Je ne suis pas un gentil garçon ! [Pv : Yuno]

C'était une belle soirée, enfin, c'est ce que n'importe qui d'autre aurait dit. Le ciel était noir, tâché d'étoiles, le vent était frais, on sentait venir l'été doucement, blablabla. Crazy Snake s'en moquait éperdument, il y aurait pu pleuvoir des grenouilles, ça n'aurait rien changé. Là, il était sérieux, en apparence ; il s'agissait du « boulot ». Pas celui où il réussissait le moins, où il fallait se montrer poli avec autrui, souriant (beurk !), et avenant. Non, c'était son « vrai travail », celui où il était le moins regardant niveau fric. Pourtant, le borgne était loin d'être en avance. On lui avait donné rendez-vous dans un endroit bien précis, là où il n'y aurait — à priori — aucun témoin.

Alors il avait mis beaucoup de temps pour s'y rendre : parce qu'il s'était perdu, et parce qu'il était venu à pieds. Heureusement pour lui, sa réputation l'avait précédé. Il était suffisamment précieux pour ses employeurs, on l'avait attendu. Les mains dans les poches, il avançait péniblement dans l'obscurité, même si les lampadaires éclairaient sa route, les lumières l'éblouissaient. Une fois, il heurta sans la voir une poubelle. Une autre fois, il manqua de se faire écraser par une voiture qu'il avait entendue, mais pas écoutée.

Au bout d'un moment, il alluma une cigarette, en cherchant dans son cerveau calciné tous les détails qu'on lui avait donnés. Ce fut lorsqu'il arriva d'abord devant une maison de retraite « les fleurs jaunes » qu'il comprit qu'il s'était trompé. Mais où ? Dès le début ? Ou à une bête rue ? Même s'il aurait trouvé ça drôle de comploter dans un hangar à vieux. Finalement, Crazy Snake retrouva le chemin, notamment grâce à un — miraculeux — coup de téléphone salvateur. L'homme qui l'avait appelé semblait à peine en colère, il avait lâché : « après tout, il est aussi connu pour ça », puis faisant preuve d'une incroyable patience, il lui avait TOUT décrit pour le voir arriver vingt minutes plus tard.

Ce qui paraissait être le chef le salua d'un signe de la main, Crazy Snake haussa les sourcils en signe de salutation, chose qui lui demandait un haut degré d'effort dans l'évolution humaine. Le chef — donc — se présentait comme un Japonais ayant l'air du père de famille parfait ; moins grand que lui, il avait les joues rondes, le nez écrasé, les yeux bridés, et un sourire perfide. Il était habillé dans un costume — plus cliché, tu meurs —, et portait une bague en or au petit doigt. Il était encadré par deux hommes gigantesques, et par une charmante jeune femme. Elle aurait pu plaire à Crazy Snake, si elle n'avait pas été si... Japonaise, et donc... si plate. Elle lui lançait un regard particulièrement hautain, auquel il répondit par une grimace. Elle était élégante, on aurait pu la prendre pour une secrétaire. Le Chef lança :

« C'est bizarre, je ne vous imaginais pas comme ça, Crazy Snake.
— Ah... »

Le borgne avait l'habitude d'entendre ça, personne n'imaginait qu'il était ce Crazy Snake. Il ne se tenait pas droit, ses cheveux longs et roux tombaient sur ses épaules, et les taches de rousseurs sur son visage le rajeunissaient. On aurait pu le prendre facilement pour un jeune homme de vingt-deux ans, alors qu'il en avait vingt-sept. On savait que c'était lui, car il correspondait parfaitement à la description qu'on faisait de lui : un type mince, roux, et borgne. Le dernier point était important. Sans ça, il n'était pas certain qu'on l'aurait cru. Il avala sa salive, toujours occupé à fumer.

Le Chef — Yamato — lui parla, beaucoup, et ô drame ! Il utilisa plus de dix mots dans sa phrase, ce qui était bien trop pour Crazy. Non... il ne fallait pas lui expliquer à quel point leur action était importante, et que c'était pour montrer au camp de Machin que c'était eux qui possédaient des testicules aussi gros et lourds que des boules de pétanque. Ça... Crazy Snake s'en fichait, son cerveau s'était arrêté à « on a besoin de vous pour poser vos explosifs dans les locaux ». Il n'y avait que ça qui l'intéressait. Tout ce qu'il espérait, c'était qu'il y aurait des morts ; s'il s'agissait de faire exploser un truc sans rien, ça ne l'intéressait pas.

Yamato faisait tant d'éloges à son sujet, que Crazy Snake avait la sensation qu'il bavait. Les éloges ? Ça ne marchait pas. Le Chaos, merde ! Le reste, il n'y prêtait pas attention. Et puis, il était au courant qu'il était l'un des meilleurs dans son domaine, qu'il était classé au Cavalier Noir (classement qu'il n'avait pas encore vu), et que ses exploits avaient fait couler beaucoup d'encre. Mais pas assez encore au Japon.

« Mais... allons discuter de tout ça à l'intérieur. »

Crazy haussa les épaules, il ne faisait pas attention à ce genre de détails. Si on chopait Yamoto, il crierait qu'il était innocent, ce genre de choses. L'homme entra dans un entrepôt désinfecté situé quelques mètres plus loin. Le borgne le suivit, isolé, même si les hommes de Yamato le surveillaient. Il n'entra pas tout de suite, s'allumant d'abord une nouvelle cigarette. Il s'apprêta à en avaler une bouffée, lorsqu'il entendit quelque chose. Les hommes de Yamato ne s'en aperçurent pas tout de suite ; il était le seul à avoir capté le bruit. Haussant les sourcils, l'homme regarda autour de lui, il ne songea pas que ça devait être un chat, un étudiant, ou un clochard pour se retourner, il était curieux, soudain. Il s'éloigna un peu pour chercher la source du bruit, il tourna à gauche de l'entrepôt, et tomba nez à nez avec une jeune femme. Il comprenait moins qu'elle ce qu'elle foutait ici. Un air abruti collé sur sa face blanche, il fit :

« Euuh... »

Invité

FINI !!! ENFIN !!!

Cela faisait des heures que tout le monde avait quitté les bureaux, Yuno était resté toute seule pour boucler un article et ça n’avait rien de rassurant. Elle était toute seule dans les bureaux déserts d’un journal que tout le monde n’appréciait pas forcément, il allait falloir qu’elle rentre toute seule, à pieds parce qu’elle avait oublié sa carte d’abonnement des transports en commun chez elle… et elle avait peur de croiser Nightmare quelque part. Il aurait été capable de se terrer derrière la porte de son bureau pendant tout ce temps juste pour avoir la satisfaction de lui faire friser la crise cardiaque… rien que de penser à lui, Yuno frissonna de dégoût.

La jeune fille repoussa ses longs cheveux roux derrière ses épaules et poussa un soupir. Il fallait encore qu’elle range quelques trucs, et elle pourrait s’en aller. Elle en profita pour récupérer son gilet, les nuits étaient encore très fraîches.

Une fois que tous fût bouclé, la jeune fille ferma son bureau à clef ainsi que l’entrée principale du Cavalier Noir, puis sorti. C’était une jolie nuit : un beau ciel dégagé avec plein d’étoiles qui scintillaient doucement malgré les lueurs de la ville, une petite brise agréable bien que trop fraîche pour se passer de son gilet et, par-dessus tout, encore une certaine animation dans les rues. Soulagée de ne pas être seule et sans défenses, Yuno passa s’acheter un onigiri aux légumes grillés et se mit à le grignoter tranquillement tout en dégainant son téléphone portable. Il était très tard, trop tard pour téléphoner chez les gens normalement, mais Yuno savait que ses parents ne seraient pas encore couchés.

- Allo… Maman ?

Entendre la voix de sa mère fit un coup au cœur de la jeune photographe, et ses yeux s’emplirent de larmes. Elle lui manquait, son père lui manquait, son village natal lui manquait. Elle discuta longtemps avec eux tout en marchant sans se presser, leur racontant la ville pendant qu’ils lui parlait de la campagne, ils s’amusèrent à comparer les rythme de vie des deux Yuno, celle de la campagne qui se levait tard et passait la journée à travailler tranquillement en s’arrêtant pour contempler les papillons, et celle de la ville qui bossait comme une folle, avait peur de beaucoup de choses et faisait beaucoup trop les boutiques… mais même, dans le fond, elle préférait la campagne, Yuno n’aurais jamais changé d’avis. Elle avait décidé de vivre à Tokyo et elle y resterait. Elle ne pouvait pas faire ce travail à la campagne, et il lui plaisait. Même si c’était dur, stressant et même effrayant à cause de certaines personnes… Et puis la campagne n’offrait ni autant de boutiques de vêtements, ni autant de salons de coiffure. Il était impensable de passer de tout à rien comme ça.

- Pour mes prochains congés je viendrais passer quelques jours à la maison… Oui c’est promis maman. Bonne nuit !

Elle raccrocha et glissa son téléphone dans son sac en relevant le nez avec un petit sourire… qui se figea. Où était-elle ? Elle ne connaissait pas cette rue, il y avait des bâtiments visiblement désaffectés, des entrepôts, des immeubles rien moins que glauques…

Après avoir cédé à la panique pendant trente secondes, elle sécha ses joues et prit une grande inspiration. Elle se détailla de haut en bas : tunique flottante sans manches, blanche avec un décolleté léger, pantalon gris en lin, tennis blanches. Bon… rien de très sexy, au moins ne se ferait-elle pas violée pour cause d’ « allumage intensif », c’était déjà ça de gagné. Elle avait une bombe au poivre dans son sac, elle la prit et la serra fermement dans sa main. Cela ne la sauverait peut-être pas si une bande de yakuza lui sautait au visage, mais elle aurait au moins la satisfaction d’en avoir rendu un ou deux complètement aveugles.

Déambulant au hasard pour essayer de retrouver son chemin, la jeune fille finit par entendre des voix. Soulagée au possible, elle failli se précipiter vers les sons salvateurs, prête à enlacer ceux qui les émettait… puis elle se retint. A cette heure-ci et dans cet endroit, elle avait plus de chance de tomber sur des voleurs-violeurs-tueurs que sur des gentilles ménagères sorties promener leur chien Titus.

En s’approchant, elle remarqua qu’elle avait raison. Les types avaient tous des têtes de truands, il y en avait même un à qui il manquait un œil. Elle recula. Cachée derrière un mur, elle serrait sa bombe au poivre beaucoup trop fort pour que cela puisse paraître être de la tendresse, et tremblait de tout son corps… quand soudain, l’illumination se fit. Si elle mettait le doigt sur quelque chose, qu’elle prenait de bonnes photos et de bonnes notes, Day pourrait faire un bon article et elle l’autoriserait à faire son article sur les ours polaires !!!

Elle attrapa son appareil photo dans son sac et sorti le plus discrêtement possible de sa cachette… pour se retrouver nez à nez avec « Œil en Moins »…

Choquée, elle resta immobile pendant quelques instants, le fixant bouche bée… puis elle lui adressa le sourire le plus flippé de tous les temps.

- J… Je… bonsoir je… euh… me suis perdue ! Oui voilà je me suis perdue et… euh… vous sauriez comment retourner en direction du centre ville ?

Elle essaya de ranger son appareil, mais son sac tomba par terre. Elle se retrouva debout devant un truand, un appareil photo en main et une bombe au poivre dans l’autre. Elle regarda les deux, le type, la bombe, le type… et se mordilla la lèvre.

- Vous allez pas me tuer hein ?

« Bah... honnêtement, j'en sais trop rien. »

C'est ce que le borgne avait répondu, lorsque la jeune fille lui demanda s'ils comptaient la tuer. Elle s'était perdue ? Bah voyons... Crazy Snake n'était pas l'homme le plus intelligent du monde, mais il savait reconnaître un mensonge. Il repéra vite la bombe au poivre qu'elle tenait dans sa main tremblante, et l'appareil photo, c'était ça qu'il avait dû entendre. Soupirant, il avala une bouffée de cigarette, tout en réfléchissant à la situation. Qu'allait-il faire ? Ce n'était pas de son ressort, pas vraiment. Néanmoins, il y avait une gamine effrayée comme un chaton qui l'avait espionné, en train de comploter avec le clan Yamato. Il ne pouvait pas la laisser s'enfuir, c'était trop dangereux pour sa couverture ; si elle cafetait aux flics le peu de choses qu'elle avait vues, il serait dans une belle merde. Malheureusement dans cette société conformiste, il ne passait pas assez inaperçu, il serait facile de retrouver un émigré roux, et borgne. Avant même qu'il ne puisse ajouter quoi que ce soit, Monsieur Yamato arriva, interpellé par son absence. Le Japonais baissa aussitôt les yeux sur la petite fouine, sans réagir, ni même changer d'expression. Crazy lâcha :

« Un endroit où y aurait pas de témoin, hein ? J'crois qu'on a un souci. »

Le plus drôle ? C'était que vu comme la petite avait peur, Crazy Snake finit bien par croire qu'elle se fut paumée. MAIS elle avait un appareil photo sur elle, peut-être avait-elle pris un cliché d'eux ? Monsieur Yamato appela l'un de ses hommes, la petite n'allait pas passer un moment agréable. Le borgne s'écarta, il observa le mastodonte assommé d'un seul coup de poing la demoiselle. Effectivement, elle ne passerait pas un moment agréable. Il n'avait pas spécialement envie d'échanger sa place avec elle.

Une heure plus tard, Crazy écoutait d'une seule oreille ce que Monsieur Yamato racontait. Dans l'entrepôt, le vieux s'était posé contre une table, les bras croisés, il expliquait à quel point il reconnaissait son talent. Crazy Snake était occupé à fouiller l'appareil photo de la jeune fille, afin de vérifier qu'il n'y avait rien de compromettant. Celle-ci avait d'ailleurs été solidement attachée à une chaise, les yeux bandés, et dépouillée de tout objet personnel. Quand il termina avec l'appareil photo, il regarda son téléphone portable, puis sa carte d'identité. Yuno Hurano ? Un nom japonais qui ne collait pas vraiment à son apparence. Elle était plus jeune qu'il ne l'avait pensé, mais il comprenait l'effroyable naïveté apparaissant sur son visage. Blasé, Cray songea qu'elle n'était qu'un contretemps, s'il devait s'occuper de son cas, il ne pourrait pas anéantir les rivaux des Yamato rapidement. Le carnage arriverait en retard. S'il y avait bien une chose pour laquelle il était toujours à l'heure, c'était pour le Chaos, il préférait que ce soit la même chose dans l'autre sens. Il avala sa salive ; il n'aimait pas les jeunes. Vraiment pas.

