des bois, on est sur vieille route pavée couverte par des aiguilles de pins, et l'enthousiasme me redonne de l'énergie pour atteindre le pied des vieux escaliers en pierre. On voit le temple en haut, c'est pas si loin... quand on porte pas un gars. Je voudrais le poser pour faire une petite pause, mais j'ai peur de ne plus arriver à le relever après. Je devrais peut être continuer à le porter tant que je peux et faire une pause quand ça sera vraiment indispensable, si jamais j'arrive pas à atteindre le haut des escaliers en une fois.
Et puis il y eu ce son... merveilleux.

Je relève brutalement la tête. Je sais pas ce que c'est, comme un bruit de clochette, mais... en mieux. Un frisson de plaisir me court le long du dos. Je courrait bien jusqu'à lui, mais il y a encore Akira à porter. Mais... mon cerveau plonge dans le brouillard, où il n'y a que cette musique et moi. Je ne peux détacher mon regard du temple, hâtif de me rapprocher de la source du son. Mais il y a Akira. Une solution simplissime s'offre à moi : léviter et le porter jusqu'en haut. Ça irait plus vite que de le traîner quand même. Du coup je le fais sans me poser de question. Je porte Akira jusqu'à la porte, le pose délicatement devant, et vole vers la source de cette musique merveilleuse. C'est un vieux carillon accroché à la toiture avec en dessous un parchemin où est écrit quelque chose en japonais antique que je ne sais pas lire. Le vent lui fait faire du bruit parfois, mais c'est pas suffisant. Avec une délicatesse infinie et conscient de la gravité de mon acte, je pousse très délicatement du doigt l'objet. Il se remet à faire du bruit pour mon plus grand plaisir. Et je recommence. Je ne suis pas en état de réfléchir, juste hypnotisé par la musique.

Mordred l'avait aidé à se relever, mais il avait entendu quelques « cracs » qui ne lui disaient rien de bon. Ils avaient un petit chemin à faire dans les bois, et il put voir qu'il laissait des traces, sang, poils roux, entre autres, contre le tronc de ce pin. Il n'eut pas vraiment le temps de dire à Mordred qu'il faudrait ramasser tout ça ou les pro-Kiras auraient son ADN et sauraient probablement qu'il était en mauvais état...les gens normaux ne se cognaient pas contre des arbres et ne perdaient pas leur sang. L'hypothèse la plus probable était donc qu'il était tombé d'en haut. Les pas de Mordred étaient grands, Akira souffrait comme un bon diable, chaque pas était plus douloureux que l'autre. Lorsqu'il vit les escaliers, il soupira de bien-être, mais tout de même inquiet que Mordred ne supporte pas.

Il poussa un fort gémissement lorsque faillit tomber, ayant l'impression que son corps ne supportait plus du tout la douleur. Hadès luttait contre l'évanouissement. Il faisait actuellement preuve d'une force de caractère assez incroyable, que n'ont pas certains plus jeunes. Un autre dans cet état aurait depuis longtemps dû s'évanouir, ou encore crier à perdre haleine – quoique, crier lui faisait vraiment mal. Tout la montée fut difficile, sans doute autant pour lui que pour son aide. Parfois, il avait l'impression que l'escalade était plus aisée, comme dans un rêve où il n'y avait aucune marche, que c'était tout droite...presque que ça « glissait », mais il délirait. Ils ne pouvaient pas glisser, puisqu'il y avait des escaliers.

Lui n'entendit pas le son, mais il fut bien content, lorsqu'ils arrivèrent enfin en haut de l'escalier. Mordred le porta jusqu'à la porte du temple, puis le laissa. Le...laissa ? Où était-il parti ? Il ne l'abandonnait pas, tout de même ? Akira entendit la porte s'ouvrir, des hommes s'exclamer de surprise en voyant les dégâts qu'il y avait sur son corps. Ils n'avaient pas l'air d'être de la police, non. Ou alors ils jouaient bien leur jeu...Ils firent rentrer le malade, qui essayait de leur dire des choses, mais c'était bien difficile dans son état.

« Faut... »

Il était allongé sur une paillasse, maintenant, un linge sur la tête.

