Make a joke and I will sigh and you will laugh and I will cry { Minyu

Nathan se sentait en colère ; Nathan était furieux. Son regard aurait pu déraciner un arbre, butter une colonie de fourmis d'Afrique, faire s’envoler une meute de rhinocéros. Ses mains blanches, trop blanches tenaient, et avaient roulé en boule, à force de le lire, de le relire et d'encore le relire, la page du Cavalier Noir, cette page traîtresse et qui lui avait valu une humiliation de ses collègue. Illness ne se rendait-elle pas compte de ce qu'il faisait, pour elle ? Du risque qu'il avait pris, déjà, en suggérant au premier ministre et à tous ses autres collègues qu'il ne serait pas bon, mais pas bon du tout de supprimer le Cavalier Noir. Que s'ils le faisaient, ils allaient avoir une meute de rebelles de plus à gérer. Que Lady Illness était une femme Ô combien compétente qui travaillait pour le bien du gouvernement. Les rumeurs soufflaient que le Cavalier était sous la complète houlette du gouvernement, et c'était vrai. Jamais plus un article comme celui de Minyu à l'époque n'allait être publié, et les choses scandaleuses allaient être endiguées.

Nathan Suzaku aurait dû avoir la puce à l'oreille lorsqu'il avait lu cet article sur la mort de Misa Amane : à l'époque, il n'en avait pas fait cas, parce que cette mort était survenue dans la nuit et qu'il avait été d'accord avec les journalistes : ils avaient dû trouver vite fait un rédacteur et enquêter de manière intelligente, la manière Cavalier, sur cette mort étrange. L'article avait plu à Nathan Suzaku, bien que tout le gouvernement n'ait été de cet avis, mais en ce qui concernait Beyond Birthday, c'était différent...sans doute parce que B était un tueur multi-récidiviste, mais également parce qu'il s'agissait ni plus ni moins d'un article rédiger par Lady Illness.

Il la droguait plus ou moins depuis des mois...en fait depuis qu'elle les avait rejoint, Day et lui, dans les locaux du Cavalier Noir. Il s'était allé senti complètement largué et n'aurait pas pensé que Illness...Sa Illness à lui affronterait aussi rapidement que cela le large monde. Quitterait sa petite chambre, et bientôt, son appartement à lui. Cela, Nathan était incapable de l'envisager : c'était tellement ancré en lui, qu'il avait sauvé Illness que maintenant, il voulait la garder pour lui seul, là, au chaud. Qu'elle ait écrit cet article sur Beyond Birthday, cela signifiait qu'elle avait déjoué son tour et qu'elle le savait, qu'il lui faisait prendre des médicaments. Qu'elle avait arrêté le traitement et que quelqu'un – peut-être Cheshire – l'avait manipulée pour lui faire croire à cela.

C'était pour cela qu'il était dans les locaux du Cavalier Noir : oh, Nathan ne pensait pas que Illness y soit, mais il tenait au moins à choper Day et à l'engueuler. S'il y avait un ministre de la censure, ce n'était pas pour rien : on ne faisait pas voir de faux documents au ministre pour les remplacer dans la soirée par un éditorial qui défiait tous les sens de la moralité. Suzaku était furieux : d'ailleurs, à son arrivée dans les locaux, il ne salua même pas la secrétaire ni ne lui demanda d'appeler Day pour discuter avec elle. Non. Nathan Suzaku enjamba quatre à quatre les marches de l'escalier – il se foutait du fait que le Cavalier Noir était un building...Vraiment. Il n'était plus à l'aise dans cet ascenseur qui ne lui rappelait que sa liaison – ou plutôt la non liaison – qu'il entretenait avec Lady Illness.

35e étage. Si ses souvenirs étaient bons, puisque Day avait refusé d'emménager dans le bureau de Illness, le sien devait être ici.

Il était essoufflé, mais il courrait toujours : Nathan avait une bonne forme physique, du fait de sa double formation de sniper. Il croisa un type et lui attrapa soudainement le bras, un brin de haine dans son regard.

