Echanges d'informations [PV Fate]

Alpha. Il n'arrivait pas à le croire. Yumi n'est autre qu'Alpha. Alors durant toutes ces années, elle s'est bien moqué de lui. Il contenait difficilement sa colère, la sentant gagner en ampleur de minutes en minutes. Sa main se serrait sur son verre de vin qui finit par se briser. Arashi Darkwood soupira et se leva pour attraper un chiffon qu'il déposa sur sa paume. Il n'était pas question de lui pardonner. Non seulement il ne lui pardonnerait pas mais en plus, il allait lui faire payer. On ne se moque pas impunément du Ministre de la Justice.

Arashi était réputé pour être un homme colérique et violent. Il est vrai qu'au travail, il emploi les grands moyens et joue sans remords de sa réputation, mais le côté colérique est plus au moins faux. Le rouquin est au contraire un homme froid et posé qui met une distance plus que respectable entre les individus et lui même. Il n'aime pas particulièrement le monde, plutôt passionné par la littérature, l'environnement et la culture. De son temps libre, on le voit toujours avec un livre à la main, l'expression calme et neutre, ses lunettes sur le nez. Non seulement, il n'est pas bavard mais en plus pas très expressif. Arashi gère parfaitement ses émotions, si bien qu'il est rare de savoir ce qu'il pense réellement. Cependant, le ministre est intransigeant au travail, que ce soit avec ses employés ou lui même. Et l'erreur, il ne l'admet pas. La trahison non plus. Et dans ces cas là, il peut devenir pratiquement cruel. Ce n'était que justice.

Yumi n'était cependant pas son seul soucis, bien qu'elle restait pour le moment sa priorité. Il y avait également Hadès. Akira. Qui c'était évadé. Après avoir parlé. Bon sang, il fallait toujours qu'il se mette dans des situations compliquées. Le fait qu'il ait coopéré était pourtant un bon point pour lui. Alors pourquoi a-t-il fallu qu'il déconne de nouveau ? Bien entendu, Akira l'avait contacté, il voulait le voir, rattraper les choses entre eux. Mais son jumeau était encore beaucoup trop en colère contre lui pour lui accorder sa requête. Il ne pourrait pas lui sauver la mise indéfiniment.

Et puis il y avait ce dernier problème, plus personnel, qui commençait à lui porter préjudice. Le cavalier noir avait publié plusieurs articles sur lui, et la véracité des propos cachaient pourtant un complot. Arashi reconnaissait volontiers qu'il avait commis tous ces actes, après tout, il n'était pas un menteur et encore moins un homme à se voiler la face. Cependant, même s'il en prenait la responsabilité, il voulait tout de même garder le côté innocent qu'il ne clamait pourtant pas haut et fort. Il était coupable des gestes mais pas de l'intention. Il n'avait jamais voulu faire de mal à personne, non il avait été drogué et certainement pas conscient de ses actes. Ce n'était pas la première fois qu'on essayait de le nuire. De l'intérieur. Et ne pas savoir qui était derrière tout ça était particulièrement frustrant. Il lui fallait des réponses et vite.

C'est pour toutes ses raisons qu'il avait convoqué Fate, d'une manière non officielle, chez lui. Debout devant la fenêtre, il la vit arriver. Les gardiens la laissèrent entrer et il le regarda, sans sourire.

« Bonsoir. Asseyez vous. »

Il lui tira une chaise et en fit de même pour lui avant de s'asseoir à table. Il servit du vin et remua légèrement son verre, le reniflant avant de boire une gorgée.

« Vous vouliez me parler ? »

Oui, avant d'en venir à lui, autant se montrer poli et savoir ce qu'elle avait à lui dire. Et puis … Il se doutait qu'elle allait lui parler d'Akira. A lui de rester zen, sachant que son frère était un sujet sensible.