« Et sinon ? Que va-t-on faire d'elle ? La tuer ? Après tout, elle a été témointe de notre rendez-vous. Déclara Monsieur Yamato. Qu'en pensez-vous ?
— Hum... »

Pourquoi Yamato lui demandait son avis ? Est-ce qu'il avait l'air d'être quelqu'un qui avait un avis sur tout ? Ça ne le dérangeait pas que la petite meure, ça lui ferait du travail en plus. Il n'était pas nettoyeur, encore moins tueur en série. Si ça avait été lui, il l'aurait jeté directement dans la baie de Tokyo, une bombe attachée à sa ceinture. Enfin... peut-être qu'il pourrait s'amuser un peu ? Après tout, Yuno paraissait être le genre de personnes qui avaient le don incroyable de l'énerver. Une fille douce, naïve, pleurant après sa maman... bah. Rien que d'y penser, un frisson de dégoût courait sur son échine. Alors qu'il s'allumait une nouvelle cigarette, il proposa :

« Et pourquoi pas une demande de rançon ?
— Et si elle raconte tout ce qu'elle a vu à la police, quand même... ?
— On peut prendre l'argent, sans être obligé de rendre la fille. »

Ouah... ça c'était du criminel classe, non ? Si Maria l'avait entendu dire ça, elle l'aurait exécuté sans attendre. La carte d'identité de Hurano dans la main, il s'avança vers elle. Il ignorait si elle avait repris connaissance. Il s'accroupit devant elle, fixant son visage. Décidément, il n'aimait pas les fifilles. Crazy Snake essayait de se mettre à sa place, ce qu'elle ressentait, si la peur lui dévorait le ventre ou non. Un rictus cruel se dessina sur sa face, il approcha ses doigts de sa joue, mais ne la toucha pas. Il lui tira légèrement les cheveux, comme pour attirer son attention, puis il lança sur un ton moqueur :

« Hé ! Mam'zelle, tu penses que ta vie coûte combien ? Autant que la mienne ? »

[HJ : je me suis permise de prendre quelques libertés, si ça te gêne, je changerais]

Invité

Yuno vit le type s'approcher, lever son poing et... et plus rien. Elle n'avait eu le temps ni d'avoir mal, ni même de penser à la bombe qu'elle serrait dans sa main. Ses colocataires allaient moyennement apprécier de savoir qu'elle avait eu l'occasion de se servir de cette bombe et qu'elle n'en avait pas profité. Se sont eux qui la lui avaient offerte quelques mois auparavant quand elle s'était faire agresser à un distributeur automatique. Rien de grave, le type l'avait même pas touchée, mais il avait prit son argent et lui avait fichu la trouille de sa vie.

Quand elle finit par émerger, la première chose qui la frappa fut l'affreuse douleur qui pulsait dans son crâne. Elle avait l'impression d'avoir la même migraine qui la terrassait quand elle avait ses règles, mais encore plus forte que d'habitude.

Elle avait peur d'ouvrir les yeux, peur que la lumière lui fasse encore plus mal à la tête... et puis elle senti le bandeau sur ses yeux et se dit que la question était réglée. Vint après la sensation des cordes qui l'immobilisaient sur une chaise... avec cette sensation là, vint la panique.

Elle était attachée... pourquoi ? Par qui ? Est ce qu'on l'avait violée ? Un rapide examen intérieur lui apprit que non, parce qu'elle aurait probablement eu mal ailleurs si ça avait été le cas. Elle décida de rester immobile et de faire comme si elle était toujours assommée... assommée ? La mémoire lui revint d'un coup. Le coup de téléphone à sa mère, la déambulation inconsciente en ville, la rue bizarre, les bâtiments désaffectés, le roux, l’œil, l'autre type, le coup le poing... et la bombe au poivre.

Si seulement elle avait eu la présence d'esprit de s'en servir au lieu de simplement la serrer dans sa main... elle aurait pulvérisé l'oeil du rouquin et se serait enfuie en courant, et là elle serait tranquillement chez elle en train de raconter toute cette histoire à ses amis. Et non... à la place elle était ligotée fermement sur une chaise hyper inconfortable à écouter des truands qui se demandaient s'ils devaient la tuer ou non, et si oui, devaient-ils le faire maintenant où attendre qu'on ai donné de l'argent pour la sauver.

Une rançon ? Pour elle ? Yuno en fût presque flattée pendant un demi-millième de seconde, mais la panique est plus forte que la fierté dans ce genre de situation, et elle préféra recommencer à trembler plutôt que de se rengorger tranquillement. « Un temps pour tout » disait toujours sa mère, « un temps pour tout »... et là il était nettement plus temps de flipper que d'être fière. Un enlèvement, des cordes, une chaise, une rançon, un meurtre très probable... non vraiment, elle passait une soirée fabuleuse. Des larmes de peur et d'impuissance coulaient sur ses joues, imbibant à demi le bandeau qu'on lui avait plaqué devant les yeux.

En plus il voulait savoir à combien elle évaluait sa vie. Franchement pour elle, ça n'avait pas de prix, elle adorait vivre, même si c'était difficile des fois. Ne serait-ce que parce que si elle mourrait, elle ne verrais pas sortir les prochaines modes vestimentaires... Mais en même temps, Day finirait sûrement par la renvoyer si elle devait avancer des sous pour qu'elle vive... et si elle ne le faisait pas, Nightmare lui mènerait une vie encore plus infernale que jusqu'à présent... Non !!!

- Je... rien, je suis personne moi juste une petite photographe qui s'est perdue...

« Si t'es rien, autant te tuer, nan ? »

Ce qui l'arrangerait : moins d'efforts à faire, moins de temps à perdre. Niveau qualité et prix, c'était ce qu'il y avait de mieux ! Mais Crazy Snake ne savait pas exactement tuer quelqu'un ; même s'il avait sur le dos une montagne de cadavres, il n'avait jamais exécuté personne. Il avait déjà pointé une arme sur autrui, son doigt n'avait jamais poussé sur la détente. Et quand il s'était occupé de « l'amant » de Maria, il lui avait remis un colis piège, classique et efficace. Il préférait faire exploser les gens, plutôt que de les torturer pendant des heures, il était un homme d'action avant tout. Des larmes apparaissaient sous le bandage, de quoi élargir son rictus.

Le borgne songea que Yuno était bien fragile, il ne se rappelait pas d'avoir pleuré, quand on lui avait enfoncé un couteau dans l'oeil. Elle pleurnichait pour si peu ? Ah ! Elle n'était pas au bout de ses peines, il détestait les petites choses faibles, dont il fallait s'occuper, comme d'un hamster. Il se releva, il enleva la cigarette de sa bouche, et il examina Monsieur Yamato qui était lui-même en train de l'observer. Le Japonais paraissait attendre une autre idée de sa part, suivant Crazy Snake, sauf que Crazy Snake n'était pas le genre de type à pouvoir diriger les autres. Il peinait à s'occuper de lui, alors d'un groupe !

« On devrait commencer à écrire la lettre, Monsieur Cra...
— Ne dites pas mon nom, on sait jamais. »

Rah ! Pour une fois qu'il se montrait intelligent ! Mais c'était pour des choses évidentes, malheureusement. Crazy Snake était étonné de la candeur de Yamato, dévoiler son nom, comme ça ! C'était stupide, lui-même ne ferait pas cette erreur. Il soupira, puis il s'adossa contre un mur. Nerveux, l'homme prit son briquet, il l'ouvrit, puis il le ferma. Il l'ouvrit, puis il le ferma. Pourquoi Yamato faisait autant de bêtises ? Il l'ouvrit, il le referma, en niant le regard haineux que lui envoya la secrétaire. Des amateurs, ce n'était que des amateurs. Il serra les dents. Crazy Snake s'avança de nouveau vers la jeune fille, sa mauvaise humeur ne dura qu'une poignée de seconde, et la joie revint vite. Il lui attrapa les cheveux, sans pour autant les tirer, il lança :

« On va jouer à un jeu, ma petite Yuno. Tu vas répondre à mes questions, et si elles ne sont pas satisfaisantes, tu gagneras une baffe ! »

Néanmoins, avant même d'ouvrir la bouche, Crazy lui envoya une claque. « Comme ça », sans raison, juste parce qu'elle l'emmerdait. Il n'avait pas frappé trop fort, pas assez pour la faire tomber dans les vapes, mais suffisamment pour faire basculer sa tête sur le côté. Il était ce genre d'homme, ceux capables de lever la main sur une femme. Mais il ne faisait pas ça par plaisir, il traitait — simplement — les hommes et les femmes sur un même pied d'égalité. Après tout, ne s'étaient-elles pas battues durant des décennies pour ça ? Il ne faisait que répondre à leurs attentes. Ça serait ce genre de logique qu'il donnerait, si on lui disait que son comportement était affreux, et digne d'un salaud. C'était un salaud, il le savait. Ça ne changerait pas.

Crazy Snake cracha de la fumée sur le visage de Yuno, vraiment... toute cette gentillesse, ça puait tellement que ça lui tournait la tête.

« Alors ? On travaille pour qui ? Ça fait combien de temps qu'on a quitté Papa et Maman ? Je suis sûre qu'on adore les chatons, en plus, j'ai raison ? »

Crazy Snake cachait difficilement ce qu'il ressentait, sa voix tremblait, comme s'il se retenait de rire. Il était plutôt confiant sur sa rapide analyse : Yuno avait tout de la gamine bien propre sur elle, à aimer les feuilletons, et à pleurer devant des dramas. Avant qu'elle ne réponde, il s'apprêta à la frapper encore, mais Yamato intervint en prétextant qu'il ne faudrait pas l'abîmer. Quoi ? Même pas un petit peu ? Si Yuno revenait vivante de leur rencontre, Crazy Snake aurait adoré laisser une marque, sa marque. Afin de lui rappeler qu'il était un cauchemar, susceptible de revenir la hanter jusqu'à la fin de ses jours. Il grogna, puis il lâcha qu'il savait ce qu'il faisait.

« Vous faites chier ! Si vous avez jamais enlevé qui que ce soit, laissez-moi avec elle. J'vous promets que je lui ferais rien... de trop méchant. »

Sa voix résonna dans tout l'entrepôt, frappant les murs, il s'entendit même. Ce qui lui déplut, Crazy Snake aimait peu de choses chez lui, il supportait ses cheveux roux... et encore, parce que ça ressemblait au feu, et qu'il adorait le feu. Il émit un nouveau grognement, puis Yamato consentit à l'abandonner, mais pour une heure. Ses hommes garderaient l'entrepôt, pendant qu'il s'occuperait de ce « petit cadeau ». Pendant ce temps, Yamato et sa secrétaire iraient chercher des informations, une adresse, à qui envoyer la lettre de rançon, par exemple. Crazy Snake les fixa de son oeil bleu, brillant de colère, alors qu'ils quittaient la pièce. Lorsqu'enfin les portes de l'entrepôt se refermèrent, il se retourna vers Yuno. Durant une minute, l'homme ne bougea pas d'un pouce ; sa respiration était à peine audible, son corps était crispé. Finalement, il lâcha :

« On va changer de jeu, il fait chier. En fait, je me fous assez de ta vie. »

Si Crazy Snake possédait une seule qualité, c'était la franchise. Elle intervenait à n'importe quel moment, vive comme le vent, brûlante comme les flammes, et aussi lourde qu'une enclume. Quand bien même il faisait l'effort pour cacher ce qu'il pensait, il y avait toujours un moment où elle parvenait à s'extirper de sa bouche. Il se rapprocha de Yuno, il ne la toucha pas cette fois-ci, il croisa les bras. Il bâilla, il pencha la tête sur le côté sans trop savoir ce qu'il devait faire. Il pouvait se débrouiller, mais il ne s'était jamais retrouvé dans ce genre de situation. Il fronça les sourcils, son front se plissa, il fit :

« Pleurs pas, c'bon, on est tous seuls, si tu pleurs... j'te jure, je vais crever tes yeux. »

Crazy Snake détestait par-dessus tout les sanglots, à cause des cris suraiguës, perçant ses oreilles. Et aussi... parce qu'il... ça le mettait mal à l'aise, il ne savait pas pourquoi. Ça le touchait, en quelque sorte.

Invité

Autant la tuer ? Mais non au contraire, autant la laisser filer tranquillement ! En plus elle n'avait eu le temps de prendre aucune photo ! Elle avait envie de leur hurler ça, de le leur postillonner au visage même histoire que ça ait un peu plus d'impact, dans tous les sens du terme... mais sa voix restait bloquée par la boule qui lui serrait la gorge, une grosse boule d'angoisse qui menaçait presque de l'étouffer.

Elle, Yuno Hurano, une jeune fille sans histoires bossant pour un journal presque sans histoires, allait finir par se faire tuer par de dangereux criminels simplement parce qu'elle avait oublié de regardait où elle marchait en se baladant un soir dans la rue... avant même de savoir si le vert pétant était une couleur qui lui allait bien au teint où non !!!

La jeune photographe préféra ne rien dire pendant que les types discutaient entre eux, sa maman lui avait toujours dit qu'on évite de déranger des hommes qui parle, ça les met de mauvaise humeur, et elle avait besoin d'à peu près TOUT, sauf de mettre ces grands malades de mauvais poil. Ils risquaient de la mettre en pièce juste pour le plaisir, de la violer, de la manger même peut-être, on ne sait jamais avec les fous... et ces types étaient forcément fous, on ne parle pas de mettre fin aux jours de quelqu'un qu'on ne connait pas avec autant de facilité si on est totalement sain d'esprit non ? Il faut avoir perdu son humanité en route pour pouvoir être aussi à l'aise avec la mort de toute façon. En tout cas Yuno se considérait comme beaucoup trop humaine pour plaisanter avec eux de sa propre cessation d'exister... et puis le thème de la conversation l'amusait moyennement à vrai dire. Elle se serait sentie vachement plus joyeuse s'il avait été question de sa libération en fait... mais ça ne semblait pas être à l'ordre du jour.

Le type borgne, elle reconnaissait sa voix, parlait de jouer à un jeu de questions réponses avec baffes à la clefs si elle ne donnait pas les réponses appropriées... mais il ne jouait même pas selon ses propres règles étant donné qu'il avait décidé de lui baffer gratuitement la gueule avant même qu'elle n'ai pu répondre à sa première question... PIRE !!! Avant même d'avoir posé la moindre petite question ! Même pas une question préliminaire non, BIM, à sec, dans ta gueule, prends ça c'est gratuit !

Surprise, la jeune fille laissa échapper un petit gémissement où se mêlaient la douleur, la surprise, le choc et l'injustice flagrante. Elle failli lui hurler qu'il trichait... mais réussi à se retenir au dernier moment en se mordant la lèvre. En plus, cela passerait pour un mordillage d'empêchage de sanglotage et il n'y verrait que du feu.

Elle se redressa mollement en secouant un peu la tête pour remettre ses idées en place, il n'avait pas frappé assez fort pour qu'elle parte en vrille, mais bon ça n'était quand même pas super bien rangé là haut. Mais ça se remit en place rapidement et elle entendit, et compris, très clairement les questions qu'il se décida enfin à lui poser, sans l'agrémenter de torgnoles gratuites supplémentaires... connard...

Et là... SHLAAAA ! Tripotée de questions, cascade d'interrogations qui douchèrent l’enthousiasme déjà discutable de la petite rouquine. C'était juste trop, le temps qu'elle prépare sa réponse pour la première question elle avait déjà oublié la suite. C'est con quand même... est ce qu'il allait lui retirer des points ? Euh... Lui donner des claques ? Elle se mit à réfléchir intensément pour ne pas s'en faire coller d'autres, ça faisait mal quand même (ce type était une sale brute), et de ne pas vendre d'informations trop importantes non plus... pas que sa vie soit fascinante ou quoi, mais s'il demandait une rançon à Day, elle se ferait défoncer la tête en rentrer, voir pire... engueuler par Nightmare !

De toute façon, les mecs parlaient logistique. Elle entendit vaguement qu'elle allait finir par être toute seule avec le cinglé borgne, mais cette idée la révulsait tellement qu'elle préféra la ranger dans un coin obscur de son esprit histoire de ne pas se faire pipi dessus avant même que les véritables hostilités ne commencent.

Elle pleurait toujours.

Quand il parla à nouveau, elle comprit qu'il voulait "changer de jeu"... mais il ne donna pas les nouvelles règles, ce qui la paniqua encore plus. Elle devint extrêmement consciente du fait que toutes les autres voix, tous les autres bruits avaient réellement disparus... merde... elle était finalement bien seule avec ce malade... En plus il voulait qu'elle arrête de pleurer, plus facile à dire qu'à faire !!!

Au prix d'un effort colossal, elle réussi à arrêter de sangloter, et le flot de ses yeux se calma aussi. Pas complètement, mais presque. Comme elle avait pas mal réfléchit à ses questions et qu'il restait silencieux, elle se dit qu'il avait peut-être changé d'avis et qu'il voulait qu'elle réponde quand même... du coup elle se mit à parler très vite, en essayant de reculer (en vain, évidement).

- J... J'étudie la photo... depuis trois ans... oui mais je préfère les poussins !