« Faut pas...appeler...l'ambulance...je...connais des docteurs... »

Ils n'étaient sans aucun doute pas fous et avaient dû deviner que le malade fuyait la ville, fuyait les pro-Kiras par la même occasion. Ici, presque en campagne, la folie de Kira était moins grande, ils étaient presque oubliés, tant mieux. Ils vivaient, heureux, petit groupe de moines, collés au village voisins et avaient appelé l'homme qui les guérissaient tous pour s'occuper de Hadès. C'était un médecin à la retraite qui s'était installé là, fatigué du bruit que dégageait Tokyô la grande, Tokyô la magnifique. Lorsqu'il releva la tête – il avait dû s'évanouir, mais il n'avait aucune idée de quand ni comment – Hadès constata qu'il avait pas mal de bandages et qu'on avait posé des bols à côté de lui. Une femme lui donna à boire, puis lui fit avaler du thé guérisseur.

« Je ne comprends pas... »

Il n'avait pas l'habitude de cela. Là où il était, il fallait payer pour avoir, donner la réciproque. Comment allait-il pouvoir rembourser ? Les pro-Kiras allaient-ils arriver ?

« Eux... »

- Calme-toi, mon fils... Tu es guéri, il te faut du repos. Ton ami attend dans la pièce d'à côté.

« Ils vont me chercher...ils vont vous tuer ! »

- Nous sommes juste venus en aide à un homme blessé. Kamisawa-san s'est permis de vous injecter de la morphine, c'est un ancien docteur. Vous êtes en sécurité, c'est une cachette.

Ils n'avaient plus l'air d'être dans le temple, en effet, il ne voyait de décorations prévus pour le sujet nulle part. Lorsque Hadès tourna la tête, il vit qu'il était sous perfusion. N'osa pas, pour l'instant, demander un quelqu'un téléphone, sans doute valait-il mieux attendre que les pro-Kiras se calment dans leurs recherches.

« Merci... »

Quelqu'un décrocha le carillon.
Je cligne des yeux, j'ai l'impression de me réveiller et d'avoir été dans un rêve. Des vieux japonais me regardent d'un air intrigué pendant que je reprends le fil des événements. Oui, les cadavres, le vol, porter Akira jusqu'au temple, puis il y avait eu la musique du carillon... maintenant que l'objet est posé dans une boîte, je me sens l'esprit plus clair. Le plus vieux me dit que ça sert à attirer les esprits, je hausse des épaules. J'essaye d'avoir l'air de m'en foutre. De toute façon, il y a un sujet plus urgent : le blessé que j'ai presque lâché devant la porte. Je n'ai donc pas le temps de penser au carillon, tout comme je n'ai pas eu le temps de réfléchir à tout ce qui vient de se passer. Tout s'est passé trop vite, et dire qu'il y a quelques heures seulement j'étais comme d'hab' à glander, avec la dompteuse de tigres. On a bu des bières, puis on a niqué parce qu'il y avait que ça à faire. C'est la seule nana que j'ai connu au sens biblique du terme. Ça me semble loin là.

J'explique qu'on a eu un accident de la route et que je l'ai porté jusqu'ici, parce que c'est le seul endroit civilisé que j'ai trouvé, que le blesser peut appeler des gens pour venir nous chercher, peut on emprunter le téléphone s'il vous plaît. Le plus vieux des trois prêtres m'interrompit d'un geste et m'expliqua qu'un docteur du village en contrebas peut venir, et que de toute façon mon compagnon s'était évanoui. Là, je me suis senti très mal à l'aise. Je n'ai aucune idée de ce qu'il convient de faire et surtout, je ne vois pas quel motif pourrait être suffisant pour que le docteur ne vienne pas. C'est sans doute une mauvaise chose qu'encore un mec extérieur se mêle de l'histoire, les agents de Kira vont pas tarder à venir fouiner dans le coin. Darkwood a parlé d'hélicoptère à un moment... oh mais bordel, il est quand même blessé ! Il en a besoin du putain de docteur, que ça soit dangereux ou pas. Mais je peux pas laisser ces vieux se mêler à l'affaire sans leur dire que des agents vont débarquer dans le coin à un moment ou à un autre.
Je leur ai expliqué autant que j'ai pu, donc.