Postée devant le miroir des toilettes privées adossées à son bureau, Fate entreprit de se refaire une petite beauté. C'était jour de paperasse, c'est pourquoi elle avait laissé son pantalon d'uniforme, réservé aux opérations musclées, dans son placard pour adopter l'uniforme féminin. D'un geste, elle entreprit de dépoussiérer quelque peu la jupe droite réglementaire et entreprit de changer les collants qu'elle abimait si souvent. Elle resserra correctement la col de sa chemise, réajusta sa veste et attacha rapidement ses cheveux en un chignon strict et formel. C'était la moindre des choses : ce soir, elle avait rendez-vous. Et cela n'avait rien d'un rendez-vous galant, il s'agissait bien d'une rencontre avec le ministre de la Justice, autrement dit, avec son supérieur hiérarchique. Non pas qu'elle ait voulu faire des effets de style, mais il était bien sûr hors de question de s'y rendre en civil - elle savait la maison d'Arashi surveillée et préférait ne pas avoir à découvrir avec quelle habilité les médias parvenaient parfois à transformer une simple visite en une rencontre scandaleuse.

De toute façon, elle n'avait pas l'intention de repasser chez elle. Le Ministre s'était montré étonnamment rapide et disponible. A la réception de son mail, il avait proposé un rendez-vous le soir même, ce qu'elle n'avait pas pu refuser. Sensiblement, elle n'était pas la seule à avoir des choses à lui dire. Sans doute Arashi avait-il des soupçons quant à certaines choses dont elle devait être au courant. Cela ne la rassurait pas tellement. Elle espérait plus que tout que le Ministre n'avait pas eu l'occasion de mettre la main sur ses conversations privées avec Hadès ou encore sur les quelques mots compromettants qu'elle avait glissé sous l'effet de l'émotion lors de sa visite dans la cellule du résistant. Elle savait qu'elle s'était profondément compromise et que cette erreur risquait de lui coûter cher. Mais elle savait aussi qu'elle représentait un élément fondamental dans les actions du Ministre et qu'après avoir tant couvert son frère, il ne lui reprocherait pas un tel comportement.

A vingt-heures tapantes - il ne s'agissait pas d'être en retard, elle avait actionné la sonnette du magnifique pavillon à l'ancienne où séjournait Arashi Darkwood. Une belle demeure aux courbes anciennes et aux jardins bien entretenus qui donnaient à ce lieu un charme certain, rien à voir avec son appartement moderne et sans personnalité. Elle fut accueillie par deux gardiens dont la taille et la corpulence l'impressionnèrent quelque peu et se laissa guider jusqu'au ministre, non sans se mordiller la lèvre comme elle avait tant l'habitude de le faire quand la situation l'inquiétait. Quand elle se retrouva seule en face du ministre, elle esquissa un salut militaire réglementaire et déclara poliment :

"Général Suprême, je vous remercie d'avoir accepter de me recevoir si rapidement."

C'était formel, c'était pompeux, mais c'était le protocole. Il ne s'agissait pas de s'attirer ses foudres dans un moment pareil. Le ministre était si imprévisible, mieux valait s'en tenir aux règles. Elle prit place en face de lui autour de cette large table en bois massif. De toute façon, ses mots ressemblaient plus à un ordre qu'à une demande polie : c'est pourquoi elle s'exécuta sans un mot. Elle attendit qu'il est fini de les servir et qu'il l'autorise à prendre la parole avant de s'exprimer. Elle ne savait pas trop par où commencer... Il y avait tant de choses à dire sur des sujets tellement sensibles... Au terme de quelques secondes de réflexion, elle décida de se jeter dans la gueule du loup :

"Eh bien je sais que ce sont des avertissements que vous jugerez sans doute superficiels, mais il en va de votre sécurité. C'est pourquoi je vous demanderai de bien y réfléchir malgré leur apparente absurdité."