Elle haletait un peu après cette déclaration qu'elle avait eu l'impression de lui hurler au visage alors qu'elle n'avait fait que murmurer...

« Hein ? »

« Hein » se répéta dans son crâne ; il avait bien entendu ? Yuno lui avait vraiment répondu ce qu'elle venait de répondre ? Pendant au moins trente secondes, Crazy Snake laissa un silence lourd de surprise. Il n'avait rien compris, mais alors rien compris du tout. Elle préférait les poussins ? Elle préférait les poussins à quoi ? Il tira sur sa cigarette, il s'efforçait de saisir. La gamine le prenait pour un con ? Il n'était pas certain de ça, après tout, sous l'angoisse, elle pouvait bien avoir bafouillé. Il soupira, puis il frotta son front, il était crispé. Mine de rien, il avait eu une journée difficile, la fatigue lui arrachait les nerfs. Et il devrait se lever le lendemain, ça le faisait chier par anticipation. Cette petite conne lui volait ses heures de sommeil, c'était impardonnable !

Crazy bâilla, sans aucune retenue, fixant Yuno avec un air blasé. Elle était mignonne, s'il avait été plus jeune, il aurait peut-être tenté de se la taper... quoique... non. Elle était rousse — aussi —, et ça lui aurait donné l'impression de baiser avec lui-même. Rien que d'y penser, le borgne sentait des frissons de dégoût lui courir le long du dos. Malgré tout, elle était rousse, il ne savait pas si c'était sa couleur naturelle ou non, mais Yuno était rousse. Happé par cette réflexion, Crazy Snake ne remarqua pas que la jeune fille cessait de pleurer. Il avala une bouffée de nicotine, il se pencha vers elle, et il l'observa en détail. Les sourcils froncés, il s'avoua qu'elle avait plutôt une jolie peau pour une rousse. Contrairement à lui, qui depuis toujours se coltinait des taches de rousseur, un teint blafard, et des cernes sous les yeux — sous l'oeil plus précisément —. Elle avait des cheveux plus beaux que les siens, aussi, plus entretenus surtout. Il en était presque jaloux !

Crazy Snake se releva, puis il s'éloigna d'un pas. Il ralluma son briquet, un instant, il observa la flamme. Une belle flamme, douce, ondoyante, attirante. Il referma son briquet, il le rouvrit aussitôt, fasciné par la mort et la naissance de la flamme. La chaleur de celle-ci effleurait son visage, il la rapprocha pour la contempler. Une superbe flamme, qui ne demandait rien pour grossir, s'épanouir, et devenir plus magnifique encore. Il rapprocha son doigt, comme pour toucher le corps d'une femme, mais il s'arrêta au dernier moment. Comme la femme qu'il avait adulée, la flamme restait inaccessible pour lui. Ça l'enrageait.

L'homme mouilla ses lèvres.

« Hey Yuno, pour une Japonaise, t'as dû en entendre des conneries sur tes cheveux ? Non ? T'es sûre que ta mère a pas couché avec le postier ? »

Bah quoi ? Crazy pouvait bien se le demander ! Il s'avança vers la jeune fille, il prit entre ses doigts minces quelques mèches de ses cheveux. Vraiment, elle avait une chevelure rousse plus jolie que la sienne. Pourquoi lui volait-on toujours ses qualités ? Ça le rendait malade. Il ralluma son briquet, la flamme... il l'adorait. Dès qu'il la voyait, il sentait son cœur battre plus fort dans sa poitrine, ça le grisait ! Et quand le borgne regardait Yuno, une pulsion agressive explosait dans son crâne. Il détestait les gamines, surtout les gamines comme elle. Pourrie-gâtée par la nature, par papa, par maman, par mamie et papi. Habituellement, c'était le genre de fille que les garçons voulaient protéger. Pour lui, c'était le genre de fille qu'il avait envie de faire pleurer, de faire crier, de faire souffrir. Si seulement... si seulement il avait eu les ongles un peu plus longs et durs, il aurait pu les planter dans sa peau blanche et tendre, la lui arracher pour voir la laideur de son âme. C'était pas son genre, pourtant, de vouloir lacérer les gens... non. Ce qu'il aimait ? Le feu. Ce qu'il adorait ? Les explosions. Ce qu'il voulait ? Le Chaos.

Un sourire apparu sur le visage de Crazy Snake. C'était le sourire craint de tous, le sourire témoignant de sa bonne humeur. La rage s'était envolée. À la place, un rictus mauvais et railleur grandissait. Il souffla du nez, il n'éclata pourtant pas de rire. Il prit Yuno par la gorge afin de la forcer à lever la tête. Il la tenait fermement, son haleine puait la cigarette. Il prit une profonde inspiration, sentant pénétrer dans ses poumons l'odeur de la fumée, et le parfum de la jeune fille. Malheureusement, ce qu'il préférait, c'était l'arôme de cochon grillé qui caractérisait les corps calcinés. Ces cheveux roux, ça l'énervait. Il avait envie de les lui arracher, mèche par mèche, mais... mais non. L'idée traversa son esprit, elle mourut vite dans le néant. Un ricanement rauque sortit de sa gorge.

Quand il rouvrit le briquet, Crazy Snake songea que la flamme se mariait parfaitement à la couleur des cheveux de Yuno. Même mieux qu'à lui. C'était plus rouge, plus profond, plus chaleureux. Lentement, le borgne rapprocha le briquet des cheveux de Yuno, il riait par avance. Un gloussement secouait son corps, alors qu'il imaginait déjà la chevelure de Yuno prendre feu. Elle allait crier de peur ! Pisser sur elle, sans doute. Et puis, il ne verrait plus ce roux, il ne resterait que des poils misérables, se battant pour exister sur le crâne de la gamine. Ça lui apprendrait à être aussi... naïve !

« T'as déjà joué avec le feu, Yuno ? Moi, j'adore ça. »

Oh oui... Crazy Snake adorait ça. Plus que fumer, plus que baiser, il adorait le feu ! Il adorait tout faire péter ! Ce qu'il préférait ? C'était quand le monde volait en éclat, après un splendide « BOUM ». Les bâtiments, les gens, la vie. Le borgne peinait à se contenir, il rapprochait le briquet. Comment allait-elle exploser ? Il voulait savoir. Il voulait rire de sa peur. Il voulait voir le monde brûler. Il voulait immoler cette insupportable gamine rousse.

Invité

Yuno eut un moment de réflexion quand elle se rendit compte qu'il n'avait pas compris un seul mot de ce qu'elle avait dit... à part "poussin" probablement, c'est à dire le mot dont on se fichait en fait. Avait-il oublié les questions qu'il lui avait posé ? Avait-il décidé de jouer les idiots ? Peut-être même était-il simplement un gros con, allez savoir. En tout cas il était trop tôt pour s'en rendre compte. Par contre, Yuno avait prit une grande décision : il fallait qu'elle s'en sorte vivante, quelle que soit la technique à utiliser... même si tout bien réfléchit, elle n'avait pas non plus envie de proposer son corps à ce cinglé... il ne saurait sans doutes pas vraiment quoi en faire de toute façon.

Tant pis, elle obéirait au doigt et à l'oeil, même s'il lui demandait de faire la poule et de sautiller sur place en se rongeant les orteils, tant pis. Elle devait vivre : elle n'allait quand même pas crever en étant habillée aussi simplement et sans avoir teint ses cheveux, ça serait un affront à sa propre personnalité !

D'ailleurs, à propos de cheveux, elle ne comprenait pas pourquoi il la vannait sur la couleur de ses cheveux... après tout il était roux lui aussi. Du coup elle préféra ne pas répondre, il attendait peut-être qu'elle le fasse, où alors pas comme la fois d'avant... Yuno était complètement perdue mais au moins, elle avait arrêté de chialer. Elle ne savait pas comment réagir et ça l'angoissait. Elle avait vu tout un tas de film où des gens se faisaient enlever, avec des demandes de rançons et tout, des films où ils mourraient, d'autres où ils étaient relachés, elle avait même vu un reportage une fois sur des journalistes qui avaient été séquestrés pendant des mois, et même des années dans des pays horribles, comme la Colombie par exemple... mais ça avait toujours un certain impact politique, là non. Personne ne savait qu'elle travaillait au Cavalier Noir, et de toute façon ce journal n'avait pas de lien avec quelque branche politique que se soit, il était aussi engagé que neutre au final étant donné que les rédacteurs n'avaient pas tous les même croyances, les mêmes implications où les mêmes allégeances. Elle même ne se sentait pas très "pro-Kira"... mais elle se voyait mal donner sa vie pour une cause qui luttait contre lui.

Elle préférait porter sur tout ça un regard lointain, s'informer à fond évidemment, mais des deux côtés histoire de pouvoir synthétiser le tout et donner une vision plus larges aux lecteurs, pas simplement le point de vue de l'un ou l'autre des camps, non, elle voulait montrer la vérité à travers ses photos et ses quelques articles, pas suivre le fil conducteur de la pensée des autres. Elle n'était pas là pour faire de la propagande... euh... bref... oui donc non, ça n'était pas pour des raisons politiques que ce fou la gardait prisonnière, la demande de rançon serait surement refusée de toute façon, et elle lui avait dit qu'elle n'était personne... alors pourquoi ? Pour s'amuser ?

Et puis d'abord, Yuno ne s'était jamais demandée pourquoi ses cheveux avaient cette couleur là. C'était juste normal... et puis vu l'endroit d'où elle venait, tout le monde s'en fichait, vu le nombre d'élèves dans les écoles qu'elle avait fréquenté, et vu que tout le monde se connaissait de toute façon, c'était normal pour tous les autres aussi. Na.

La jeune photographe s'inquiétait du silence de son kidnappeur... ça ne laissait rien présager de bon quand il se taisait... remarquez, quand il proposait un jeu il en brisait les règles lui même en même pas une minute... et ça faisait mal. En plus elle avait encore bien assez mal là où le type l'avait frappée pour l'assommer pour qu'on ai pas besoin d'en rajouter toutes les deux minutes...

Un bruit... Encore une fois, le même...

Yuno tendit l'oreille pour essayer de deviner ce qu'était ce bruit. Elle ne l'entendait pas "régulièrement", mais il était clair que cela venait du cinglé roux et borgne (pas aidé celui-là quand même). Elle tendit même légèrement le cou (dans la mesure du possible bien sûr) en direction dudit bruit...

- "T'as déjà joué avec le feu, Yuno ? Moi, j'adore ça."

Même avec le bandeau on devait voir qu'elle était intriguée. Pourquoi une telle question ? Encore ce bruit... *TILT* Un briquet ! Satisfaite d'avoir découvert quelle était la source de ce bruit presque énervant. Elle entendait même le bruit du gaz qui s'en échappe... c'était proche... trop proche... Mais... Et là elle comprit. Elle eut un mouvement de recul tellement brutal que la chaise sur laquelle elle était attachée s'effondra en arrière et se brisa, la libérant en partie. Yuno se cogna brutalement la tête et laissa un petit gémissement de douleur s'échapper d'entre ses lèvres, mais elle ne prit pas le temps de s'en préoccuper. Elle balança son pied en direction de là où le feu était venu en espérant virer le briquet puis, les mains toujours fermement liées dans son dos, elle recula en se servant de ses pieds jusqu'à ce qu'elle atteigne un mur (en se faisant mal... encore)... puis elle ouvrit la bouche.

- Mais ça va pas non ? Vous pouvez me frapper si vous voulez, me cramer les pieds si y'a que ça pour vous faire bander mais vous touchez à un seul de mes cheveux et j'vous fais avaler les vôtres !

Ouais bon... c'était soi-t la peur, soit la colère, soit les deux en même temps mais les couilles qu'on entendait dans ses paroles n'avaient pas poussé entre ses cuises hein... faut pas charrier... et puis elle était toujours ligotée et aveuglée... mais bon... Bref...

- Sans déconner vous pouvez pas vous attaquer à autre chose ? Vous savez combien ça coute d'avoir des beaux cheveux quand ils sont naturellement roux ? Y'a des tonnes de crèmes et de masques qui sont obligatoires pour en arriver à ce résultat bordel ! Vous allez pas me cramer ça c'est mort ! Et j'les ai même pas encore teint en vert fluo alors merde hein !

Crazy Snake sursauta en même temps que la gamine, tellement étonné, qu'il l'observa s'étaler par terre sans bouger. Son rictus s'élargit, ah... elle avait enfin une réaction plus vivante que « pitié, ne me tuez paaaas ». Mais à ce point ? Son estomac se tordit, alors qu'il essayait de ne pas rigoler. Il ne savait pas pourquoi en plus, peut-être parce qu'il n'était pas socialement admis de s'esclaffer d'une demoiselle s'écrasant par terre. Et quand bien même ! Il ne pouvait jamais emprisonner trop longtemps ses pulsions, alors il recommença à glousser...

... Pour aussitôt se taire, lorsque Yuno se mit à hurler. Il fronça les sourcils, mais il ne fit pas le moindre mouvement. Sa bouche s'était tordue dans une grimace bizarre, le coin supérieur s'était levé, tandis qu'il montrait un peu ses dents. Le front plissé, le borgne tentait de suivre le flot de paroles que la gamine crachait, furieuse. Hein ? Quoi ? Heiiiin ? Rah les femmes ! Crazy parvint à écouter les trois premières secondes le discours époumoné de la fille, elle le perdit quand elle employa trop de mots compliqués à la suite, comme « beaux », « naturellement », « crème »... un tas de choses qui ne faisait pas partie de son vocabulaire habituel. Crazy Snake avala une grande bouffée d'air, son briquet lui avait échappé des mains, et Yuno ne paraissait pas désirer autant que lui de finir la tête cramée. Pourquoi ? Enfin, sans doute, parce qu'il aurait été le seul à s'amuser... quel dommage. Ah... mais en réalité, pourquoi se soucierait-il de ses volontés ? Elle n'était pas en position de crier. En plus, elle avait une voix sacrément aiguë, ça lui déchirait les tympans. Crazy Snake n'ajouta rien, le calme semblait lui revenir.

« Hum ? »

Il ignora ses considérations sur le vert fluo, franchement, elle attendait son avis ? Il secoua la tête, une main posée sur la hanche. Crazy Snake était en train de faire la chose la plus difficile au monde : réfléchir. S'il ne réagissait pas vite, la gamine pourrait bien s'enfuir, car les cordes s'étaient desserrées, et qu'il ne faisait rien pour arranger ça. Il avait la flemme. Mais ça le saoulait de courir, et ça entacherait son orgueil masculin si le clan Yamato apprenait qu'il n'avait pas pu rattraper une gamine. Et... elle avait vu son visage, non... ça ne serait pas une bonne idée. Crazy soupira, puis il marcha en direction de Yuno. Il ramassa son briquet, il vérifia s'il fonctionnait encore — on ne savait jamais avec ce genre de furie rousse —. Elle lui avait donné un coup de pied, sans le viser directement lui, mais elle l'avait frappé ! Sans raison. Crazy Snake décida que c'était méchant de sa part.

Le borgne attrapa la gamine par ses vêtements, il la força à se redresser. Il mit un genou sur le sol, son visage était près du sien, il pouvait contempler sa peau blanche. Son pouce passa sur la joue de Yuno, puis il déclara d'une voix nonchalante :

« Ca veut dire que j'peux te bruler ce que j'veux, tant que c'pas tes cheveux ? Ta peau ? Par exemple ? »

Oh... Crazy Snake en frissonnait ! Depuis le début, l'homme avait la terrible envie d'abîmer la jeune fille, lui laisser sa marque pour qu'elle puisse se souvenir de lui. Si elle finissait défigurer à vie grâce à lui, il en serait très heureux ! Surtout que Yuno paraissait prendre soin de son apparence. Son rictus revint, il ricana, puis il pencha la tête sur le côté. Il se moquait si elle mourait dans le processus, il adorait les cadavres brûlés ! Haha... il haussa les sourcils, puis il la lâcha. Pas cette image. Pas cette image.