« Le bureau de Day ! Où est-il ??? Répondez immédiatement ! »

Tous les jours se succèdent et se ressemblent, comme d'habitude. De jour en jour, je me sens de plus en plus anxieux, de jour en jour, j'ai l'impression de m'endurcir, de ne plus rien ressentir d'autre que de la haine. Je ne suis plus le garçon juste sensible et idéaliste d'avant, j'ai l'impression que ne suis plus qu'un jeune homme capable de tout pour prendre sa revanche sur le monde entier, sur cette société de merde. Je n'ai plus qu'une idée en tête : me venger de Kira, et empêcher qui que ce soit de faire du mal à Day. Depuis que je l'ai embrassée, depuis que j'ai osé faire ce geste égoïste, parce que je l'aime, parce que je me suis laissé aller à mes sentiments... Depuis que je sais que c'est réciproque, en plus... Je sens mon cœur battre la chamade tout le temps, j'entends des voix qui m'angoissent, qui m'empêchent de dormir. Qui pourrait lui vouloir du mal ? Beaucoup de monde. Qui pourrait me l'arracher ? Ça me rend fou, je ne veux pas perdre à nouveau la personne que j'aime, à cause de Kira, à cause des autres, à cause de tous ces gens qui pourrissent la vie des bonnes personnes.

Je soupire, me tirant de mes pensées. A quoi ça sert, de ruminer des songes stériles ? Je me redresse, m'étirant quelques secondes. J'ai suffisament réfléchi pour aujourd'hui, tiens. Je n'ai qu'une envie : quitter ce bureau. Je sors de la pièce sans attendre, même si j'ignore où je vais me rendre dans l'immédiat. Peut-être pourrai-je aller voir Day ? J'ai besoin de sa présence, et j'aimerais tellement profiter avec elle, tant qu'il est encore temps... Profiter de la vie un peu, avant que je ne finisse par mourir un jour, comme tous les autres, tué par un prétendu dieu, dans une ruelle sombre avec un couteau enfoncé dans le dos, ou encore à cause de ce gouvernement pourri jusqu'à la... Je sursaute en sentant une main froide empoigner mon bras bien trop fragile, en cet instant.

« Le bureau de Day ! Où est-il ??? Répondez immédiatement ! »

J'écarquille les yeux. Est-ce que je suis en train de rêver ? Que fait Nathan Suzaku, le premier ministre de la Censure, cet homme abject et idiot, ici, que pense-t-il être pour me parler de cette manière, que veut-il pour me poser une telle question ? Dieu, que je le déteste. Je le sais, je le sens, rien qu'à le voir devant moi, rien qu'à entendre le son de sa voix, rien qu'à savoir que c'est bien l'homme qui m'a menacé par mail qui se tient devant moi. Pendant plusieurs secondes, le silence complet. Je le fixe. J'avais déjà vu son visage par le passé. Aucune surprise pour moi. Il n'a pas l'air franchement ravi. Que veut-il à Day ? Je ne vais surtout pas lui faire le plaisir de lui répondre ; oh que non.

« Lâchez-moi tout de suite. »

Ma voix est calme, mais mon ton glaçant, sans appel. S'il continue à me tenir comme ça, je vais me sentir mal. Tout d'abord parce que je déteste les contacts, que j'ai l'impression qu'il va me casser en deux. Et ensuite car il me dégoûte profondément, certainement. Je sais bien que je suis jeune, sûrement loin d'être menaçant, imposant ou effrayant. Mais je suis loin de jouer la comédie, j'ai beau être calme et juste froid, mon regard et la manière dont je me tiens, menton relevé, montrent clairement que je n'ai pas peur de lui, et que je le regarde de haut. C'est clairement le cas. Il est sûrement l'être humain pour lequel je ressens le plus de rancoeur et de haine, en ce moment. A part Kira, évidemment. Et même si j'ai écrit un article à son propos, je sais pertinemment qu'il est bien trop incapable pour être « Dieu ». Je méprise tous ses actes, quand je pense qu'en plus, c'est avec lui que se trouve Illness chaque jour, quand je pense que c'est de sa faute, si Day se sent si mal en ce moment...