Elle marqua une pause, le temps de reprendre quelque peu son souffle. Elle allait devoir introduire le sujet sensible que représentait Hadès, son frère, et de ce qu'il lui avait révélé dans cette cellule avant de disparaître. Le tout était de ne pas se compromettre. La jeune femme savait que pour réellement venir en aide au résistant, elle allait devoir tenir des propos dangereux qui suffiraient à justifier sa mise en examen. Mais tout d'abord, il s'agissait de le mettre en confiance, de ne pas se présenter comme une ennemie.

"Comme vous le savez, j'ai eu l'occasion de m'entretenir avec votre frère, Akira, lors de son arrestation et de son emprisonnement dans nos locaux. Je l'ai découvert abattu, désespéré, meurtri et acculé par ses geôliers. En plus de ses intenables conditions de vie dans cette cellule, il m'a révélé les propos de ses bourreaux. Certains tiennent des propos tendancieux, voire agressifs à votre égard et se sont suffisamment exprimé dans la torture de votre sosie pour se compromettre. Il semblerait qu'en plus de s'exprimer un peu trop ardument contre vous, il y ait possibilité d'éventuelles mutineries au sein de notre propre service. Ces hommes représentent vos subordonnés. C'est pourquoi je vous recommande en toute humilité d'envisager la surveillance, voire le renouvellement de vos effectifs."

Arashi ne pu s'empêcher un léger sourire se dessiner sur son visage, amusé, en voyant Fate aussi professionnelle que ce soit dans son comportements, sa tenue ou ses paroles. C'était pourtant un rendez vous non officiel, elle n'était pas obligée d'en faire tant. Cependant, il appréciait l'effort. Le maitre des lieux l'invita silencieusement à s'exprimer. Il est vrai que le rouquin se demandait ce qu'elle devait avoir à lui dire qui était si urgent. Pourquoi avait-elle l'air aussi alarmé ? Quels propos pouvaient sembler absurdes mais qui avait l'air de l'inquiéter au plus haut point ? Les derniers articles parus sur sa personne s'imposaient dans son esprit. Il grimaça en écoutant le discours de la jeune femme. Restant tout d'abord silencieux suite à ces nouvelles, il bu une gorgée de son verre de vin, avec calme et sérénité. Voila qui donnait encore plus de crédibilité à ses propres déductions. Quelqu'un cherchait réellement à le nuire. Si Arashi ne pensait à personne en particulier, il ne s'attendait pas à ce que ce soit un groupe de personnes et dans son unité qui plus est. Sa main se crispa contre son verre, et il grimaça.

Le ministre se releva et se dirigea vers la fenêtre. Marcher l'aider à garder son calme et surtout, la tête froide. Ce n'était pas le moment de se mettre en colère. Il devait agir d'une manière réfléchit. Si Fate était venue le voir en personne pour le mettre en garde, cela renforçait sa supposition sur le fait qu'il pouvait lui faire confiance. A moins que ce soit justement pour le mettre en confiance ? … Non, inutile de douter d'elle, la blonde avait fait ses preuves depuis bien longtemps. Il n'avait aucun doute envers sa loyauté, même alors qu'il sait le lien qui l'uni avec son frère, Akira.

Arashi regarda par la fenêtre sans se détourner, puis prit la parole.

« Ce n'est pas la première fois qu'on essaye de me nuire. Mais je ne savais pas que cela venait de ma propre équipe. Leurs moyens utilisés sont de plus en plus extrêmes. Et maintenant, il y a également le Cavalier Noir. La presse à scandale qui diffuse des actes que j'ai commis contre mon gré et d'autres qui sont complètement fausses. Mais évidemment, ma réputation est déjà faite, nier les propos ne servira à rien. Les civils se sont déjà fait une idée, et vrai ou faux, ces propos ne pourront être démentis dans leur cœur. »

Darkwood daigna enfin regagner sa place et posa son regard froid sur Fate. Regard qui devient plus doux et plus humain, chose surprenante. Pour la première fois depuis qu'il l'avait engagé, Arashi accepta de faire preuve de faiblesse et poussa un soupire à fendre l'ame, posant une main sur son front. Il frotta ses yeux d'un air fatigué avec le pousse et l'index. Cette histoire commençait sérieusement à l'épuiser et le contrarier. Il posa les coudes sur la table et croisa les mains contre son menton.