Crazy Snake serra les dents, il lança un « putain » énervé, puis il se rapprocha encore. Non... il ne devait pas penser à ça. Se rappeler, c'était douloureux. Il avala sa salive.

« J'imagine que t'as jamais eu de soucis dans ta vie ? À part la taille de tes seins quand t'étais ado ? »

Bonjour ! Je suis la Fée Subtilité et j'ai oublié de me pencher sur le berceau de cet enfant ! < 3

Lentement, Crazy Snake enleva le bandeau qui aveuglait la fille. Il lui colla la tête contre le mur, son œil bleu et unique ouvert en grand, il le planta dans son regard. Ses doigts descendirent jusqu'à sa gorge, qu'il serra sans chercher à l'étrangler. Ce qu'il voulait, c'était qu'elle le regarde. C'était qu'elle affronte cet œil, que tout le monde redoutait. Surtout lorsqu'il brûlait d'un éclat aussi dément. Ce n'était plus tant son handicap qui était dérangeant, c'était ce sourire déformé, cette pupille ronde et folle qui ne bougeait pas. Dans l'air, il y avait une odeur de folie, mêlée à celle de sa cigarette. Il était presque contre elle, sa présence avait quelque chose d'oppressant, pourtant Crazy Snake n'avait aucune intention belliqueuse. Pour le moment.

« Les gens comme toi, ça comprendra jamais. »

Un rire nerveux sortit de sa gorge. Crazy Snake enleva doucement son cache-cache, et il dévoila alors, « ça », cette chose. Derrière une mèche rousse, on pouvait voir une paupière plissée, comme si c'était un morceau de papier qu'on aurait violemment froissé, et une cicatrice. Il n'y avait rien d'autre. Rien.

« Ça te dirait d'échanger ? »

Lui-même ne savait pas de quoi il parlait. Il voulait juste qu'elle le regarde dans les yeux, et la terroriser au plus profond de son être. De toute façon, qu'est-ce qu'une gamine rousse, agaçante, et méchante pourrait comprendre de sa douleur ?

Invité

Ouais alors bon, après qu'il l'eut attrapé par sa robe HORS DE PRIX et qu'il l'eut redressée comme si elle ne portait qu'une petite chemisette achetée à deux yen le kilo, elle eut tout le loisir de réfléchir à sa dernière phrase. Est ce qu'il pouvait la brûler ailleurs... eh ben tout bien réfléchit, nan. S'il lui cramait les pieds, elle ne pourrait plus porter de sandales... ben oui, réfléchissez, des jolies sandales blanches avec des mignonnes petites lanières toutes fines et des minuscules petits papillons mauves dessinés dessus, entourant délicatement des atrocités toutes fripées avec une peau rosâtre en pleine cicatrisation... dégueulasse non ? Et puis pour les bras c'est pareil, fini les manches courtes et les bretelles, bonjour les gilets en plein été et les grosses doudounes sans aucun charme... le visage n'en parlons pas, ça couterait une fortune en chirurgies diverses et en crèmes à la con alors qu'elle avait une peau si cool qui ne demandait pratiquement aucun entretient... Et puis il faudrait lui greffer de la peau venant de son cul en plus... elle préférait qu'elle reste là où elle était, vous imaginez ? Un carré de fesses cousu sur une joue ? On fait plus classe quand même... et puis personne n'a envie d'embrasser des fesses en tapant la bise à quelqu'un... ça ruinerait sa vie sociale.

Elle était sur le point de lui faire part de ses reflexions, et de l'engueuler parce qu'on ne malmène pas un tissus aussi délicat que celui de sa jolie robe blanche comme si c'était un bleu de travail, quand il se mit à lui parler de ses seins. Elle eut un mouvement de recul et rougit comme si sa vie en dépendait.

Non mais sérieux, d'où il sortait ce type ? On ne parle pas comme ça des seins d'une fille qu'on connait à peine merde ! C'est malpoli au possible ! Et on ne pose pas son gros doigt plein de tabac froid sur ses complexes de jeunesse ! Ça se fait pas putain !!! Elle essaya de se donner l'expression la plus outrée possible, mais c'est assez compliqué quand on a seulement un demi visage disponible. Toute la gamme des émotions faciales n'est pas totalement accessible dans ce genre Essayez, vous verrez...

Et d'ailleurs, c'est pile à ce moment là qu'elle sentit les doigts du taré se glisser tout doucement entre sa jolie peau si fine et si blanche et le tissus humide et trop serré qui lui cachait les yeux. Troublée, la jeune photographe ne broncha pas. Pourquoi alternait-il entre brutalité typique du bucheron canadien et la douceur du pote homosexuel dont toutes les jeunes filles rêvent ? (Bah quoi... y'a rien de mieux qu'un homo pour donner des conseils en maquillage et en produits de beauté, vous le saviez pas ? Bande d'incultes...). Peut-être qu'il faisait ça pour qu'elle ne sache plus à quoi s'attendre, en tout cas ça marchait bien. Elle était préparée psychologiquement à encaisser des grosses baffes dans sa gueule, et il était presque caressant. Troublant...

Quand il lui retira son bandeau tout en collant presque son visage contre le sien, elle dût cligner plein de fois des paupières pour réhabituer ses yeux à voir quelque chose. Puis elle ouvrit grand ses jolis yeux verts et plongea son regard dans l'oeil bleu qui s'ouvrait à quelques centimètres à peine. Il glissa ses mains autour de sa gorge, mais sans serrer trop fort, du coup ça n'était même pas inconfortable... elle le trouvait quand même vachement doux pour quelqu'un qui vient de parler de ses seins... c'était louche.

- « Les gens comme toi, ça comprendra jamais. »

Là c'en était trop. Qu'est ce qu'il voulait qu'elle comprenne à la fin ? Elle était totalement à sa merci, elle avait été tapée, attachée, effrayée, paniquée, malmenée, on avait essayé de lui brûler les cheveux, on lui avait proposé de brûler autre chose, on avait parlé de ses seins et on lui balançait une phrase comme celle-là, là comme ça de but en blanc sans préliminaires ? Franchement c'était juste abusé là !

...

Et puis il retira son cache-oeil.

Ouah putain la cicatrice qu'il se tapait ! Pas étonnant qu'il soit de mauvais poil tout le temps le pauvre petit gars ! On l'avait pas loupé le mec... SHLA dans ton oeil... pauvre bête sérieux. Elle planta à nouveau ses grands yeux verts dans son petit oeil bleu et resta un moment comme ça sans rien dire, se demandant un peu ce qu'il lui voulait... et puis finalement elle grimaça légèrement.

- Vous avez un oeil très joli, même si on voit bien dedans que vous n'êtes pas très sain d'esprit... par contre vous devez avoir un sérieux problème de digestion non ? Il faudrait penser à vous munir de cachous, où de pastilles à la menthe... et peut-être à arrêter de fumer je sais pas...

Elle regarda à nouveau son manque d'oeil de l'autre côté de son nez.

- Qui c'est qui vous a fait ça ? Vous n'avez pas mal j'espère... vous savez, avec une lotion adaptée je suis sure que ça pourrait avoir une meilleure gueule et vous ne seriez pas obligé de cacher votre cicatrice. En plus votre truc doit faire macérer la transpiration dessus, ça ne pue pas l'été ?

Ce con la troublait tellement avec ses sautes d'humeurs digne d'un gros schizo qu'elle oubliait qu'elle était en danger de mort permanent...

- Et puis vous voulez qu'on échange quoi ? Que moi je vous brûle ? C'est mort oubliez, ça va fouetter le cochon grillé et vous risquez d'avoir super mal ! J'ai pas envie de vous faire mal.

Yuno parla encore, et beaucoup, Crazy Snake s'efforça cette fois-ci de ne pas décrocher. C'était difficile, en partie à cause de sa lenteur naturelle, mais aussi parce qu'elle était Japonaise. Même s'il maitrisait la langue, il avait besoin de temps pour comprendre chaque mot, chaque articulation, afin de ne pas confondre avec autre chose. Son visage resta figé dans une grimace bizarre, les sourcils froncés, le borgne peinait à comprendre tout ce qu'elle disait. En réalité, ce que son cerveau n'assimilait pas, c'était qu'elle était en train de s'adresser à lui comme à une amie. S'il avait des réactions illogiques, et qu'il était lunatique, il trouvait ça anormal que Yuno réagisse ainsi. Elle n’était pas censée hurler, pleurer ? Lui crier qu'elle le haïssait de toute son âme ? Se débattre ? Essayer de s'éloigner de lui d'au moins dix mètres ? Même s'il l'avait collée contre un mur ? À quel moment l'homme avait-il grandi, au point de ne plus savoir ce qu'il devait faire avec « les jeunes » ? Il n'était pas si vieux, pourtant ! Et d'apparence, on pouvait facilement croire qu'il entamait ses vingt-deux ans. Il s'était passé quoi entre temps ? Quand le monde avait-il changé l'esprit des adolescents ?

Crazy Snake lâcha la jeune fille, il se releva en continuant de la fixer. Malheureusement, il n'y avait aucune émotion sur son visage ; il n'était pas doué pour rester impassible, ce n'était pas ça, il ne ressentait juste... rien. Ça pouvait arriver, et c'était même flippant, n'avoir aucune émotion. Surtout pour lui qui pouvait s'enflammer d'un coup, sans prévenir. Crazy Snake reprit sa cigarette entre ses longs doigts minces — celle qu'on avait « subtilement » oubliée au poste précédent —, et il fuma en songeant que ça risquait d'être sa dernière. Franchement, il devait faire quoi ? On ne lui avait jamais appris à comment se comporter dans ce genre de situation. En même temps, qui aurait pensé qu'il finirait dans ce rôle-là ? Lui, sans doute.

« T'as pas envie de m'faire du mal ? Haaaa... »

Crazy Snake avait poussé un énorme soupir blasé. Il fit « non » de la tête, puis il ajouta :

« T'essayes juste de m'amadouer, au fond ? En espérant sauver un peu ton cul ? »

Pourquoi Yuno aurait-elle dit ça, alors ? Elle avait pensé qu'il était quelqu'un de vulnérable ? Quel con. Qu'est-ce qui lui avait pris ? Crazy Snake avait oublié sa méfiance au fond de sa poche, et elle revenait maintenant pour lui donner une magnifique claque dans la gueule. Depuis quand se laissait-il prendre par des sentiments pareils ? Ca ne lui ressemblait pas, et il détestait quand ça arrivait. Ce qui lui ressemblait, c'était le feu, c'était le Chaos, et la colère. Il avala sa salive, puis il s'écarta un peu de la jeune fille, elle ne s'enfuirait pas. Il ne savait même pas si cette idée lui avait traversé l'esprit. De toute façon, ils étaient enfermés à l'intérieur de l'entrepôt. Il venait de s'en souvenir ; pas la peine de lui courir après, c'était un effort de moins à faire. Néanmoins, Crazy Snake avait échoué, il avait voulu lui faire peur, et au lieu de ça, Yuno lui avait parlé beaucoup trop en lui donnant des conseils sur son hygiène. Merde quoi !

« Tu risques de crever, de toute façon. »

Lâcha-t-il en parlant plus à lui-même. Il n'avait aucune intention de lui faire espérer autre chose, Crazy était un piètre menteur. Et puis, Yuno collaborerait forcément, elle n'avait pas le choix. Ce qu'elle devait faire ? Rester sagement attachée à la chaise, en se taisant — de préférence —, et en faisant ce qu'on attendait d'une victime : pleurer, avoir peur, supplier, tout ça. Il ne lui demandait pas plus, ce n'était même pas de l'exigence ! C'était la moindre des choses. Crazy Snake tressaillit, il était dans un état bizarre, ce qui l'épuisait, et rongeait sa patience.

Mordant sa lèvre, il se rapprocha une nouvelle fois, il la fixa encore, étudiant la moindre de ses réactions. Elle pensait à quoi dans sa petite tête rousse ? A comment préférait-elle mourir ? Sans doute proprement, comme un genre d'arrêt cardiaque. À côté de ça, finir brûlée vive devait la terroriser, ça abîmerait ses beaux vêtements, ça ne lui irait pas au teint... il haussa les sourcils, comme s'il chassait des pensées stupides. Ou peut-être qu'il se trompait ? Son rictus revint, sa bonne humeur aussi, sa folie un peu. Elle était en train de prendre la route menant à son esprit. Cette fois-ci, Crazy Snake ne prit pas par la jeune fille par la gorge, il lui attrapa le bras, sans rapprocher son visage, comme tantôt. Il changeait d'attitude, sans changer son caractère. Ses sautes d'humeur allaient et venaient, c'était toujours comme ça. Il serra les dents, puis il demanda :

« Dis-moi, comment voudrais-tu mourir ? »

Son oeil examinait Yuno, il ne bougeait pas, il attendait. Comme s'il était prêt à lui arracher son âme, dès qu'elle montrerait un signe de vie. Ses doigts se resserraient autour de son bras, lentement.

Invité

Décidément ce type était vraiment particulier... particulier et désagréable d'ailleurs. Non mais sans déconner quoi, elle avait vu des tas de films et savait donc très bien que tout ravisseur qui se respecte se contente d'être con dans son coin, de torturer ses victimes, de les violer ou de leur expliquer qu'elles vont servir de monnaie d'échange pour vas savoir quoi... pourquoi avait-il fallu qu'elle tombe sur le taré du coin hein ? Elle et sa chance merdique... Non elle n'avait pas envie de lui faire mal, pourquoi l'aurait-elle voulu ? Elle n'était pas une sadique, faire mal aux gens c'était méchant, ses parents le lui avaient toujours dit.

- Vous amadouer ? Parce que c'est possible vous croyez ? Vous avez l'air d'être un malade mental monsieur, vous avez même essayé de me brûler les cheveux ! Comment pourrais-je avoir envie de vous amadouer hein ?

Quelle question ridicule...

- Crever... genre mourir ?

Elle tressailli et ses yeux se remplirent à nouveau de larmes. C'était donc ça... ce mec n'était pas un ravisseur, c'était un assassin. Il voulait la tuer... et puis il avait visiblement envie de la violer vu qu'il parlait de "sauver son cul"... du coup ses larmes se mirent à couler sur ses joues. Il allait la salir et la tuer... quelle horreur ! Décidément c'était vraiment pas une bonne journée.

« Dis-moi, comment voudrais-tu mourir ? »

Elle étouffa un sanglot et se mit à trembler.

- T... Très vieille dans mon lit !

La main qu'il avait enroulée autour de son bras la brûlait presque tant elle était consciente de sa présence. Elle se retint quelques instants... puis craqua et se mit à pleurer comme une petite fille, avec des grosses larmes et des gros sanglots.

- Je veux pas mourir ! Pourquoi v... vous voulez me tuer ? Je vous ai rien fais ! Je... Je suis gentille moi ! Je prends juste des j... jolies photos et je...

Une crise de sanglots l'empêcha de finir sa phrase. Si il la tuait, Day serait furieuse parce qu'elle n'aurait pas pu finir son travail, ses parents seraient tristes, ses colocataires seraient obligés de manger n'importe quoi, comme avant qu'elle arrive, et ses jolis vêtements seraient probablement revendus...

- J'veux pas mouriiiiiiiiiiiiiiiiiir !

Elle avait les joues trempées de larmes et la respiration saccadée, elle n'arrivait pas à se calmer et n'essayait même plus, quel importance de toute façon, il allait la tuer après tout.

- J'veux pas que vous me violieeeeeeez non pluuuuuus !

Sympa la dernière vision du monde : un psychopathe la prenant comme si elle n'était qu'un vulgaire jouet, lui faisant probablement beaucoup plus de mal que de bien (alors que le sexe ça pouvait être vachement sympa d'après ce que lui avait apprit sa propre expérience) et la salissant pour l'éternité. Pas cool... elle aurait préféré crever tranquillement dans sa centième année, comme la vieille Tsubaki sans son village : en s'endormant paisiblement pour la dernière fois après avoir passé une dernière journée agréable.