Grosso modo, que des agents de Kira allaient venir. Je ne leur ai pas parlé des cadavres, ni du vol au dessus des montagnes, et d'ailleurs ils ne posèrent pas de question. Même pas nos noms. Le plus vieux – il semblait commander la troupe – déclare qu'il faut déplacer le patient à la Maison. On sent la majuscule dans le nom quand il le dit. Tout le monde a l'air de voir de quoi il parle, et part faire des trucs pour organiser le déplacement. On me fait signe de venir aider à porter la civière. Encore porter des trucs ! Et pas à la porte à coté hein. Niveau cachette, ça vaut parfaitement le déplacement par contre. C'est une petite maison au milieu des arbres, et à cause de la géographie du coin à base de creux et de rochers bien placé, on ne la voit pas avant d'avoir le nez dedans. Et il n'y a qu'un seul chemin praticable pour y aller. Il y a très peu de pièces par rapport au temple, et on me fout dans un salon à coté de la chambre où se trouve Akira... et on me met de la bouffe sous le nez.
Je sais pas qui l'a préparé et quand, mais je lui adresse une petite prière de remerciement en me mettant à manger. J'avais super faim sans m'en rendre compte, dans le feu de l'action, mais avec tout le sport que j'ai fait c'est logique. C'est pas un repas une bière en plus, j'en suis presque sûr. Donc je dévore comme un porc tout ce qu'on a l'obligeance de me mettre sous le nez et après je me sens vachement mieux. Akira n'est toujours pas réveillé. On me propose de dormir, j'ai pas envie, il s'est passé trop de bordel faut que j'y réfléchisse deux minutes. 'fin j'me dis surtout que je suis dans la merde. Enfin ils ont sans doute pas de quoi me retrouver au cirque. Et puis c'était qui ces cadavres merde ? Pourquoi Akira avait besoin de les prendre en photo ? C'est pas résolu ces affaires là non plus ! Donc j'ai plus qu'à rester sur mon cul à ruminer pendant que monsieur dort, en me faisant flipper tout seul parce qu'on commencer à entendre des hélico passer, en plus.

Il s'était bien réveillé, puisqu'il se souvenait d'avoir adressé un mot aux gens à côté, mais il avait dû refermer les yeux aussitôt après...tels étaient ses souvenirs. Il s'était profondément endormi et sans doute même avait-il eu un petit accès de fièvre. Vu son état, ce n'était pas vraiment étonnant...on avait donc posé une compresse sur le front d'Akira Darkwood et il avait déliré pendant quelques heures supplémentaires...

La première chose qu'il vit, lorsqu'il ouvrit les yeux fut le plafond. Pas un plafond doré, coloré, juste normal, sobre. Marron. Et puis il se leva, et le linge qui reposait sur son front lui tomba en plein sur la figure...Akira soupira un peu, puis s'aperçut que Mordred était dans la même pièce que lui. Étrangement, il n'avait plus mal. Il aurait même dit qu'il flottait, il se sentait étrangement bien, si bien qu'il n'avait plus envie de bouger de ce lit. Ils devaient être en sécurité, ici. Ça n'avait pas l'air d'être un hôpital, ça n'avait pas l'air d'être une prison, ni un temple. Il en déduisait que le prêtre et les personnes qu'il avait rencontrées les avaient conduits dans un lieu secret. Ici, les soldats de Kira ne risquaient sûrement pas de les trouver...Et au pire, s'ils le faisaient...et bien...tant pis. Ils auraient tenté, au moins, de s'échapper.

Il regarda son bras, et, en baissant la tête, vit qu'il avait pas mal de bandages sur les bras, et qu'il était torse nu, toujours aussi bandé. Il n'avait mal nul part, mais il ne tarda à trouver l'explication : il était tout simplement perfusé, et il devait sûrement être alimenté à la morphine en intraveineuse. À l'extérieur, il crut entendre des bruits d'hélicoptère qui volaient, tournoyaient. Ils ne se rapprochaient pas d'eux, mais ils avaient l'air de faire le tour...ce n'était pas spécialement heureux, il espérait que les villageois qui – sans doute – les protégeaient, n'auraient pas d'ennuis. Lorsqu'ils entendraient plus les bruits, ils sauraient qu'ils avaient vraiment des ennuis, mais pour l'instant, ça allait.

« Ha...Il est quelle heure ? ...En fait, je me suis aperçu que je ne connaissais pas votre nom...Vous connaissez le mien, après tout... »

Ils devaient sûrement fuir rapidement, mais sa condition ne lui permettait pas de bouger. Il avait essayé de plus se lever, mais, si il n'avait plus mal, ses membres ne tenaient pas. Il avait l'air encore trop faible pour parvenir à quelque chose, et il lui faudrait sûrement du temps. Par ailleurs, il se demandait combien de temps il fallait à quelqu'un comme Mordred pour se guérir. Une heure, un jour ? D'incroyables facultés comme il en avait devaient impliquer, au moins le fait qu'il récupérait plus vite que la normale, non ? Mais Hadès n'était pas vraiment spécialiste dans tout ça, et en plus, il divaguait à moitié mentalement.