« J'aurais sans doute dû vous en parler depuis bien longtemps. Mais je ne l'ai pas fait … Ce qui est complètement stupide, puisque vous êtes la seule personne en qui j'ai confiance. Je suis aujourd'hui forcé de reconnaître que je ne peux pas me débrouiller seul dans cette histoire. Fate … Ecoutez attentivement ce que j'ai à dire. Mon viol sur la personne d'Aranel … C'est vrai. »

Il n'avait pas l'intention de se défiler, de nier ce qui était vrai. Même s'il n'était pas conscient de son geste, de l'horreur qu'il avait commise, il l'avait tout de même fait. Il avait brisée une femme de la manière la plus ignoble et humiliante qu'il soit. Ses lèvres et ses mains se crispèrent. Puis il ferma les yeux, en soupirant, laissant à Fate le temps d'encaisser ses paroles, qui n'étaient pas facile à entendre. Il était son chef et il voyait mal la jeune femme l'arrêter subitement pour viol, cependant rien ne l'empêchait d'être déçu. Comme lui l'avait été par Akira lorsqu'il avait rejoint la résistance. Il tourna légèrement la tête. C'était dans ce même salon qu'il lui avait infligé cette cicatrice qu'Hadès porterait pour le restant de ses jours, lui rappelant indéfiniment sa trahison. Bien qu'elle ce soit passée il y a maintes années, Arashi se souvenait parfaitement de cette scène, comme si elle se passait encore devant lui.

Enfin, il reporta son attention sur la Capitaine qu'il avait nommé, scrutant ses moindres réaction. Il poursuivit, n'ayant évidemment pas l'intention de stopper son discours à un moment aussi crutial.

« Rien ne pourra justifier ce geste. Sachez cependant que c'était contre mon gré. J'ai été drogué. C'est à ce moment là que tout à commencé. Je n'avais pas conscience de ce que je faisais. Cependant ce qui est fait est fait, je prend donc la responsabilité de cet acte.

Hm. Je ne suis sans doute pas aussi ignoble et cruel qu'on me décrit. Ou peut-être que si, je ne sais pas. Enfin, là n'est pas la question. En revanche, ce que m'accuse Suzaku, le viol d'Illness, c'est complètement faux. Je ne l'ai jamais touché. D'ailleurs, je ne l'ai pas approché tout court, ce n'est pas mon équipe qui s'est chargé de son interrogatoire. Cependant, je suppose que la personne qui l'a violé avait bien mon apparence. »

Songeur, je repensais à ce qu'il s'était passé au conseil des ministres. Les photos montrées par Nathan Suzaku concernant l'évasion d'Akira. Devant la tête que faisait Fate, Arashi se rendit compte du quiproquo que pouvaient entraîner ses paroles.

« Non, je ne pense pas à Akira. C'est un pervers mais pas au point de toucher une fille qui n'est pas consentante. Vous n'êtes pas sans savoir qu'il y a eu, il y a peu, un conseil des ministres. L'évasion d'Hadès était un point de cette réunion. Suzaku a montré des photos de moi même qui aide mon frère à sortir. Par chance j'ai pu prouvé que je n'étais pas sur place à ce moment là. Je ne sais pas si ces deux affaires sont liés, mais c'est une probabilité que je ne peux pas mettre de côté.