- P... Pour... Pourqu... Pourquoi vous êtes... pourquoi vous êtes si méchant avec moi ?

Elle éclata à nouveau en sanglots.

- Je veux teindre mes cheveuuuuuuux !

Ah... les femmes. Pourquoi lorsqu'elles pleuraient, Crazy avait envie de se percer les tympans avec un stylo ? Sa main sur le bras de Yuno se resserra davantage, plus elle pleurait. Et plus elle pleurait, plus le visage du borgne se déformait de fatigue, et d'horreur. Il y avait une chose que Crazy Snake détestait — parmi tant d'autres, certes —, c'était de voir et surtout d'entendre des gamines chialer. Ça hérissait tous les poils de son dos. Ce frisson était désagréable, et n'accentuait en rien sa bonne humeur. Là, tout de suite, s'il avait eu une batte de baseball à disposition, il aurait pris un énorme plaisir à éclater le crâne de la jeune fille afin de la faire taire. Bon... en effet, elle aurait crié plus fort encore, mais au moins... sa voix perçante se serait tue pour de bon.

L'homme ne décrocha pas un mot, il se contenta de la fixer avec un air blasé. Il avait la tronche de celui qui devait apprendre à Mamie que son petit bichon adoré était mort, et qui était emmerdé par anticipation. Le front plissé, la bouche figée dans une drôle de grimace, l'oeil du borgne observait Yuno avec dépit.

Franchement, est-ce qu'il avait une tête à violer des filles ? C'était insultant, merde ! Qu'on le traite de handicapé, ça passait. Qu'on lui crache que son cerveau était pourri depuis un bon paquet d'années, ça allait. C'était un peu vrai, tout ça, il était borgne, il était limité... Crazy en avait conscience. Mais se faire insulter de violeur, c'était blessant. Yuno le trouvait méchant ? Pourtant, c'était pas gentil de lui dire qu'il avait la tête d'un violeur récidiviste ! En plus, il l'avait pas touché. Déjà parce qu'en tant que mec normalement constitué, il avait des principes. Et de deux, Yuno n'était pas son genre.

Crazy Snake poussa un énième soupir, il se releva, toujours sans rien dire. Il était un peu perdu, il ne savait pas exactement ce qu'il devait faire. Lui, son truc, c'était les attentats, la dynamite, tout ça... torturer quelqu'un, séquestrer une gamine, il ne l'avait jamais fait jusqu'à maintenant. Et elle commençait vraiment à le faire chier. En plus, il avait trouvé sa réponse nulle, et pas originale. Lui, s'il devait se choisir une mort, ça serait quoi ? Il tira sur sa cigarette en y réfléchissant. On pouvait s'attendre à ce qu'il souhaite faire sauter ses tripes, le même genre de mort qu'il assurait aux gens... ça serait le pied de finir brûler, la chaleur envahirait son corps une bonne fois pour toutes. Toutefois, un certain effroi le parcourait. Il ne considérait pas ses parents suffisamment importants comme modèles pour vouloir mourir comme eux. Et puis, il avait cent fois plus de chance de mourir d'un cancer du poumon que de finir exploser en morceaux. Une morte parfaite, c'était quoi ?

Le dos posé contre le mur, il regardait Yuno sans vraiment la regarder. Depuis une ou deux minutes, il avait fait de la photographe une simple partie du décor. Le borgne avala sa salive, et il s'enfonça dans ses rêveries. Son visage prit alors une expression de tristesse infinie.

Ah... si seulement Maria pouvait l'achever, ça serait bandant. Crazy imaginait la scène ; allongé par terre, elle serait sur lui, et pointerait un pistolet sur son front. Ça serait le pied. Le regard rempli d'une haine féroce, Maria serait plus belle que jamais. Qu'importe qu'elle le déteste au point de vouloir le tuer, ce n'était pas grave, car à cet instant, une fois seulement... il serait le centre de toute son attention. Son monde se limiterait à lui, et à ses crimes. Ses yeux verts brilleraient d'un éclat brûlant, puis son doigt appuierait sur la gâchette. Il ne resterait rien de lui, et il partirait avec cette superbe image en tête. Voilà... comment Crazy Snake voulait crever. Abattu par la femme qu'il avait aimée plus jeune, et qu'il aimait encore.

Sans qu'il ne s'en rende compte, une larme glissait sur sa joue droite. Quand elle tomba depuis sa mâchoire, le roux se rappela de l'existence de Yuno. Sans essuyer sa larme, il lui raccorda toute son attention.

« T'es qu'une sale môme. Arrête de chialer, ça me GONFLE. »

L'homme frotta son visage, il secoua la tête, puis il donna un coup de pied dans une table. Elle s'éclata dans le sol, sans se briser, mais elle fit un vacarme énorme. Il se posta devant Yuno, puis il dit sur un ton énervé :

« Je te jure, si tu chiales encore une fois... je t'arrache les cordes vocales avec mes ongles. Et t'veux pas savoir où je les aurais fourrés avant. »

Ses tempes lui faisaient mal, la fatigue lui déchirait les nerfs. Il mordit sa langue au point de la faire saigner. Il ajouta :

« Mes... mes AMIS sont partis faire quelques recherches sur toi. Donc, tu vas PEUT-ÊTRE mourir. Et tu crèveras si tu continues à être aussi chiante. Et m'dit pas que t'as tes règles, et que c'est à cause de ça. J'suis pas d'humeur. »

Invité

Le boucan produit par la table heurtant le sol commença déjà doucement à calmer Yuno, ne serait-ce qu'à cause de la surprise. Ensuite, l'idée de se faire arracher les cordes vocales si elle continuait, où recommençait, à faiblir de la sorte de lui étant pas vraiment agréable, elle fit un gros effort en se mordant la lèvre et tout pour ralentir, puis stopper ses sanglots. Elle reniflait toujours un peu, mais elle avait cessé de gémir et de larmoyer. Elle avait vu une larme couler sur la joue du monstre roux qui était si méchant avec elle, mais elle pensait avoir halluciné et ne fit pas de commentaire... de toute façon à quoi bon ? Si elle disait quelque chose qui ne lui plaisait pas, il pourrait très bien la tuer, ne serait-ce que pour le plaisir... Yuno avait peur. Elle était prête à avouer où à faire n'importe quoi et elle le savait.

Elle n'avait pas envie de lui dire qu'elle travaillait pour le Cavalier Noir... quelles que soient les convictions politiques de ce type, le Cavalier Noir avait des articles et des publications qui allaient à l'encontre d'à peu près tout. Certains de ses collègues étaient des sympathisants de la rébellion, d'autres soutenaient les pro-Kira, d'autres encore étaient neutres... au final, ça faisait de ce périodique un journal à la fois engagé partout à la fois et neutre. Et ça ne plaisait pas à tout le monde... Bref, dans tous les cas, s'il avait posé la question là maintenant tout de suite, elle lui aurait même raconté les secrets de ses collègues, les noms de leurs sources, de leurs informateurs... tout ! Mais comprenez : il pouvait la tuer ! La tuer !!!

Encore toute tremblotante, la jeune photographe luttait pour ne pas recommencer à chialer comme une gamine. Elle leva des yeux encore tout mouillés vers son ravisseur... et détourna vivement la tête. Ce type était devenu terrifiant. Un simple regard vers lui lui donnait la chair de poule et des frissons dans le dos (et elle détestait les frissons dans le dos... c'est horrible comme sensation merde !). Brusquement, la lumière se fit !!! Il fallait qu'elle s'éloigne de cet homme, de ses cheveux sales, de sa peau dégueulasse et de son haleine de vieux chacal en phase de décomposition avancée. Il la dégoutait parce qu'il était laid, qu'il puait et qu'il voulait la tuer... largement assez de raisons donc. Elle tourna frénétiquement la tête dans toutes les directions à la recherche d'une porte... pas des masses, seulement celle derrière laquelle s'étaient barrés ses "amis". Pas une bonne idée... Par contre, à environ deux mètres derrière elle, il y avait un gros tas de sacs de toile. Elle pourrait peut-être se cacher dedans et s'esquiver ailleurs pendant que le méchant ravisseur essaierait de l'attraper ! Mais d'abord, il fallait briser la chaise, déjà mal en point depuis sa première chute.

Yuno prit donc appui sur ses pieds pour se jeter en arrière, serrant les dents et fermant les yeux en prévision du choc. Elle s'écrasa comme une merde, la chaise éclata littéralement (en lui griffant le bras... sa jolie peau, merde !) et elle ne prit même pas le temps de se défaire de ses liens avant de plonger (oui, plonger... littéralement... plonger...) dans le gros tas de sacs.

Bon... Alors vu que je ne suis pas prof de physique je ne sais pas comment expliquer ça clairement, mais quand on essaye de pénétrer à l'intérieur d'un tas de sacs de plusieurs kilos chacun en plongeant, ça ne fait pas comme dans les films... (surtout quand on a un gabarit de crevette de compétition comme Yuno)... on a juste l'air con.

Du coup, pas DU TOUT dans le tas de sacs, Yuno se redressa pour masser ses mains endolories par leur rencontre brutale avec les sacs. Elle avait aussi mal au front pour la même raison... et en plus elle avait peur de la réaction du borgne... Est ce qu'il allait la gronder ? La tuer ? Se foutre de sa gueule ? S'il se moquait d'elle ça serait vraiment très méchant... après tout c'était normal qu'elle essaye de s'en sortir non ? Connard va... En plus elle avait les mains toutes noires à cause des sacs qui semblaient contenir un genre de charbon, ou de poudre noire d'un même genre.
Elle voulu se retourner vers lui, s'emmêla les pieds dans ses cordes, glissa et tomba en arrière sur les gros sacs. BIM. Comme si elle n'avait pas déjà eu l'air assez ridicule et stupide la minute précédente. Il allait vraiment finir par se foutre de sa gueule... elle préférait presque qu'il la tue en fait. Elle était rouge comme une pivoine et s'apprêtait à grommeler quelque chose pour essayer de faire passer ça pour quelque chose de totalement anodin quand une mèche de ses cheveux glissa devant ses yeux. Noire... la mèche était noire... enfin brunâtre avec des taches rousses en fait... mais pas "juste rousse". Elle la regarda un moment comme s'il s’agissait d'une créature extravagante... puis eut un petit sourire timide.

Elle sembla oublier la situation, Crazy Snake, les types dehors... tout... Elle se tourna vers les sacs et attrapa un bout de chaise pour le percer... tout ce noir ! Toute celle coloration potentielle ! Elle frictionna généreusement ses cheveux avec la poudre, veillant quand même à ne pas en mettre sur son visage, puis se frotta les mains sur son gilet, le rendant aussi noir que ses cheveux ou presque, avant de le retirer et de le laisser tomber dédaigneusement par terre. Elle leva les yeux pour se regarder dans un reflet... pas de vitre proche... poussant un soupir exaspéré elle attrapa son nécessaire à maquillage d'urgence dans la poche du vêtement qu'elle avait jeté et s'empara d'un petit miroir à l'intérieur. Bon... c'était pas une vraie teinture, ça c'était certain, mais on avait beaucoup de mal à voir le roux sous la poudre de charbon. Elle sourit... parfait.

Ce ne fut que quand elle releva les yeux qu'elle se souvint de la présence de Crazy Snake. Elle eut un mouvement de recul et une grimace de surprise avant de le détailler de haut en bas.

- Ah c'est vous... j'avais presque oublié votre présence désagréable...

Elle était Yuno. Yuno Hurano, grande photographe, artiste, future journaliste chroniqueuse, adepte de la mode, brune et confiante. Pourquoi s'était-elle mise à chialer un peu plus tôt ? Allez savoir. Chialer pour rien c'était con, chialer pour quelque chose... c'était pathétique. Elle poussa un soupir fatigué tout en se débarrassant des derniers vestiges de liens sur ses poignets et ses chevilles. Courir vers la porte était stupide, elle n'aurait pas le temps de l'atteindre et des types étaient sans doutes dehors. Les rares lucarnes étaient trop hautes et se cacher, comme elle l'avait pensé un peu plus tôt, était d'une bêtise remarquable étant donné que Crazy Snake n'avait rien d'autre à faire que la regarder de toute façon... du coup il la verrait. C'était con.

La jeune fille poussa un soupir résigné et fit face à son ravisseur.

- Bon... étant donné que vous n'allez pas me tuer, du moins pas maintenant j'ai bien compris, que non seulement je n'ai pas envie de répondre à vos questions mais qu'en plus vous vous fichez clairement des réponses et que vous n'avez visiblement pas l'intention de me violer où de vous brosser les dents... qu'est ce qu'on fait en attendant vos "amis" ? On va juste se faire chier ? Eh ben... fascinant...

Ça n'était pas qu'à cause de la couleur de ses cheveux (surtout qu'elle avait l'air d'être teinte avec une couleur de mauvaise qualité délavée et mal foutue), en fait c'était surtout son expression et sa manière de se tenir debout qui changeaient radicalement Yuno : elle avait l'air plus vieille, confiante, presque un peu hautaine. Et elle avait l'air de s'ennuyer à crever. Elle n'évitait plus l'oeil de Crazy, au contraire, elle le regardait ouvertement, semblant même avoir oublié qu'il puait et qu'il était laid et méchant, c'était comme si elle se contentant de regarder quelqu'un supposé l'amuser... mais qui n'y arrivait pas.

...

... D'accord.

Yuno s'était libéré pour se jeter sur de gros sac de toile.

À part ça, tout allait bien. Enfin, lui, ça allait bien. Quant à la jeune fille, son cerveau disjonctait, rien de plus. Crazy Snake ne bougea pas, il se contenta de l'observer avec une expression de pur étonnement. Les sourcils froncés, le borgne se demanda ce qu'elle foutait. Contrairement à ce qu'il avait pensé tantôt, sa victime avait fini par essayer quelque chose. Le souci, c'était la manière. Il ne comprenait pas pourquoi elle avait voulu faire connaissance avec les sacs de charbon. Déjà parce que c'était crade, et ensuite... il ne parvenait pas à saisir. Ça devait être un truc de femme, donc un truc inaccessible pour lui. Il ne savait pas quoi, hein, il ne fallait pas trop le questionner là-dessus. Yuno était une fille, elle devait avoir une raison particulière de faire ça, un truc bien subtil qui ne faisait pas partie de son monde. Sûrement.

Sauf que Yuno était en train de frotter ses cheveux avec du charbon. Ah... c'était... intéressant, comme concept. Crazy grimaça, il pencha la tête sur le côté, et la fixa avec un mélange de curiosité, et de dégoût. Qu'est-ce qu'il devrait raconter ? Parce que les Yamato ne tarderaient pas à revenir, et on lui demandera pourquoi leur victime se retrouvait ainsi. Il leur dirait quoi ? Qu'elle avait pété la chaise, et qu'elle s'était précipitée sur les sacs de charbon, afin de changer de couleur de cheveux ? Le front plissé, l'homme ne réagissait pas. Pour une fois, son cerveau mettait le paquet pour comprendre la situation. Mais plus les rouages accéléraient, plus il dépensait d'énergie pour toucher du bout du doigt la volonté de Yuno, plus il se disait que le monde le rendrait fou. Et elle s'adressa à lui.

Ah...

Ah... d'accord.

Crazy Snake perdit d'un claquement de doigts toutes les théories possibles qu'il avait façonné, acharné, et épuisé. Il mordit sa lèvre, son oeil ne quittait pas Yuno. Il avait la sensation que s'il clignait, ou qu'il détournait le regard pour une raison quelconque, elle finirait par s'enfuir, comme un rêve. C'était une situation irréaliste, absurde ; le genre de situation qui le dépassait, et l'effrayait. En fait, le genre de situation qu'il aurait pu retrouver dans un manga. Ce qui lui déplaisait fortement.