« J'ai l'impression que je sens plus la douleur...c'est drôle hein ? On va rester ici, j'aime bien, moi, j'ai chaud, et puis j'ai pas mal... Tu veux une couverture ? »

Ça y était, les hélicoptères, le danger, Kira, déjà, tout cela était oublié. Ou presque. Il rajusta les couvertures sur lui, se remit contre l'oreiller...ici, il était bien, pour un peu, cela lui aurait presque rappelé les mauvais soirs où il avait une méchante grippe, lorsqu'il était gosse. Sa grand-mère maternelle trouvait toujours un vieux remède dégoûtant à lui faire avaler et il s'endormait d'une traite. Là, il ne dormait plus, il était juste nostalgique.

« J'aimerais bien revoir Arashi...pour lui dire qu'il a tort d'être de leur côté...mais maintenant, il sait que je suis Hadès, alors...il risque d'un peu m'en vouloir... »

Il divaguait, divaguait. Et venait de trahir son identité.

J'ai fini par rejoindre Akira dans sa chambre quand on m'a dit qu'il s'était réveillé. Il a l'air complètement défoncé. Il me demande l'heure – je ne peux lui répondre que « chépa » - et mon nom. Je prends le temps de réfléchir deux secondes à la réponse, parce qu'est est pas évidente. Me présenter en répondant bêtement « Mordred » me semble ridicule, en la circonstance. Ce n'est pas mon nom, c'est moi qui ait choisi quelque chose qui me semblait sonner vaguement européen pour faire genre. Son vrai nom on le choisit pas. Je hausse des épaules et j'essaye d'expliquer ça en essayant de garder un ton neutre, comme si c'était pas très grave.

- Je sais pas, je m'en souviens pas. Et quand je regarde dans un miroir ça me met rien. Je trouve ça perturbant, d'ailleurs. J'ai l'habitude de voir systématiquement des noms et des dates au dessus de la tête des gens. C'est comme si je croisais quelqu'un sans visage. Mais je me fais appeler « Mordred » là où je travaille.

Mais bon, en fait Akira s'en fout probablement de ce que je raconte. Il délire complet à cause de ce que lui a donné le toubib. On m'a proposé de le voir aussi tout à l'heure, j'ai dit non. Même pour aseptiser une plaie. On sait jamais. Il dirait quoi le toubib si il voyait que j'ai... pas tout ce qu'il faut comme il faut ? Et je sais même pas exactement ce que mon coté hybride a transformé chez moi. De toute façon ça va guérir tout seul, même pas besoin d'un coup d'alcool à 90° dessus. C'est le mec qui s'est fait des bandages en PQ mouillé qui te le dit. Par contre, des fringues ne sont pas magiquement apparue et j'accepte la couverture. J'ai froid. Je m'assoies en tailleur à coté d'Akira en m'enroulant dedans.
Et ensuite il me parle de son frère. Et ça devient bizarre. Puis effrayant. En fait, c'est un terroriste. Un putain de terroriste. Et même pas un au pif comme ça, le chef des terroristes. Akira. Je bouge pas mais mes yeux s'écarquillent légèrement et mon rythme cardiaque augmente. Il s'est bien gardé de me le dire ce con ! Et j'essaye de mesurer à quel point je suis dans la merde. Maintenant, j'ai un lien avec un putain de chef terroriste. J'ai plus qu'à m'inquiéter des keufs sans pouvoir rien faire maintenant. Ça explique les putain d'hélico, ils doivent être motivés à le récupérer ce connard là. Donc j'engueule un mec défoncé, parce que je suis trop nerveux actuellement pour ne pas le faire.

- ... donc quand il faut que j'attire surtout pas l'attention, vous m'embarquez dans vos histoires de cadavres et de terrorisme ? Je suis un peu hébété qu'on me foute dans la merde aussi facilement, sans raison. Je me perçois pas comme avantage stratégique donc l'idée ne m'effleure même pas. Mais pourquoi vous me l'avez pas dit avant ? Comment je vais rentrer chez moi avec tous ces hélico au cul ? Ils doivent être bien motivé de vous chercher, c'est sûr, et moi j'vais manger par ricochet alors que j'ai rien à voir avec rien.