Je crains qu'un changement d'équipe ne soit pas suffisant, vu le côté extrême de leurs actes, ce n'est pas ça qui les arrêteront. Surtout que je n'ai aucun nom, je ne peux pas m'en prendre à toute mon équipe, il y en a sans doute qui n'ont rien à voir avec cette histoire. Que proposez vous, Mlle Harlaown ? »

Elle poussa un soupir. Elle venait de parler, de transmettre ce qui paraissait si essentiel aux yeux d'Akira. Peu importe où il se trouvait en ce moment précis, il pouvait au moins se sentir rassuré sur ce point. Bien que Fate doutait même du fait qu'il était en vie, elle se savait soulager de ce poids et avait, par la même occasion, atténuer les doutes et les peurs de son ami. La jeune femme aurait aimé pouvoir entamer le sujet sensible que représentait Akira Darkwood. Empêcher son emprisonnement, lui permettre de vivre sous protection de l'armée, le sauver des autres résistants dont il avait tant peur et, pourquoi pas, envisager le début d'une certaine forme de pardon entre les deux frères. C'eut été inespéré. Fate savait pertinemment que, à son grand désespoir, Akira ne trahirait jamais pour le simple fait de la posséder, ne serait-ce qu'une nuit. Pourtant, elle était persuadée que le pardon de son frère le ferait céder.

Cependant, elle n'osa pas lâcher ne serait-ce qu'un mot sur le sujet. L'attitude d'Arashi trahissait ouvertement son état d'esprit. Elle le sentit déstabilisé et mal à l'aise. Le ministre qui était d'ordinaire si apte à cacher ses pensées et ses sentiments semblaient se laisser brusquement aller à la lueur de ces nouvelles. Il se leva, fit les quatre cents pas le long des quelques mètres qui séparaient la table de la fenêtre. A ce moment précis, Fate compris qu'elle avait bien fait de parler malgré tout ce que cela engendrait. Arashi doutait. Et Arashi ne doutait jamais sans raison. Elle l'écouta patiemment reprendre la parole. Bien sûr qu'il était au courant, d'une manière ou d'une autre. Il savait toujours tout, repérait toujours tout avant tout le monde. Et pourtant, à ce moment précis, Arashi lui sembla terriblement faible.

Il se laissa quelque peu aller, lui exposant les problèmes de cette presse à scandale qui l'accusait des crimes les plus odieux. Elle resongea à cet article du Cavalier Noir où avait été très crûment décrit le viol horrible qu'il avait commis sur cette femme, Ishtar, une résistante. Fate s'en souvenait parfaitement. A l'époque, elle redoutait Arashi comme la peste et trouvait ses rappels à l'ordre quelque peu menaçant. Son imagination avait fait le reste : elle se souvenait de cet échange de mail avec Akira où la peur de devoir se soumettre aux caprices de son supérieur pour garder sa place l'avait mise dans tous ses états. Plus tard, sa relation avec le ministre avait changé. Lui, l'avait couvert, contrairement à Nathan en qui elle pensait pouvoir avoir confiance. Lui, avait même cherché à la protéger lors de cet attentat.

Arashi était un type bien, avec ses quelques bavures, comme tous les membres du gouvernement. Et quand elle le vit reprendre place et observa ses gestes désespérés, elle comprit qu'Arashi était sans doute victime de cette mode visant à le présenter comme le dernier des salauds. Il avait l'air à bout de force. Fatigué de devoir contester ces rumeurs, de devoir faire face aux disparités d'un gouvernement difficile à gérer, aux caprices d'Iwa, aux attaques de Nathan, à l'inactivité d'Arthur et, par delà tout cela, de devoir accepter la difficile idée de savoir son frère dans la résistance.

« Je vous crois, Arashi. » s'était-elle contentée de dire en posant une main amicale sur son épaule après avoir écouté ses explications.

« Je vous crois » répéta t-elle.

C'était sans doute la première fois qu'elle l'appelait de manière aussi informelle et ce geste familier, elle en avait conscience, était particulier déplacé. Mais elle doutait réellement du fait qu'Arashi le lui fasse remarquer. Il avait besoin d'aide. Et elle semblait être l'une des rares personnes à pouvoir lui en procurer. Fate le croyait, sincèrement. A bien y réfléchir, elle peinait à faire correspondre cette image de pervers sanguinaire avec ce qu'elle savait réellement de lui désormais.