Sans répondre à la jeune fille, l'homme remit son bandeau en soupirant. Il était censé faire quoi ? Parce que bon, Crazy se rendit compte qu'elle lui avait parlé comme à un chien. Il n'admettait pas de se faire traiter de la sorte par une salope, ou par n'importe qui, en fait. L'homme pensa « salope », car elle en avait les attitudes : « je te regarde de haut, je te méprise, et je me crois la plus bonne de la terre ». Du moins, c'était ainsi que le roux le ressentait. Sinon, elle n'était pas trop mal en brune. Enfin, elle devait puer le charbon, elle était crade, et blessée, mais le brun lui allait bien.

« Aussi fascinant que ta coupe au charbon, pétasse. »

Il fallait noter — tout de même — que c'était la première fois que Crazy Snake employait un terme aussi vulgaire, oralement. Mais quand même ! Les choses avaient pris une drôle de tournure ! Yuno avait subitement changé de personnalité, et elle devenait bizarre. Flippante, et bizarre. De plus, l'homme avait dit ce qu'il pensait ; elle avait un comportement de pétasse, il ne le lui cachait pas. Le truc, c'était qu'il ne pouvait plus prévoir ses réactions. Peut-être qu'elle supporterait mal ce « pétasse » lâché d'un ton méprisant, et qu'elle lui sauterait dessus. En y songeant, l'homme fit une autre grimace. Il était crevé, il n'avait pas spécialement envie de faire de « l'exercice ». Il reprit une chaise, il se laissa tomber dessus. Croisant les bras, il dévisagea la jeune fille.

« T'essaye une nouvelle mode ? Ou t'as complètement débloqué ? À ta place, j'aurais peur pour ma peau, et mes cheveux. Tu risques de devenir chauve, nan ? »

Bon... pas dans l'immédiat. En réalité, ses cheveux noircis par le charbon le dégoûtaient assez. Bah quoi ? Crazy Snake pouvait avoir ce genre d'état d'âme ! Ça devait gratter, ça devait puer, et avec la sueur... berk. Il tira une autre tronche écoeuré, sa grimace s'agrandit. Il ralluma une cigarette, Crazy avait besoin de se calmer, ça faisait trop d'émotions à gérer d'un coup là, il n'en pouvait plus trop. Tout ce dont il avait envie, c'était d'aller se coucher, en songeant à son travail. Après tout, il était là pour faire exploser un nouveau bâtiment, non ? Il avait hâte. N'empêche, il n'avait jamais vu ce « phénomène », le changement de personnalité avec la nouvelle couleur de cheveux. YOLO.

Invité

[Désolée du retard ! J'ai pas des masses internet en ce moment ^^ <3 ]

Yuno poussa un soupir. Un long soupir de princesse qui se fait chier. Elle jeta à Crazy un regard épuisé et tritura pensivement une mèche de ses cheveux. Il n'avait même pas répondu à sa question et préférait s'amuser à l'insulter... très mature...
Elle planta à nouveau son regard dans son oeil unique, semblant attendre qu'il comprenne tout seul, mais ça ne vint pas. Visiblement ce mec était d'une stupidité à pleurer... quel gros con...

- Je vais essayer plus lentement la prochaine fois, désolée... j'ai pensé que vos capacités intellectuelles étaient au moins dans la moyenne... je me suis visiblement trompée, tant pis. Enfin... de toute façon pour vous ça ne change pas grand chose n'est ce pas, ça n'est pas comme si vous alliez subitement avoir envie de vous cultiver où de faire fonctionner votre cervelle plus que d'habitude... vous devriez, tout est plus simple quand on réfléchit un peu vous savez...

Et c'était vrai, après tout, avant d'apprendre quelque chose, on ne le sait pas non ? Eh ben c'était pareil.

- Pas foutu de répondre à une simple question non mais j'vous jure...

La jeune fille se fit pensive, le regard perdu dans le vague, elle avait une petite moue inconsciente et triturait ses cheveux paisiblement.

- Nous pourrions peut-être essayer de nous concentrer sur un moment d'arranger tout le monde non ? Quelque chose qui nous serait profitable, à vous comme à moi... bon, ça impliquerait évidemment quelques détails à régler avec vos "amis" mais bon. Au pire je m'en fiche d'eux hein...

Elle se remit à réfléchir sans attendre qu'il réponde, comme si elle réfléchissait toute seule.

- Sinon je pourrais vous tuer, ça serait pratique c'est certain... enfin bon c'est ridicule, vous êtes une brute, j'ai un gabarit de crevette de compétition et de toute façon je n'ai pas d'arme à feu, hors c'est probablement la seule arme avec laquelle je pourrais vous buter étant donné qu'au corps à corps vous me mettriez à terre en deux secondes et j'aurais votre odeur collée sur moi en plus...

Elle frissonna de dégout et secoua la tête comme pour se retirer cette image de la tête.
Imaginez un peu : l'odeur de clope, de sueur, la peau dégueulasse, les cheveux filandreux et les manière de crétin de ce mec, plaqués contre la peau lisse et douce de Yuno. Beurk ! Non, franchement l'horreur quoi !

- Brrr... immonde...

Elle leva les yeux vers lui d'un air dégouté.

- Pas la peine de vous exciter, j'ai pas l'intention de partir ou de tenter quoi que se soit contre vous. C'est trop répugnant...

Elle farfouilla dans son sac et en sorti une cigarette et un briquet... elle en avait toujours sur elle, même si normalement elle ne fumait pas. En réalité, il n'y avait que quand elle était brune qu'elle avait des envies de clopes... ça l'avait longtemps intriguée, et puis elle s'était dit "bah... pourquoi pas...". Elle porta la cigarette à ses lèvres, l'alluma et contempla la flamme et la fumée un moment avant de se remettre à sa réflexion. Elle toussa un peu aussi, peu habituée à fumer.

- On pourrait mettre le feu à cet entrepôt, hangars ou quoi que soit cette charmante pièce, se faire passer pour morts, balancer vos potes à la police et se faire du fric sur leur dos... ou alors je pourrais vous engager pour brûler le visage de Nightmare, ça lui ferait probablement beaucoup de bien...

Elle se mit à rire en pensant à ce gros connard de Nightmare en train de se contorsionner par terre à ses pieds, le visage en feu pendant qu'elle laissait une goutte d'eau lui tomber dessus de temps en temps, juste histoire de lui donner un peu d'espoir... un petit ricanement sadique lui échappa.

Elle secoua la tête et une mèche encore rousse passa devant ses yeux. Son expression changea quelques secondes, ses yeux semblèrent s'agrandir, lui donnant un air à nouveau plus jeune, plus innocente... un éclair de frayeur passa dans son regard quand elle le posa sur Crazy, qui se changea en lueur amusée quand la pointe de la mèche, convenablement noircie, passa dans son champs de vision.
Si seulement elle avait une vraie teinture tout serait tellement plus simple... pfff...

- Vous voulez qu'on essaye un truc comme ça où on se contente de s'emmerder à pleurer comme des rats morts jusqu'à ce que vos potes vous ramènent mon arbre généalogique insignifiant ?

[HJ : Je sais, ce n'est pas grave <3]

S'il avait bien une chose qui agaçait profondément Crazy Snake, c'était qu'on le prenne de haut. Il ne comprenait toujours pas le changement de personnalité de la jeune fille, et il ne cherchait plus à le comprendre. Ce dont il avait envie, c'était de lui arracher sa langue prétentieuse afin de la faire taire. Yuno parla de nouveau beaucoup, et l'homme n"écouta que le début. Il n'avait pas besoin de lui donner toute son attention, si c'était pour entendre qu'il n'était qu'un con. Le borgne examina ses ongles, l'air vaguement intéressé par la proposition de la demoiselle.

Si elle le pensait suffisamment stupide pour accepter, elle se foutait le doigt dans l'oeil jusqu'au coude. Yuno ne devait pas savoir que ce n'était pas si simple de trahir les gens ; il suffisait que les Yamato aient des « amis » pour que ces derniers finissent par les plonger dans du béton. Enfin, lui, surtout, parce que si Yuno obtenait ce qu'elle voulait, elle se moquerait bien de ce qu'il lui arriverait. Crazy n'était pas assez beau pour ça. À la limite, s'il avait correspondu aux canons de la beauté japonais, il aurait pu avoir l'espoir de recevoir un peu d'aide de la jeune fille. Mais pour ça, il aurait fallu qu'il perde des poils, qu'il se rase, et qu'il accepte d'amputer sa virilité pour ressembler à une femme. Il ne comprenait pas le Japonais pour « ce type de beauté ».

Il haussa les épaules, fixant Yuno, elle était en train de sortir un paquet de cigarettes de son sac. Elle paraissait vouloir se donner un genre, comme si changer de couleur de cheveux lui donnait le droit d'être quelqu'un d'autre. Elle le faisait drôlement chier.

« J'pourrais mettre le feu à ton tronche, ça reviendrait au même. Honnêment, j'en ai rien à foutre de ce qui va advenir de toi. Et ça aurait été aussi le cas, si t'avais été mon ex. »

Crazy Snake n'ajouta pas qu'il ne voulait pas, en partie parce qu'il avait la flemme. De plus, il n'avait pas son « matériel » sur lui. Qu'est-ce que Yuno croyait ? Lui, il faisait ça dans les règles de l'art ! Est-ce que Yuno lui promettait une jolie somme d'argent en échange ? Non. Alors il s'en foutait royalement.

« T'es tellement chiante que regarder l'eau bouillir est plus amusant que de parler avec toi. Enlève tes grands airs méprisants, ma petite, ça me gonfle. T'serais prête à faire quoi ? En échange de ta survie ? »

Crazy lui tendait la perche, il ne restait à savoir si elle allait la saisir. Même si en réalité, qu'importe la réponse, il ne conserverait qu'une froide indifférence. Le borgne s'alluma une nouvelle cigarette, répandant une sale odeur. Il grimaça en examinant Yuno ; elle le dégoûtait. Son petit air de princesse pourrie gâtée, sa démarche assurée, et le ton qu'elle employait lui rappelaient des lycéennes. Du haut de leurs talons de dix centimètres, elles jugeaient que le monde n'avait plus rien à leur prouver, et qu'il devait se plier à leurs volontés.

C'était sans doute ce que pensait « cette Yuno-ci ». Elle se trompait ; jamais Crazy Snake ne se prosternerait devant une telle gamine ! Les Japonaises ne connaissaient pas le sens du mot « réalité », si elles étaient persuadées que les hommes n'étaient bons qu'à servir leurs désirs. Il repoussa une mèche de cheveux roux, puis il grogna :

« T'as parlé d'un certain Nightmare... c'est pas un gars du Cavalier Noir. T'en fais partie ? »

Crazy eut un sourire mauvais, en songeant à quelle tête Yuno pourrait tirer, si elle apprenait qu'elle avait face à elle un criminel classé dans le journal. Il connaissait vaguement sa position, mais il ne pensait pas plus de choses que ça. Il n'avait pas spécialement envie de monter ; ce qu'il voulait se résumait toujours à un mot : le Chaos. Il plia une jambe, il tira sur sa cigarette, puis il fronça les sourcils. Il lui fallut une bonne longue minute pour mettre de l'ordre dans ses souvenirs, et se rappeler qu'on lui avait donné un travail « spécial ». Il mordit ses lèvres, il demanda :

« T'as déjà entendu parler d'un mec qui s'fait appeler Reaper ? »

C'était l'oiseau que Nathan Suzaku lui avait chargé de brûler les ailes. Malheureusement, ce n'était pas si simple ; il ne trouvait aucune trace de son existence. L'énergumène semblait sortir, uniquement lorsqu'il était certain de faire une victime. Crazy Snake n'était pas assez subtil pour établir un portrait de l'animal. Pour lui, c'était un dingue se baladant en cosplay de Majordorme, et ça n'allait pas plus loin.

« Lui, il est classé où ? »

Il parlait bien sûr du classement de criminels.

Invité

La jeune fille poussa un soupir et cessa finalement de parler pendant un petit moment. Elle avait laissé échapper le nom de son employeur… enfin pas vraiment, mais c'était tout comme. Nightmare… elle eut un vague frisson de dégoût en pensant à cet homme, s'il pouvait encore être appelé de cette manière, aux manières si affreuses. Même quand elle n'était pas en sa présence il réussissait à se démerder pour la faire chier.

Un jour, il faudrait qu'elle se teigne les cheveux en rose en sa présence, histoire de bien pouvoir lui éclater la bouche d'un coup de pied bien placé… arracher son sourire satisfait à ce connard qui portait si bien son surnom la mènerait probablement directement à l'orgasme, et sans avoir besoin de passer par les cases « préliminaires » en plus… rentable comme délire…

Elle s'autorisa un petit sourire satisfait puis reporta son attention sur le rouquin puant qui semblait bien décidé à lui casser les couilles aussi…

En tout cas, il n'avait pas été assez con pour la croire… tant pis… ça ne coutait rien d'essayer après tout non ? Elle aurait préféré qu'il accepte, bien entendu, histoire de pouvoir l'enculer à sec avec du gravier et du gros sel, sans vaseline mais avec cautérisation post sodomiale… mais bon, il y aurait d'autres moyens, d'autres occasions.

Le plus important maintenant était qu'elle avait dévoilé ses origines carrièrales, que ce con allait demander une rançon à Day, qu'.elle ne payerait jamais (Yuno commençait à assez bien la connaître pour ça), et qu'elle-même allait passer pour une conne auprès de tous les membres du Cavalier Noir…

Si elle s'en tirait, Nightmare ne la laisserait sans doutes JAMAIS oublier cet épisode ridicule… Merde…

- Le Cavalier Noir ouais, c'est mon boulot. Mais le savoir ne t'avancera pas à grand-chose… c'est cette info que son partis chercher tes incompétents d'amis y'a des plombes.

Et dire qu'il aurait presque pu être proche de « sexy » s'il avait eu deux yeux et une hygiène de vie disons plus… hygiénique justement.

Elle leva les yeux d'un air sincèrement étonné quand il se mit à lui poser des questions sur Reaper.

- Reaper ? Bien sûr que j'ai entendu parler de lui… ce type est… spécial.

Ah, alors il voulait savoir des choses sur lui ? Bien ! Sans se départir une seule seconde de son expression surprise, elle fit mine de se mettre à réfléchir.

- Je n'ai pas vu le classement de ce mois-ci, et j'ai oublié celui du mois dernier mais bon, ça ne doit pas être bien compliquer à trouver. Je crois qu'il y a même quelqu'un en train de pondre une ou deux colonnes sur lui…

Elle lui adressa un sourire mitigé.

- Je ne suis pas la personne en charge de cette partie du Cavalier Noir à vrai dire, mais même si le classement ne m'intéresse pas vraiment, j'aime grapiller tous les renseignements possibles et imaginables sur ceux qui sont cités dedans...

Si ce type avait vraiment besoin de renseignements sur Reaper, elle pourrait peut-être s'en tirer assez facilement finalement.

- Pourquoi ? Il y a des choses que vous voulez savoir sur lui ?

[HJ : je fais avancer un peu les choses, dis-moi si ça te va ^^]

En réponse à la question de Yuno, Crazy Snake haussa les épaules. Il ne pouvait pas lui annoncer que le ministre de la censure lui avait ordonné de tuer Reaper, ça devait être secret. Même s'il était tenté de le lui dire, au moins pour lui arracher son petit sourire méprisant de sa gueule. Il n'était pas si con et si moche, s'il n'avait pas été un minimum intelligent, la police l'aurait attrapé. Ou il serait mort d'une crise cardiaque, la signature de Kira. La double personnalité de Yuno le déroutait encore, il avait la sensation de devenir un personnage de manga. Il le serait sans doute, si on lui enlevait ses taches de rousseurs, ses cernes, et son air malade. Il inspira une nouvelle poignée de fumée, ça lui transperça brutalement les poumons. Crazy se plia en deux, larme à l'oeil, il sembla étouffer. Il se frappa la poitrine, une fois, deux fois, jusqu'à ce qu'il puisse reprendre son souffle. Il lui fallut plusieurs minutes pour redevenir aussi détendu qu'avant, il soupira.