« Pourquoi devrais-je vous répondre immédiatement ? Je n'ai aucune raison d'obéir à quelqu'un comme vous. »

Peut-être vais-je déjà trop loin. Mais comment m'en empêcher, alors que je l'ai enfin en face de moi ? Alors qu'il me serre le poignet comme si j'étais une vulgaire poupée de chiffon ? Alors qu'il me parle de Day avec cet air furieux qui ne me dit rien de bon ? Je sens la colère et le ressentiment monter, monter, monter... Quand vais-je finir par exploser ?

C'était un jeune homme japonais qui semblait être aussi perturbé que la plupart des résistants de ce bas monde. Ses yeux étaient fous, tandis qu'il lui faisait oppression et l'empêchait de se rendre où il voulait. C'était très simple : Suzaku voulait voir Day – pour l'engueuler, certes. Il transpirait la colère par chacune des pores de sa peau, était blanc comme un cul et avait l'air si stressé que si le Cavalier Noir avait des détecteurs anti-stress au lieu des détecteurs de fumée, ils se seraient probablement tous mis à sonner en même temps.

Il était peut-être vrai qu'il n'aurait pas dû s'adresser comme cela à un autre être humain : mais il était bien trop énervé pour se comporter normalement. Et un Suzaku énervé, c'est grossier et pas tendance du tout. Ça crie très fort et ça énerve encore plus les gens sur son passage. Le petit jeu, au Ministère, c'était celui du premier qui croiserait, tout droit sur son chemin, le jour où il serait plus énervé que d'habitude. Il croisait alors des gens qui s'enfuyaient sur son passage et ça avait le don de le mettre de plus en plus en colère : le premier qu'il topait, il se ferait virer, et c'était tout. Surtout en ce moment alors qu'il y avait Illness, Nathan était de plus en plus instable. Il ne pouvait plus rien supporter, surtout pas la pression du gouvernement, et avec Iwa qui en rajoutait des couches, il ne dormait pas souvent.

« Sans rire ? Je vous signale tout de même que j'ai le pouvoir de vous foutre en prison sans aucune raison. Je pourrais vous en donner mille et une, des raisons pour me répondre et me laisser passer. », il lâche Minyu, tout simplement parce qu'il en vient à penser purement et simplement qu'il déteste le contact de sa peau. Qu'il hait être en contact de cette manière avec un autre être humain.

À ce moment, Suzaku aurait bien besoin des petits cachets d'Arthur. Si celui-ci les lui a donnés, ça doit bien être pour une raison, n'est-il pas ? Il faut qu'il se calme, qu'il parvienne à ne pas être excité, mais c'est impossible : il ne parvient même pas à ne pas y penser. Penser ? Il pense à tuer Minyu. Il aimerait lui faire exploser la tête avec ses mains ; il y aurait son cerveau qui juterait, ses larmes qui couleraient. Là, il s'excuserait, devant lui, et comme l'incapable qu'il était, il mourrait dans la seconde. C'était si simple, alors pourquoi ne pas le faire ? Nathan avait les mains légèrement levées, comme s'il hésitait, puis, il les baissa.

Il ne devait pas en rajouter une couche, surtout qu'il était en si mauvaise liaison avec Iwa. Surtout que lors du festival, il avait magistralement tiré sur son collègue Arashi Darkwood.

« Alors, je vais reprendre mon calme. Ça va être difficile. Quel est votre nom ? Je suis Nathan Suzaku, ministre de la censure et de la propagande. Je suis responsable de ce journal, des contenus et personne n'est autorisé à faire passer un article après mon visa, surtout si ledit article fait la promotion des criminels et leur apologie. Et là, vous allez me sortir qu'au gouvernement, presque tout le monde a son nom dans la liste de criminels de votre fichu bouiboui ? ...C'est vrai. Mais nous le faisons pour une cause, nous le faisons parce que nous sommes persuadés de faire le bien ! Parce que vous pensiez qu'il n'y avait qu'un point de vue : que nous étions les méchants nazis et eux les gentils résistants !? MAIS OUVREZ LES YEUX MERDE !!! Ils tuent des gens par centaines ! Nous réhabilitons les bas-fonds au fur et à mesure, mais vous pensez qu'on le tire d'où, cet argent, sans rire ? Je ne sais pas, mais si vous voulez vous rendre utile, faites un article qui compare les deux camps, et emmenez-moi voir Day ! »