« Ce que vous dites est particulièrement inquiétant. Cela signifie qu'en plus de vous vouloir du mal, une entité aire librement dans nos locaux pour profiter de nos prisonniers... Quant à votre frère, j'ai eu... Quelques contacts informatiques avec lui il y a peu. Il semble quelque peu désorienté et refuse de me confier les conditions de sa libération. C'est une piste à explorer... »

Elle marqua une pause, consciente qu'elle venait de révéler qu'elle entretenait des contacts avec un prisonnier de haute importance en cavale. La jeune femme se mordit la lèvre, machinalement. Elle but une dernière gorgée de vin avant de lui confier à son tour ses craintes.

« Écoutez Arashi. Je n'ai pas de solution miracle et j'en suis sincèrement désolée. Mais je suis bien évidemment prête à vous aider. Il devient de plus en plus difficile de rester de marbre au sein de ce gouvernement. Collaborer avec Nathan n'est même plus imaginable et je commence même à me douter si garder Iwa comme premier ministre malgré l'état de sa santé mentale est raisonnable. »

Kira. Elle y croyait dur comme fer. Pas en Dieu, pas en ce mythe de l'entité métaphysique qui dirigeait ce monde autoritaire avec poigne et observait constamment ses citoyens, quoi qu'ils fassent. Mais en ce régime de justice pure où la moindre faute grave était rédhibitoire. Pourtant, plus le temps avançait, et plus ce gouvernement auquel elle appartenait lui semblait en inadéquation avec cette vision du monde. Certains partageaient à peine l'idéal de Kira, d'autres commettaient des actes qui dépassaient le cadre de leurs fonctions et les quelques individus à s'impliquer réellement présentaient des quelques problèmes inquiétants. Fate n'était pas seule à penser cela, elle en était persuadée. L'illusion disparaissait lentement et, bientôt, même les citoyens pro-Kira perdraient confiance en ce gouvernement.

La jeune femme torturait ses mains pâles depuis quelques minutes déjà. Il fallait qu'elle lui avoue quelque chose d'un peu fou, mais qui lui paraissait désormais inévitable.

« J'entretiens des relations amicales avec votre frère. A plusieurs reprises pendant ses cavales, j'ai eu des contacts par mail. Je l'ai même rencontré, une fois, en pensant gagner sa confiance. La soirée a particulièrement mal fini mais... J'aurais pu faire intervenir une équipe d'intervention. Et je ne l'ai pas fait. C'est largement suffisant pour me démettre de mes fonctions. Pourtant, je reste profondément attachée à l'idéal de Kira et ne le trahirait jamais. Croyez moi, je suis persuadée que votre frère pourrait retourner sa veste ou, si c'est trop espérer, redevenir un humble citoyen de Kira. Mais ce n'est ni la force, ni la torture qui le feront changer d'avis : c'est vous. »

Elle se tut, poussa un soupir et laissa le temps à Arashi d'avaler l'information. Il devait déjà sans doute savoir qu'elle entretenait des relations douteuses avec Akira, mais pas qu'elle était aller aussi loin. La jeune femme fixa son regard calmement en attente d'un jugement :

« J'ai trahi pour un homme, pas pour la résistance. C'est ridicule, mais c'est inexplicable. Je peux vous aider. Mais j'ai besoin de votre plus grand silence et de votre compassion en échange. » avait-elle terminé dans un tremblement de voix qui traduisait combien elle craignait cette réponse qui allait survenir.

Arashi ne se souciait pas réellement de ce qu'on pouvait penser de lui, sa réputation ne reflète pas forcément l'homme qu'il est. Mais pourtant, entendre son second lui dire qu'elle le croit pour toute ces histoires ... Cela fait du bien, il faut bien l'avouer.

Il acquiesça d'un signe de tête, sa manière de la remercier pour l'attention qu'elle lu porte. Fate avait raison sur plusieurs points, le gouvernement est corrompu, beaucoup sont les ministres qui perdent leur confiance. A commencer par Nathan Suzaku .. Et même Iwa, Arashi était forcé de le reconnaître.