Donc je chouine d'être mêlé à tout ça et qu'on me considère pas comme le centre de l'univers, et je me dégoûte un peu en m'entendant parler. Je finis par trouver la force de fermer ma gueule, donc.

Il était complètement pété, c'est pour ça qu'il souriait à Mordred, l'écoutant et le laissant parler. Comme cela, il s'appelait Mordred ? C'était un joli surnom, même s'il était plus que fortement connoté. Mordred, n'était-ce l'homme qui avait mené Arthur à sa chute ? Il en aurait presque ri si son état n'était pas aussi catastrophique. Ce qui lui apprit le fit par contre réfléchir...ainsi, les êtres qui possédaient ces yeux, cette caractéristique, ne pouvaient voir leur propre nom...cela lui faisait un peu penser à ce criminel notoirement connu, Beyond Birthday. Akira avait beau être un peu dans les vapes, mais il se souvenait tout de même de cette tête de corbeau et de la curieuse manie qu'il avait d'appeler les gens qu'il voyait par leurs vrais noms...Pourquoi avait-il ces yeux ? Était-il le fruit d'une expérimentation ? Il s'agissait d'une question qu'il ne pouvait, malheureusement, poser qu'à Mello ou à Near. Il n'avait pas d'autres contacts qui aient fait la Wammy's House – enfin il y avait ce garçon, Matt, mais il ne lui avait jamais trop parlé et il avait l'air trop ami avec Mello pour sembler bel et bien intelligent. Il y avait également Illness, qui aurait pu en savoir davantage, mais celle-là venait de se faire capturer par leurs ennemis. Peut-être que s'il mettait le sujet dans la tête de Fate, celle-ci trouverait bien de faire enquêter sur ce criminel notoire.

Akira Darkwood s'était un peu plus emmitouflé dans la couverture, regardant de temps en temps la porte. Il n'avait pas peur, il était tout à fait détendu, la preuve, c'est qu'il ne faisait aucun mouvement ou n'essayait pas du tout de se lever pour s'en aller le plus vite possible. Il fut un peu choqué lorsque Mordred le traita de « terroriste » : après tout, eux se surnommaient résistants, ou encore rebelles. Le mot « terroriste » était violent, il impliquait qu'ils tuaient des civils et qu'ils posaient des....bombes...mais ils faisaient ça, bon sang ! Tout d'un coup, la réticence de certains civils à rejoindre leurs rangs lui parut plus claire. Il comprit également plus facilement la haine qu'avait certains policiers pro-Kiras à leur égard, tout simplement parce qu'ils détruisaient tout ce qu'ils avaient mis des années à construire. Un mal pour un bien. Les actions de la résistance étaient beaucoup trop importantes pour qu'ils puissent s'arrêter à ce stade.

« Mais non, ce n'est qu'un hasard ! Et puis on veut la paix, haha ! On va gentiment attendre qu'ils s'arrêtent de tourner autour de nous, c'est tout...et ensuite, je vous logerai chez moi...vous le méritez, hein ? Même si vous m'avez fait tomber du haut d'un arbre et que je ne sens plus mon corps, vous m'avez tout de même sauvé la vie ! »

Il lui souriait bêtement. Il avait tenté de se mettre sur le ventre pour le voir plus facilement, étant donné que Mordred était en bas de son lit, mais il ne réussit qu'à s'emmêler les pinceaux avec sa perfusion. Quelle dose de morphine lui avait-on mis ? Il poussa alors un gémissement alors que l'aiguille bougeait dans sa peau, un mouvement de travers bidouilla la dosette et le produit arriva en masse dans son organisme, ce qui ne fit que le rendre plus abruti. Qu'avait-il contre les résistants ? Ils protégeaient les civils de ce gouvernement dystopique, ils sacrifiaient leurs vies et leurs carrières pour vous. Alors cet homme, pourquoi ne lui était-il pas reconnaissant ?

« Peace and love...Le gouvernement...il fait des actions terribles, haha ! Mais je suis sûr que mon frère est un gentil, parce qu'il m'a toujours défendu ! Si je pouvais le faire, je sortirais et je leur ferais de grands coucous ! Comme ça, je pourrais à nouveau toucher les seins de Fate. Tu la connais, Fate ! Elle est cool ! »

Il tenta de bien se remettre dans le lit.

« Je connais un humain qui a tes yeux, il est super flippant. Son pseudonyme est Beyond Birthday, mais je crois que c'est Mello qui le détient, en ce moment, ha. Je sens plus rien, c'est chelou ! »