« Je choisis pas mes employeurs. À leur place, je t'aurais foutu de la dynamite dans tes trous, et je t'aurais placardé sur l'hôtel de ville. Mais bon... on aime pas ma délicatesse légendaire ».

Oui, Crazy Snake était capable d'utiliser l'ironie, son cerveau savait même ce que c'était. Il avait donné une réponse sincère, il n'aimait pas les gamines. Il ajouta avec un air nonchalant :

« Si j'étais intéressé par ton petit cul, je te demanderais bien ce que tu ferais en échange de ta liberté. Je t'avoue que l'idée de tester de nouveaux produits chimiques sur toi m'a traversé l'esprit, mais on m'a dit que j'pouvais jouer avec toi, sans t'abîmer. Les choses sont chiantes. »

En réalité, Crazy n'avait jamais fait vraiment face à ses victimes. La plupart ayant fini avec le ventre explosé... ça ne lui faisait pas peur de porter l'étiquette de criminel, et de connard national. Il adorait plutôt ça d'ailleurs. Ce qui le gênait, c'était le bordel autour, et patienter. Depuis un petit bout de temps, il avait envie d'enfoncer sa cigarette dans l'oeil de la jeune fille, afin de savourer sa peur, et ses cris de douleurs. Il n'aimait pas les gonzesses comme ça, ça le faisait chier. Derrière leur air inaccessible, c'était souvent de belles pétasses. Il en avait fait l'expérience plusieurs fois.

« D'ailleurs, je devrais t'arracher les yeux, t'as vu mon visage, ça c'est dangereux. »

Il était au Japon, il était roux, et borgne. Il était trop facilement reconnaissable pour laisser Yuno ainsi. En avalant une bouffée de cigarette, il se rapprocha de la journaliste. Crazy Snake avait oublié Reaper, la folie lui embrasait de nouveau le cerveau. Les rouages ralentissaient, rouillés, de la crasse s'y glissait, et donnaient de mauvaises informations à son esprit dément. Il l'attrapa par la gorge, il raffermit sa prise, puis il planta son unique oeil bleu dans son regard. Placide, son oeil ne bougeait pas, il était vide d'émotions. Crazy avala sa salive, puis il murmura :

« Le mec qui m'a fait ça, m'a dit que j'avais de jolis yeux. J'me suis toujours demandé ce que ça ferait, si je faisais ça à quelqu'un d'autre. T'es une vraie salope, pas vraie ? »

Le borgne expulsa de la fumée sur le visage de Yuno, de même qu'un relent. Il bougea la main dans les airs, comme s'il chassait une mouche, puis il colla son front contre le tien.

« Bien sûr que t'as pas peur, les pétasses ça prend trop les gens de haut pour avoir peur. »

Déjà, Crazy avança sa cigarette vers l'oeil droit de Yuno, celui qu'on lui avait volé. Son sourire réapparaissait, lentement, tandis que la folie remontait dans sa gorge. Son coeur battait d'excitation dans sa poitrine, il lécha sa lèvre inférieure, et il s'apprêta à lui enfoncer sa cigarette dans son oeil. Mais il s'arrêta brusquement, il entendit comme un glissement, et se retourna vers le clan Yamato. Étonné, il se releva, et observa ses employeurs marcher en direction de Yuno. La secrétaire de Monsieur Yamato lui offrit un coup d'oeil mesquin, puis elle lança :

«Nous avons les informations nécessaires pour la... petite. Nous nous occupons du reste ce soir, vous pouvez entrer. »

Ouais, en gros, on le chassait. Crazy Snake soupira, il haussa les épaules. Il reprit ses affaires, et il pointa du doigt la journaliste.

« Dommage ma chérie, on était bien tous les deux, non ? À demain. »

Il fit un autre sourire, puis il disparu dehors.

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Pendant que le sourire de Crazy réapparaissait lentement, celui de Yuno disparaissait rapidement. Question d'équilibre. Là aussi il se plantait : elle avait peur, très peur. Le noir sur ses cheveux lui permettait de ne pas s'en rendre compte dans les limites du raisonnable, mais l'idée de se faire enfoncer une cigarette incandescante dans l'oeil dépassait lesdites limites. Elle essayait de reculer et des gouttes de sueur se mirent à perler sur ses tempes, elle avait fermé les yeux, comme si elle espérait que sa paupière ferait comme une barrière entre la clope et son oeil et elle se préparait à hurler... quand tout prit fin parce que la relève était arrivée. OUF PUTAIN !!! Yuno tremblait de tous ses membres quand Crazy la salua à lui promettant désagréablement de la revoir le lendemain et, encore toute traumatisée par l'épisode de la cigarette, la seule chose qu'elle trouva à répondre à cet instant précis fut :

- D'accord... à demain alors...

Avec un petite signe de la main et tout... Perso je lui aurais gentillement suggéré d'aller se faire faire un second trou du cul par un éléphant mais bon... on est pas tous choqués de la même manière alors tant pis. Bref, revenons à Yuno.

Crazy s'est barré, elle est seule avec la femme qui l'a fait partir et elle se demande un peu ce qu'elle est supposée faire. Elle sourit d'un air charmeur, se disant que si elle drague cette femme elle pourra se barrer, mais ne se récolte qu'un regard méprisant.

- Suis moi.

Choquée que son regard dévastateur n'ai pas fonctionné, Yuno-brune la suit sans discuter. La femme l'entraine au fond de l'entrepot et lui fait grimper un escalier en métal en haut duquel se trouvent quelques bureaux, une salle de pause et une petite salle de bain. La femme, qu'on va appeler Gertrude parce que je sais pas comment elle s'apelle, que Yuno ne sait pas qu'elle est la secrétaire de Monsieur Yamato et que "la femme" c'est casse noix à mettre toutes les deux phrases, lui jette une petite trousse de toilette avec du savon et du shampoing, une serviette, des fringues propres et même sa trousse de maquillage trouvée dans son sac. Yuno lui jette un regard perplexe.

- Nous avons besoin que tu sois propre et parfaitement reconnaissable alors vas te laver et t'habiller sans poser de questions. Et dépêche-toi, je n'ai pas que ça à faire...

Étrangement, la jeune photographe s'exécuta sans rechigner. Peut-être était-ce parce que Crazy l'avait calmée avec son histoire de cigarette, peut-être parce qu'elle en a juste marre d'être sale... bref. Elle se lave le corps et les cheveux, se sèche, se sent mal parce qu'elle n'a ni après shampoing, ni masque répérateur, ni crême hydratante ni rien, elle s'habille : une mini-jupe plissée rouge pétant, un débardeur blanc... et voilà. Elle décide de rester pieds nus et ressort de la salle de bain en frottant ses cheveux avec la serviette, l'air toute timide et apeurée, larmes aux yeux.

- Vous... vous allez me tuer hein ?

Surprise du changement radical d'expression sur le visage et dans les yeux de son otage, Gertrude (ça choque hein) met une bonne seconde à réagir.

- Pas maintenant.

Elle envoit un texto, et deux types viennent prendre la relève. Gertrude s'en va sans rien ajouter et les types font redescendre Yuno. Y'a une nouvelle chaise avec des nouvelles cordres pour l'attacher, mais cette fois c'est contre un mur. On l'entrave solidement mais pas trop trop serré, gros soulagement pour Yuno d'ailleurs, et puis on lui balance une pèche en pleine gueule. Entre la surprise et le choc, elle est trop sonnée pour réagir et regarde son agresseur avec des grands yeux remplis d'incompréhension... et elle s'en prend une deuxième. Cette fois-ci elle gémit de douleur.

L'un des deux types prend son menton entre ses gros doigts et lui inspecte le visage un moment, puis il la lâche.

- Encore une ou deux et c'est bon, évite les yeux.

- Q... Quoi ?

Et elle se prend encore deux énormes baffes dans la gueule.

Yuno est sonnée, mais elle a quand même l'impression que son visage va exploser. Elle sanglotte silencieusement en fermant les yeux le plus fort possible, attendant la prochaine explosion de douleur sur son visage... mais rien ne vient.

- Hé Hurano, regarde moi !

Elle lève les yeux, terrifiée à l'idée que se soit un piège... et se fait éblouir par une lumière vive. Elle sursaute et referme les yeux mais comprend rapidement que c'était un flash. On l'a juste prise en photo.

On la détache, on lui installe un vague lit par terre avec des couvertures, on lui refile une bouteille d'eau et un onigiri au poulet et les deux types se posent un peu plus loin sur des chaises histoire de monter la garde.

Yuno boit la moitié de la bouteille, laisse l'onigiri parce qu'elle a l'estomac tellement retourné par la peur qu'elle n'arrive même pas à imaginer manger quoi que se soit, puis elle va se coucher. Elle pleure pendant des heures et des heures avant de finir par sombrer dans un sommeil agité durant lequel elle continue de pleurer, sa lèvre inférieure et l'une de ses paumettes saignent et elle a un gros bleu qui apparait sur l'une de ses joues...

Crazy Snake revint en fin de journée, après son « travail ». Si on oubliait les explosions, et les divers attentats qu'on lui demandait, le borgne était officiellement un simple serveur. Ce travail-ci ne lui convenait pas, évidemment, car il devait passer de longues journées en compagnie de son patron bourru, et de sa fille, lorsqu'elle n'était pas au lycée. Misaki le méprisait, parce qu'il n'était pas Japonais, et qu'il était roux. De plus, il lui arrivait parfois de se servir du restaurant comme lieu de rencontres. En réalité, deux fois, il avait dragué une cliente, et deux fois, il s'était fait larguer dans la semaine. De toute façon, une fois qu'il avait eu le plus important, Crazy Snake se moquait bien de redevenir brusquement célibataire. Ça lui évitait d'acheter tout un tas de cadeaux pour prouver son affection.

Ainsi sous un joli soleil, le borgne se rendait à l'entrepôt. Malgré tout, son patron s'inquiétait pour lui, et lorsqu'ils avaient trop de restes, il lui faisait un bête panier-repas en lui ordonnant de le manger au soir. Un sac plastique dans une main, et des canettes de bière dans l'autre, il marchait avec nonchalance. Une cigarette dans la bouche, il s'arrêta au coin de la rue, et prenant son portable, il envoya un message à « Gertrude ». Pendant dix minutes, il prit la peine de vérifier si on l'avait suivi. La rue était déserte, malgré la fin de la journée. En soupirant, Crazy Snake décida d'ouvrir une canette, mais il aperçut Gertrude l'appeler. En tailleur, les cheveux noirs ramenés en chignon, elle lui offrit un regard méprisant de ses yeux sombres. Crazy haussa les épaules, puis il se laissa guider jusqu'à une porte se trouvant derrière l'entrepôt. Dans le silence, uniquement perturbé par le bruit des talons hauts de Gertrude, Crazy se demandait si Yuno avait passé une bonne nuit. Au pire, il allait remédier à ça.

Quand enfin, le borgne retrouva sa poupée, il fut surpris de la voir... dans cet état. Elle n'avait que des bleus au visage, et l'air pitoyable. Il écrasa sa cigarette sous sa chaussure, il posa son bento dans un coin, et il s'ouvrit une canette de bière. Les hommes de Monsieur Yamato l'encadrèrent bientôt, ils le saluèrent avec de fausses marques de respect. On lui montra les photos de Yuno, et en grondant, Crazy Snake lâcha :

« C'est naze. »

Ce n’était pas comme ça qu'on allait faire peur au Cavalier Noir. Des trucs horribles, ces journalistes envoyaient tout le temps. En avalant une gorgée de bière, Crazy Snake s'avança vers Yuno. Il tendit la main, et il réclama :

« Des gants, et un couteau, j'vais vous montrer un truc sympa. »

Pendant qu'ils cherchèrent sa demande, le borgne s'accroupit devant la jeune fille. Sans sourire, l'air même blasé, il lui attrapa une mèche de cheveux. Il déclara :

« Ça va ? Moi ouais, j'ai bien dormi. Tu m'as pas manqué, pétasse. »

Crazy Snake écrasa son poing osseux dans le nez de la jeune fille. Quand on lui donna le couteau, il tira sur ses cheveux, puis il caressa sa joue avec la lame. Ça ne le faisait pas particulièrement triper, c'était juste pour lui faire peur. En soupirant, il mit les gants, puis il trancha une mèche au niveau de son sourcil. Avec un regard satisfait, il se redressa, et il donna la mèche de cheveux au molosse derrière lui.

« Dans un premier temps, envoyez ça au Cavalier Noir, sans message, sans rien. »

Ensuite, Crazy Snake jugea les coups que Yuno avait prit. En mordant sa lèvre, il pencha la tête sur le côté, puis il lui enfonça son pied dans son ventre. Il lui prit la mâchoire d'une main, et de l'autre, il lui frappa le nez jusqu'à ce qu'elle saigne. On ne tenta pas de l'arrêter, malgré son côté adulescent, on le trouvait suffisamment professionnel pour le laisser faire à sa guise. Les mains dans les poches, Crazy recula, il admira son travail. Finalement, il reprit le couteau, et il déchira le haut du t-shirt. Il se débrouilla pour qu'on voie son soutien-gorge, il lui écrasa son poing dans la poitrine. En tendant les doigts vers le molosse, il réclama l'appareil photo.

« Comme ça... ça d'vrait suffir, j'pense. Il y avait pas un mec qui filmait ces meurtres ? On pourrait faire ça. Tourner un film avec elle, en...
— En lui demandant des trucs un peu... hum... »

En soupirant, Crazy prit une photo. Une jolie photo, en essayant de capter le moment le plus pitoyable de Yuno.

« Allez... souris, c'pour tes potes. »

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Yuno passe vraiment l'une des pires journées de sa vie. Elle a super mal dormi, les tas de muscles qui la surveillent se sont amusés toute la journée à la tripoter en lui promettant de la violer tous les deux quand "on" en aurait terminé avec elle, et quand elle a eu le malheur de demander une crême hydratante pour son visage, on lui a proposé un "autre genre de crême, ça n'hydrate pas beaucoup mais c'est bourré de protéines".................................... Horrible.

Et là, au moment où elle lève les yeux... il revient. Le monstre aux cheveux roux qui l'a tellement effrayée la veille, le type qui voulait la brûler et lui planter une cigarette allumée dans un oeil. Le connard qui... qui... un couteau ? Comment ça un couteau ? Pour quoi faire ?

Elle lève les yeux vers lui et lui adresse un regard rempli de peur, de surprise et d'incompréhension, sans répondre à sa question parce qu'un coup sur le nez qui fait exploser des étoiles dans ses yeux l'empêche d'en placer une. Elle laisse échapper un petit gémissement pittoyable et cherche à reculer, à se mettre hors de portée de ce type monstrueux qui a dû avoir des gros soucis de violences durant son enfance, mais il l'attrape par les cheveux et commence à jouer avec son couteau sur sa joue. Elle le contempla avec horreur quand il sectionna une mèche de ses précieux cheveux et failli se mettre à pleurer. Merde quoi, on ne coupe pas d'aussi jolis cheveux avec un couteau comme ça ! Ils sont tout abîmés maintenant !

Tout l'air que contenait ses poumons réclame son indépendance d'un seul coup quand le pied de Crazy s'enfonce dans son ventre avec brutalité. Elle met plusieurs secondes à retrouver un souffle sifflant et à réussir à gémir de douleur, et elle n'a même pas le temps d'en profité était donné que ce con semble déterminé à lui enfoncer le nez dans le crâne. Elle sent le sang couler sur ses lèvres et même goutter sur sa poitrine. Des larmes de souffrance, de frustration et de peur coulent toutes seules de ses yeux sans même qu'elle ne s'en rende compte tout de suite. Au final, il lui découpe le débardeur et la frappe à nouveau. Étant donné qu'elle marque vite et beaucoup, sa peau commence déjà à virer au bleu là où il l'a frappée, même un peu autour de son nez ensanglanté. Elle essaye de se redresser un peu plus, mais son ventre lui fait trop mal... Elle ne relève même pas le ennième commentaire dégueulasse d'un des tas de muscles..