"Suzaku est aveuglé par son amour pour Lady Ilness, il perd en efficacité et surtout en réflexions."

Par là, le ministre parlait bien entendu de la balle qu'il avait reçu dans la jambe, dont le tireur n'était autre que Suzaku. Arashi ne peut croire qu'il l'ait confondu avec Akira. Il s'agit là d'une vengeance concernant le viol d'Ilness auquel il le croit responsable.

Mais par conséquence, les prisonniers sont les premiers à pâtir des décisions qui sont prises contre lui, à commencer par son frère d'après ce qu'il avait pu comprendre. Arashi croisa les mains. En fait, il n'était pas étonné que Fate soit en contact -informatique comme elle le disait si bien- avec Hadès. Et le fait qu'il soit désorienté par les conditions de sa libération ... Arashi était déjà en train de se faire tout un film dans la tête. Il secoua la tête, ce n'était pas le moment de se laisser aller, il devait se montrer lucide.

"Akira m'a également envoyé des mails." informa Arashi sans en dire d'avantage. Des mains où son frère lui demandait de l'aise, ce à quoi il avait refusé. Pourquoi changerait-il d'avis maintenant ? Il passa la main sur son visage, lassé par cette histoire qui durait depuis tant d'années et qui avait dépassé le stade de la querelle familiale. "Comprenez bien Fate, que je ne déteste pas mon frère. Si je pensais qu'il pouvait être sauvé, je l'aurais fait. Mais je connais Akira et ses grandes convictions. Il veut que je lui tende la main. Bien. Je peux le faire. Mais je sais aussi qu'il n'est pas raisonnable. Cet instant de faiblesse ne va durer et dès qu'il pourra de nouveau nous tourner le dos, il le fera. Je sais comment il fonctionne. Faites un pas en avant pour lui et il en fera deux en arrière. Je ne peux plus rien pour lui. Malgré ce qu'il dit, Akira ne veut pas être sauvé."

Arashi avait conscience que ses paroles pouvaient être cruelle, mais c'était pourtant ce qu'il pensait. Et pourtant une fois encore, il ne pouvait pas se résoudre à tout simplement abandonner.

"Mais je lui donnerais une dernière chance s'il le faut. Mais j'ai bien peur que cela le mène droit à la mort. Akira ne sait être raisonnable."

Fate lui avoua avoir déjà rencontré Akira par le passé et qu'elle ne l'avait pas arrêté alors qu'elle était dans les capacités -et le devoir-. Ses liens étroits avec lui l'en avait empêché. Il la regarda un instant, alors qu'elle tremblait, craignant la réaction de son supérieur. S'il avait été prit au dépourvu, Arashi aurait pu très mal réagir. Et pourtant, un fin sourire étira ses lèvres l'espace d'une demi seconde avant de revenir à son calme habituel.

"Cela fait longtemps que je le sais. Mayu Rokudo vous surveille depuis pas mal de temps, pour moi." Avouer qu'il avait envoyé le collègue de la jeune femme la surveiller ... C'était un peu moche mais bon, ils ont tous leur secret. "Rokudo qui est le frère jumeau de la jeune Elliana que mon frère a adopté. Curieuse famille n'est-ce pas ? Je ne me suis pas opposé à votre relation avec mon frère, parce que -outre le fait que vous ne l'avez pas arrêté- vous restez efficace dans votre travail. C'est aujourd'hui tout ce que je demande."

Aujourd'hui oui. Quelques temps plutôt, Fate aurait passé un sale moment, mais il faut croire qu'Arashi s'adoucissait cela la personne et la situation.

"Aujourd'hui, vous êtes ma seule alliée, alors je peux bien .... tolérer certaines choses. Et vous avez raison, Iwa ne peut rester première ministre. Elle n'en a plus les capacités. Son inefficacité risque de faire chuter le gouvernement. Et c'est quelque chose dont on ne peut pas se permettre, si nous restons fidèle aux idéaux de Kira."