« Allez... souris, c'pour tes potes. »

Yuno lève les yeux vers lui et soupire tandis qu'un sanglot lui monte dans la gorge... et éclate. Elle se met à pleurer en se mordant la lèvre pour ne pas le faire trop bruyamment et continue de le regarder jusqu'à ce qu'il ai terminé de la photographier. Après ça elle baisse la tête et essuie son nez dans son t-shirt. Elle en déchire même un bout pour le mettre dans la narine qui ne s'arrête pas de couler. Elle lève de nouveau les yeux vers lui et le regarde quelques secondes.

- Ça ne va pas marcher votre truc... vous feriez tout aussi bien de me tuer finalement. Ça ne fait pas partie de la politique du Cavalier Noir que de payer des rançons...

Elle s'essuie les yeux.

- En plus, si j'y retourne un jour Nightmare ne me laissera jamais oublier tout ça... jamais... et Day va me tuer...

Elle gémit.

- Pourquoi vous faites ça hein ? J'vous ai rien fais moi !

Que ça marche ou non, Crazy Snake s'en moquait assez. Ce n'était pas de son ressort, ni de son affaire. Ici, il était employé pour faire exploser un truc dans Tokyo. S'il tourmentait Yuno, ce n'était que pour aider, et augmenter son salaire. Même si au fond, l'argent n'avait jamais été sa véritable motivation. Perplexe, il fixait la jeune fille. Tant pis pour elle si personne ne venait remettre la rançon. Il pourrait alors demander à Monsieur Yamato s'il pouvait expérimenter une bombe humaine, c'était quelque chose qu'il n'avait jamais fait. Mordant sa lèvre, il croisa les bras, et il se ralluma une cigarette. Il s'adossa contre le mur, plus loin, et il abandonna sa pauvre victime aux soins lubriques des mastodontes. Pensif, Crazy s'interrogeait s'il ne perdait pas son temps.

Ça commençait à le lasser ce petit jeu, c'était marrant... mais cinq minutes. Là, il aurait préféré retourner chez lui, et attendre sa copine du moment. Entre faire la garderie, et baiser, Crazy Snake préférait baiser. Et entre baiser, et foutre le bordel, il préférait le Chaos. En soupirant, il examina sa cigarette, en songeant qu'au Japon, c'était pénible de se procurer ses Gitannes, parce que bon... il adorait les trucs forts. Et qu'il était attaché à l'occident pour oser mettre en bouche un autre autre genre de cigarette (la personne comprenant autre chose devrait savoir qu'elle a penchant vicieux).

« C'est du combien ? À ton avis ? »

En tirant sur sa cigarette, Crazy Snake se tourna vers les deux gardiens. Même de là où il se trouvait, il pouvait apercevoir la dentelle de son soutien-gorge, et l'un des types était en train de palper la marchandise. Avec une indifférence incroyable, notamment à cause de son cerveau grillé à la nicotine, Crazy haussa les épaules. Ce n'était pas son problème si Yuno passait à la casserole, même si l'entendre hurler et chialer lui taperait sur les nerfs. En mouillant ses lèvres, le borgne gratta son oeil en bâillant.

« On a qu'à vérifier, c'est que... j'passe l'premier. »

Les deux hommes s'envoyèrent un regard haineux, Crazy mordit sa lèvre inférieure. C'était qu'ils la tripotaient, sérieusement, et que ça devenait dégueulasse. Il n’était pas payé pour voir deux colosses bander comme des chiens devant une gamine, il avait autre chose à foutre. En avalant une autre poignée de fumée, le borgne gronda :

« On est pas assez amis pour qu'on s'branle ensemble. Va nettoyer ton pantalon, y a une tâche. »

Les deux hommes se tournèrent vers Crazy Snake. L'un ouvrit la bouche, mais l'autre lui fit signe de se taire, et il lui attrapa le bras. En passant devant lui, on lui balança :

« J'vois qu'on a envie de s'amuser, surtout. On reviendra quand vous aurez terminé.
— Ouais, j'te raconterai ».

En fumant, le borgne les fixa s'en aller, ils quittèrent la pièce, et il soupira. En levant l'oeil vers le plafond, il pensait que la journée lui tapait de plus en plus sur les nerfs. Ensuite, Crazy Snake s'avança vers Yuno, sans son air menaçant, mais toujours aussi patibulaire et rustre. Il s'accroupit devant elle, il cracha de la fumée sur son visage, puis il jeta un regard à sa poitrine. Il haussa les sourcils, blasé. Ça faisait quoi de violer une nana ? En réalité, quel était l'intérêt ? Crazy Snake ne saisissait pas très bien. C'était chiant, non ? Il n'y avait pas de véritable rapport sexuel dans un viol, et encore moins de véritable plaisir des sens. Il l'attrapa par les cheveux, et il essaya de s'imaginer lui, en train de la violer. À part un trou noir, il n'y avait rien dans sa cervelle. Le viol ne lui évoquait rien. C'était comme la justice.

« C'qui Nightmare ? T'as l'habitude de te faire torturer par de vilain garçon, c'est ça ? Ça doit être certainement une grosse pédale. Il y en a pas mal par ici. »

« Pédale » était une insulte revenant souvent dans sa bouche. Crazy Snake ne haïssait pas particulièrement l'homosexualité, en réalité, il s'en foutait. Il aimait bien ce genre d'insulte, car ça s'attaquait directement à la virilité de quelqu'un. Et à preuve du contraire, il ne pouvait pas insulter Yuno de pédale, parce qu'elle devait avoir un vagin.

« Après... en fait, perso', j'ai pas de motivation. J'suis pas ici pour te tripoter les nichons, et te trifouiller ta fleur avec les doigts, t'es une grosse moche. »

Injure digne d'un gamin de primaire ; Crazy Snake le pensait, pourtant, il disait toujours ce qu'il pensait. Et puis, c'était amusant d'embêter Yuno.

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A peine remise de la session photos, Yuno commença à sérieusement flipper. Les deux gros connards style videurs de boîte un peu glauque semblaient être fermement attirés par l'idée de faire sa connaissance en profondeur. Yuno n'avait jamais rien eu de spécial contre les relations sexuelles, au contraire, elle trouvait ça plutôt sympa en fait. Mais elle préférait faire ce genre de choses avec des types moins... genre dégueulasses que ceux là quoi. Et de préférence des mecs qu'elle avait choisi ou qui l'avaient séduite... et si elle était amoureuse c'était encore mieux en fait. Yuno n'était pas vraiment le genre de fille à se précipiter derrière les hommes comme un chien derrière un gros os à moelle, si ça arrivait, c'était cool... et sinon tant pis. Même quand elle sortait avec des amies on lui reprocher souvent de ne pas entrer dans le "jeu de la drague"... ça ne l'intéressait pas forcément. Bref, dans tous les cas, là comme ça... non... vraiment, non...

Histoire de montrer qu'elle n'était pas d'accord, elle les repousse comme elle peut parce que bon... elle a quand même mal partout la pauvre, mais ils sont deux et ça complique un peu les choses. A partir du moment où elle sent leurs grosses pattes immondes se glisser sous sa jupe et passer toutes les barrières de la politesse élémentaire, elle donne des grands coups de pieds devant elle, se disant qu'elle va vraiment finir par expérimenter les joies discutables du viol... mais le salut apparaît subitement, et de manière tout à fait surprenante, en la personne du rouquin désaxé...

Sidérée, la jeune fille en reste bouche-bée pendant que les deux connards partent en remontant leurs braguettes à regret. Un vague « Eh ben... vu la bosse que ça leur fait au moins j'aurais pas eu bien mal... » lui passe dans la tête pendant une demie seconde, puis la présence imposante du borgne semble se rapprocher.

Ah merde... est ce qu'il aurait prévu de se la taper lui même ? Au moins il était plus mignon que les deux « p'tites bites » précédentes mais bon quand même quoi ! Sérieusement, Yuno préférait passer son temps à des choses plus sympa que de lutter contre des violeurs. Elle trouvait que ça n'était un passe temps ni agréable, ni divertissant.

Un regard blasé... sans déconner quoi, on lance pas un regard blasé à la poitrine d'une fille quand on l'a devant les yeux merde ! Vexée, la jeune photographe se fait une promesse à elle même : si jamais il veut effectivement la violer, elle se débrouillera pour éclater de rire en voyant son matos. Non mais franchement ! Que maroufle ! Un regard blasé... Ok, Yuno n'est pas non plus une madame-bonnet-F-surement-en-plastique-de-toute-façon mais quand même ! Elle a une poitrine tout à fait honnête et respectable. Connard va !

Et puis là... stupéfaction totale. Au lieu de se mettre à la tripoter comme un vieux pervers dégueulasse, il se contente de lui poser des questions sur Nightmare... Au début elle ne lui répond pas, incapable de faire autre chose que de le regarder avec des grands yeux ronds de surprise... elle met plusieurs secondes avant de retrouver l'usage de la parole.

- Euh... en... en fait c'est un type qui travaille avec moi, il... c'est juste... c'est pas qu'il me torture physiquement mais... je sais pas. Il me fait peur... ce type doit avoir un passé plus sanglant que n'importe qui. Et puis c't'un connard...

Le regard blasé lui revient en mémoire.

- Vous devriez bien vous entendre tous les deux...

Par contre pour le « pédale » elle n'était pas sure. En réalité, elle ne s'était jamais posé de questions sur les préférences sexuelles de Nightmare... probablement parce qu'elle le voyait davantage comme un démon rongeur de cadavres que comme un homme... oui... c'était sûrement ça...

Soufflée par le fait d'entendre le mot « fleur » sortir de la bouche de Crazy pour parler de ce que les P'tites Bites avait « trifouillé » un peu plus tôt, elle met un moment à tilter sur ce qu'il lui dit. « Grosse moche »... Mais sans déconner quoi ! Ce type est vraiment le derniers des salauds !!! Bon, au moins il n'a pas l'intention de la violer c'est déjà bien... Mais merde quoi !!

- Ah mais merde à la fin ! J'suis pas grosse, j'suis pas moche et j'ai des jolis seins ! Vous êtes franchement méchant vous le savez ça ? Que vous me frappiez c'est une chose, mais vous êtes pas obligé de m'insulter et de me balancer des mensonges pareil à la figure ! Je vous dis rien moi !

Elle a affreusement envie de lui latter les couilles... mais elle se retient.

- Et puis « gnagnagna j'ai pas de motivation », n'importe quoi ! Y'en a forcément une, même si c'est le fric où juste pour passer le temps. Personne ne fait quelque chose sans la moindre espèce de petite raison derrière. Et puis d'abord vous me faites chier avec vos conneries ! Je me fais frapper, tripoter par deux glandus à petites queues et à gros bras, j'ai rien bouffé, la flotte qu'on m'a donnée était immonde et en plus on m'insulte... j'en ai marre moi !!!

Et puis elle réalise ce qu'elle vient de dire, et à qui elle vient de le dire...

- Et... euh... hum... pardon... je voulais dire ça... enfin pas tout mais... euh... pardon.

« Mais j'raconte pas d'mensonges, j'te trouve moche, c'pas un mensonge ! »

Quoi ? Hein ? Il faisait que dire la vérité, elle pouvait la prendre comme elle le voulait, sa remarque ! Crazy Snake ressentait un fort dégoût pour toutes les personnes rousses parcourant la terre. Malheureusement, Yuno en faisait partie. Le reste, il s'en foutait ; elle était rousse, et ça lui suffisait pour savoir qu'elle était moche. Elle s'attendait à quoi pour l'engueuler comme ça ? Qu'il la plaigne, et l'embrasse sur la joue pour lui redonner courage ? Elle pouvait rêver, mais pas à ce point. Elle n'avait aucun sens de la réalité pour s'adresser à lui de cette manière. Pour lui, elle était moche. Parce qu'elle était rousse, et japonaise.

Quand elle prétendit qu'elle avait de jolis seins, il faillit lui demander s'il pouvait vérifier, mais il se retint. En fait, il n'eut pas le temps de placer d'autres remarques, elle parlait trop vite. En grattant sa mâchoire, le borgne finit par décrocher, et il se contenta de murmurer « ouais ouais", en regardant ailleurs. Si elle avait de si beaux seins que ça, et si elle était véritablement jolie, elle ne se défendrait pas de la sorte. Pour Crazy Snake, les personnes qui se justifiaient avaient beaucoup de choses à se reprocher, c'était comme ça qu'il l'interprétait pour Yuno.

« Bah... j'ai pas de motivations, j'fais ce qu'on m'a d'mandé. J'perds juste mon temps. J'ai un boulot chiant en dehors de la garderie, hein, et si t'étais pas là, j'aurais pu m'poser devant la télé, et boire mes bières. »

En parlant de bière... Crazy Snake se souvint qu'en venant ici, il était passé s'en acheter. En soupirant, il se redressa, puis il s'ouvrit une canette. Une bonne cigarette, et une bière, qu'est-ce qu'il demandait de plus à la vie ? Ah... des explosions, mais là, c'était pas possible. En fixant Yuno, Crazy continuait de boire. De l'alcool glissait au coin de sa bouche, ce qui ne le rendait pas sexy pour autant. Un coup de langue suffit pour arranger le problème. En s'adossant au mur, il croisa une jambe devant l'autre, et il continua de boire.

« Et pour les mauvais traitements, j'y peux rien. C'pas des gentils les mecs, c'est des... jacuzzis ? 'Fin... comment vous appelez la mafia chez vous, déjà ? Yacuzi... nan... c'pas ça... »

En grognant, Crazy mit toute son énergie à trouver le bon mot. Les sourcils froncés, le front plissé, il soupira, jusqu'à ce qu'il comprenne. Il s'exclama alors :

« Des Yakuzas ! Voilà... bah voilà, c'est Yakuzas. »

Autant dire que si lui plaisantait, eux absolument pas. Lorsqu'ils s'étaient rencontrés la première fois, le borgne avait glissé quelques blagues ici et là, mais il avait récolté un regard méprisant. C'était pas un balai qu'ils avaient dans le cul, ces Japonais, mais un arbre. Et il n'avait pas la tronçonneuse adéquate pour aller l'en sortir.

« Donc... c'pas des gentils, les mecs. Hein. T'es pas une princesse, t'es juste une gamine. Tu crois qu'ils vont te masser les pieds et t'offrir des masques gommant pour tes jolis yeux ? Naan... »

Certes... Crazy Snake se moquait d'elle, mais la jeune fille n'était pas en position de se défendre, de toute façon. On lui avait donné le pouvoir de faire ce qu'il en voulait, tant qu'elle restait en vie. Il n'allait pas se montrer doux et avenant gratuitement, elle n'était pas assez à son goût... quoique... En soupirant, il prit une autre canette qu'il fit rouler jusqu'à elle, il l'observa, et il gronda :

« Si l'eau elle est dégueulasse, prends ça, ça vaudra mieux. »

Eh quoi ! C'était de l'alcool ? De la bière japonaise ? La seule chose qu'il aimait d'ailleurs, alors quoi ? On ne l'engueulerait pas parce qu'il en offrait à Yuno, si ? Il ne voyait pas le problème. C'était fort, mais lui ça ne lui faisait pas encore effet. Et si elle devenait bourrée ? C'était pas son problème. ET MERDE HEIN. Il venait de faire une BONNE ACTION, on n'avait pas à le faire chier pour le reste.

» Hi, I just want to talk to you ~ (Yuno ♡)
» C'est YUNO bordel... pas "Sakura"...
» Je ne suis pas ce que tu crois [Fate]
» J'suis pas absente !
» Ma foi, je suis libre